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  • : Blog consacré à l'actualité dans les domaines de la politique et de l'astronomie, vus au sens large. Ce blog n'est pas neutre : il se positionne à gauche, de philosophie laïque et donnant la primauté à l'expérience sur la spéculation. Ce blog est ouvert au débat, à l'exception des invectives, des attaques personnelles et des insultes qui seront systématiquement rejetées afin de permettre à chacun(e) de débattre en toute liberté et dans la sérénité qui n'exclut en rien la passion.
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7 juillet 2013 7 07 /07 /juillet /2013 22:40

Le 6 juin 2013, le journaliste Glenn Greenwald publie dans le Guardian un article retentissant dans lequel il fait état d’un analyste américain, employé à la NSA (National Security Agency), le plus important service secret US après la CIA, du nom de Edward Snowden. Il lui a révélé l’existence d’un logiciel au doux acronyme de PRISM qui permet à cette agence de capter, d’enregistrer et d’analyser toutes les communications électroniques dans le monde ; aussi bien des quidams que les plus importants organismes publics ou privés dans le monde. Il révéla également que la NSA enregistrait les communications des alliés européens des Etats-Unis et celles des institutions européennes.

 

 

 glenn-greenwald-cc.jpg

Glenn Greenwald : un journaliste rigoureux et courageux

 

 

Qui est Glenn Greenwald ? Il est né à New York en 1967 et a étudié le droit à l’université de Washington. Il commença sa carrière comme avocat. Ensuite, il s’est tourné vers le journalisme d’investigation. Il est devenu également écrivain. Très vite, il a acquis une très bonne réputation pour le sérieux de ses investigations, bien qu’il soit critiqué pour aller au fond des choses dans les dossiers délicats. Il a figuré dans le « top 25 » et le « top 50 » des journalistes américains. Il a toujours dénoncé le caractère tyrannique du gouvernement américain – qu’il soit républicain ou démocrate – et on lui reproche d’avoir eu des contacts avec Wikileaks. Greenwald a violemment critiqué la politique de Bush et le fameux Patriot Act  et également l’influence d’Israël sur la politique étrangère américaine. Cela lui a valu de solides inimitiés dans l’establishment anglo-saxon. En 2012, il a commencé à travailler pour le Guardian. Gay, Glenn Greenwald vit entre Londres et Rio de Janeiro où habite son compagnon.

 

 

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Edward Snowden a eu le courage de bouleverser et de risquer sa vie par fidélité à ses principes.

 

 

Connaissant la réputation de Greenwald, Edward Snowden l’a choisi pour l’aider à dénoncer ces pratiques totalitaires à l’échelle mondiale. En tout cas, si on en croit Glenn Greenwald, c’est un scénario digne d’un des plus tordus films d’espionnage. James Bond est dépassé !

 

 

James Bond dépassé

 

 

Le 4 juillet, Greenwald prononça un discours à la Conférence Annuelle du Socialisme de Chicago où il décrit l’aventure qu’il a vécue avec Snowden et en tire les conclusions politiques.

 

 

Tout aurait commencé il y a plusieurs mois. Snowden contacte le journaliste du Guardian par mails, d’abord en ne révélant pas son nom. Il prétendait avoir des documents qui pourraient l’intéresser. Greenwald ajoute : « ce qui devait devenir par la suite le plus grand euphémisme de la décennie ». Après plusieurs échanges infructueux, c’est de Hong Kong que Snowden l’appelle à nouveau, toujours sans donner son nom, où il évoqua pouvoir lui transmettre plusieurs documents dont il donne la substance au journaliste. Snowden tentait de faire venir Greenwald à Hong Kong, ce qu’il refusa bien entendu. Alors, le jeune analyste lui fait parvenir quelques documents « à titre de hors d’œuvre ». Et Greenwald en dit : « Ces documents, même si ce n’était qu’un petit échantillon, étaient les choses les plus extraordinaires que j’avais jamais vues. Je me souviens qu’après avoir lu les deux premières pages, j’étais littéralement étourdi, étourdi par une sorte d’extase et d’euphorie par rapport à ce qu’il avait en sa possession. » Cela le convainquit d’aller à Hong Kong ! Il y est resté onze jours…

 

L’affaire prit des proportions considérables dont les conséquences allaient être énormes. Même au sein de ce monument médiatique qu’est le Guardian, tout fut bouleversé. Glenn Greenwald dit : « J’ai juré que quoi que je fasse dans la vie avec cette histoire et au delà, j’allais dédier ma vie à faire justice à l’incroyable acte de sacrifice personnel qu’Edward Snowden a accompli. Et cette énergie, je le constatais alors, infecta tout le monde au Guardian, qui est une organisation médiatique assez grande, et je suis la dernière personne à faire l’éloge d’une organisation médiatique, même une pour laquelle je travaille, surtout une pour laquelle je travaille. Pourtant j’ai vu depuis quatre semaines, les rédacteurs du Guardian, les rédacteurs en chef qui ont dirigé le Guardian depuis des années, s’engager dans un journalisme intrépide et courageux en ignorant jour après jour le climat de terreur et les menaces d’un gouvernement US et en disant nous allons continuer à publier toute information que nous pensons devoir publier pour le bien commun. » Hallucinant !

 

Les réactions à ces révélations ne se sont pas fait attendre. On tenta tout de suite de faire passer Snowden pour un malade mental, un désaxé, un psychopathe. Ce n’est pas du tout l’avis de Greenwald qui dénonce cette campagne destinée à le discréditer. En outre, les médias américains voulaient tous avoir leur entretien avec Snowden, ce qu’il refusa systématiquement. « Il a refusé toutes ces propositions d’entretien parce que sa vraie motivation pour faire ce qu’il a fait est exactement ce qu’il a dit, c’est, non pas se rendre célèbre, mais de rendre compte aux gens des Etats-Unis et du monde de ce qui est en train de leur être fait en secret par le gouvernement US. La raison pour laquelle c’est toujours une habitude pour les gens comme Edward Snowden d’être diabolisées, la raison pour laquelle il est important de leur attribuer une maladie psychologique, comme ils l’ont fait avec Bradley Manning, comme ils essaient de faire avec tous les déclencheurs d’alerte, comme ils l’ont fait avec Daniel Ellsberg, c’est parce qu’ils savent précisément ce que j’ai dit, que le courage est contagieux. Et qu’il va être un exemple pour d’autres gens qui vont venir donner l’alerte sur le devant de la scène en ce qui concerne la tromperie, l’illégalité et la corruption des choses qu’ils font dans l’ombre. »

 

La fin de la vie privée

 

Greenwald a une conviction qu’il s’est forgée depuis quelques années et qui a été confortée par les révélations de Snowden. « . Je n’ai cessé d’écrire que le but de l’état de surveillance américain, la NSA et l’appareil de surveillance nationale tout entier sur laquelle elle est basée, est de s’assurer qu’il n’existe plus aucune vie privée humaine, non seulement aux Etats-Unis mais dans le monde. Et on n‘a cessé de me répéter que c’était une hyperbole absurde, que c’était une pensée complotiste, que la NSA est restreinte dans son activité par tous ces cadres admirables, et dans une certaine mesure, je me sens capable de dire : “Bien, vous savez, j’ai justement une énorme pile de documents secrets de la NSA ici même.”. Les problèmes concernant la surveillance et le système de surveillance qu’ils sont en train de construire sont complexes. Ils sont légalement complexes. Ils sont technologiquement complexes. »

 

 

 

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Le siège de la NSA dans le Maryland cache les enregistrements de toutes les communications électroniques dans le monde.

 

 

 

Des conséquences incalculables

 

Ainsi, le séisme déclenché par Snowden met à terre tout le système de propagande et les techniques d’ahurissement ne fonctionnent plus. Rappelons-nous. Tout qui émet le moindre doute sur les « vérités » assenées par la propagande occidentale est automatiquement un adepte de la théorie du complot. Le plus bel exemple est la mise en doute de la version officielle sur les attentats du 11 septembre 2001. On peut en plus compter sur les « compagnons de route » de l’Occident – dont le plus beau spécimen est l’ami BHL – pour discréditer tout qui ose s’opposer, ou simplement mettre en doute la politique étatsunienne. Enfin, les médias ne sont pas en reste. Qu’il s’agisse de la presse écrite ou des médias audiovisuels, c’est le même message qui est distillé en vue d’endormir ce qu’on ose encore appeler « l’opinion publique »

 

 

 

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BHL : l'exemple type du compagnon de route du totalitarisme

 

 

Certes, on peut dire qu’on découvre la Lune. On sait depuis longtemps que les Etats-Unis et leurs principaux alliés surveillent les communications par voie électronique. On a connu le fameux réseau « Echelon ». Mais, cela relevait en partie de la spéculation. On ne disposait d’aucune preuve concrète. Snowden a permis par son courage, de franchir un pas décisif : la preuve existe et la réalité est encore plus épouvantable. Comme l’écrit Greenwald : la vie privée n’existe plus. Elle a été rendue impossible par les tenants d’un « nouvel ordre mondial » chargé de contrôler chaque individu. Orwell avait vu juste. « 1984 » existe et est bien plus redoutable encore, car Winston et Julia ne pourront plus s’aimer sans être vus par des yeux inquisiteurs. Exagéré ? Pourquoi, alors, surveiller tout le monde ? Après tout, il est parfaitement envisageable que des chefs religieux tentent par le biais de l’espionnage électronique d’instaurer un totalitarisme des plus puritains. Dépassés les ayatollahs et autres imams salafistes ! A moins qu’ils ne parviennent à disposer de ces technologies…

 

De la parano ? Allons, lisez la fin du discours de Glenn Greenwald à Chicago : « Il y a deux jours, nous avons publié un document d’une petite partie de la NSA appelée Opérations des Sources Secrètes (Secret Source Opérations ou SSO), une des branches les plus secrètes de la NSA. Et il y avait un document interne de la SSO daté du 12 décembre 2012, donc fin de l’année dernière. Ce que contenait ce document, il célébrait une étape, de la manière dont on fête un anniversaire. Ce qu’il disait était ceci : félicitations à nous tous, unité de la SSO. Nous venons juste de collecter notre mille milliardième mail électronique, de métadata d’internet. C’est mille milliards soit un trillion avec un “t”. Ce que cela signifie, c’est que chaque jour ils enregistrent des centaines de millions de mails de par le monde pour voir qui nous envoie des mails, à qui nous en envoyons, quelle est notre adresse IP, à quel moment nous les envoyons, où nous ouvrons nos mails, quand nous les lisons, quelle est notre position géographique, et ensuite ils sont capables de reconstituer notre réseau, qui sont nos associations, quel est notre mode de vie, ce que l’on fait sur Internet, quels sont nos intérêts, ce qui nous anime, une grande variété d’informations qu’ils sucent et aspirent, non pas à propos d’individus qu’ils pensent être coupables de terrorisme, mais au sujet d’êtres humains sans discrimination aucune. Un autre document que je ne devrais sans doute pas partager, puisqu’il n’a pas été publié, mais je vais quand même le partager avec vous, et il va bientôt être publié et donc vous l’avez en avant-première. Cela concerne une toute nouvelle technologie qui permet à la NSA de rediriger dans ses dépôts un milliard de conversations téléphoniques cellulaires par jour, un milliard d’appels chaque jour. Ce à quoi nous avons vraiment affaire dans ce cas, c’est un système globalisé qui empêche toute forme de communication électronique d’avoir lieu sans qu’elle soit aussi archivée et surveillée par la NSA. Cela ne veut pas dire qu’ils écoutent chaque appel. Cela signifie qu’ils archivent chaque appel et ont la capacité de les écouter à tout moment, et cela veut dire qu’ils récoltent des millions et des millions et des millions de données concernant nos appels téléphoniques et nos mails. C’est un système globalisé visant à détruire toute vie privée, et ce qui constitue une menace incroyable, c’est que tout se passe dans l’ombre, avec aucune responsabilisation, et virtuellement aucun garde-fou. »

 

Assez naïvement, le journaliste américain conclut : « Le but de cette affaire et le but de l’alerte déclenchée par Edward Snowden n’est pas de détruire particulièrement ou unilatéralement ces systèmes. Le but c’est de dire que si vous, le gouvernement américain, et les gouvernements dans le monde, voulez créer un système de surveillance dans lequel nous n’avons plus de vie privée individuelle ou sur internet, vous devriez au moins nous en informer, en le faisant publiquement pour que nous puissions décider démocratiquement quelle genre de système et dans quelle sorte de monde nous voulons vivre. » (Le traduction du texte du discours de Glenn Greenwald a été publiée par le site du « Grand Soir » http://www.legrandsoir.info/ )

 

Non ! Ce système n’est qu’un des épouvantables outils que l’Etat profond mis en évidence par l’ancien diplomate canadien, le professeur Peter Dale Scott (http://uranopole.over-blog.com/article-les-realites-des-11-septembre-83939382.html) utilise pour imposer son pouvoir absolu avec l’appui de la bourgeoisie financière mondialisée dont l’intérêt est de contrôler et de manipuler  tout un chacun dans le plus grand intérêt du marché.

 

 

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Peter Dale Scott a dénoncé dans "Le nouveau désordre mondial" l'épouvante de "l'Etat profond" alliant les services secrets à la bourgeoisie financière mondialisée.

 

 

En tout cas, remercions et rendons hommage à Greenwald et à Snowden de nous avoir ouvert les yeux. Dès à présent, nul ne pourra dire : « Je ne savais pas », ou « Ce sont des foutaises ».

 

Pierre Verhas

 

Prochain article : Quel camouflet !

 

 

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commentaires

J
Quelle histoire! Digne des meilleurs scénarios de films d'espionnage. Mais le pire est qu'il ne s'agit pas d'un film, mais de la réalité. À titre de citoyen, il est notre devoir de non seulement<br /> applaudir Snowden, mais d'assurer que nous allons au fond des choses pour connaitre la vérité. Merci pour le bon billet.
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