Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Le blog de pierre verhas
  • : Blog consacré à l'actualité dans les domaines de la politique et de l'astronomie, vus au sens large. Ce blog n'est pas neutre : il se positionne à gauche, de philosophie laïque et donnant la primauté à l'expérience sur la spéculation. Ce blog est ouvert au débat, à l'exception des invectives, des attaques personnelles et des insultes qui seront systématiquement rejetées afin de permettre à chacun(e) de débattre en toute liberté et dans la sérénité qui n'exclut en rien la passion.
  • Contact

Recherche

20 juillet 2011 3 20 /07 /juillet /2011 10:40

Le professeur Jacques Brotchi, éminent neurochirurgien, sénateur et conseiller communal à Uccle lez Bruxelles, importante personnalité de la communauté juive de Belgique, a démissionné de ses fonctions à l’Université Libre de Bruxelles (ULB).

 

 

 jacques_brotchi.jpg

Le professeur Jacques Brotchi a tort de démissionner.

 

 

Il y dénonce les dérives antisémites qui se manifestent par trop souvent en cette Alma mater.  En effet, les dérapages au cercle des étudiants de l’école Solvay ([1]), sanctionnés depuis, l’invitation à un débat de l’humoriste Dieudonné, un baptême d’étudiants  dont le thème était un check point de Tsahal dans les territoires, sont autant de manifestations qui, dans l’esprit du professeur Brotchi, cachent mal un antisémitisme latent.

 

Que dire ?

 

Depuis plusieurs années, l’ULB s’est ouverte, à raison, aux étudiants issus de l’immigration musulmane. Il est dès lors évident que les conflits qui secouent le Moyen Orient suscitent débats en son sein. Il serait d’ailleurs contraire au principe du Libre Examen, pilier sacré de l’ULB, de mettre des entraves aux controverses surtout liées au conflit israélo-palestinien, qui se muent trop souvent en affrontements – parfois violents – entre Juifs et Musulmans.

 

Les Juifs sont très critiques à l’égard de ces débats. En partie à juste titre : en effet, tirant prétexte des interventions violentes et inqualifiables des forces armées israéliennes, certains intervenants en profitent pour y exprimer leur profond antisémitisme. C’est sans conteste le cas de l’humoriste Dieudonné, qui fut invité à un débat à l’ULB et qui s’affiche ouvertement avec le négationniste Faurisson et avec l’écrivain antisémite Paul Eric Blanrue ([2]), proche du président iranien Ahmadinejad. Feu Sam Braun (1927 – 2011), médecin, victime de la rafle du Vel d’Hiv, rescapé d’Auschwitz, fondateur du Cercle « Mémoire & Vigilance », décédé récemment, écrivait à l’attention de Dieudonné : « La haine du Juif que vous avez viscéralement accrochée au plus profond de vous-même, à défaut de l’être sur un cœur qui ne semble plus battre dans votre poitrine, cette haine que vous déversez sous le prétexte que vous respectez la liberté d’opinion, cette haine vous obscurcit la vue et la raison. » Ces propos ne sont pas excessifs !

 

 

 Sam-Braun2.jpg

Sam Braun a dénoncé inlassablement le négationnisme.

 

 

Cependant, il est inacceptable de prendre prétexte de l’antisémitisme de quelques-uns pour éluder le débat indispensable sur le conflit israélo-palestinien. Il n’est pas tolérable de traiter d’antisémite toute personne qui critique la politique israélienne en la matière, ou, même, qui épouse la cause palestinienne. Une Naomi Klein qui milite pour le boycott des produits en provenance des colonies israéliennes en Palestine, un Josy Dubié qui affiche ouvertement sa solidarité avec le peuple palestinien, une Véronique De Keyser, députée européenne socialiste qui a présidé la commission européenne de contrôle des élections à Gaza et qui s’y trouvait lors de l’opération « plomb endurci », ne sont pas antisémites !

 

 

 

 

naomi-klein1.jpg   josy_dubie01.jpg

  Naomi Klein et Josy Dubié ne sont pas antisémites !

 

 

Rappelons ici cette belle mise au point de la députée européenne, touchée au plus profond d’elle-même par la Shoah, puisqu’une partie de sa famille a disparu dans les camps de concentration nazis :

 

« Je dis et redis avec la plus grande fermeté que toux ceux – quels qu’ils soient – qui motivent leurs discours ou leurs actions par la haine des Juifs ou la haine des Arabes sont à renvoyer également dans l’ignominie. La violence, l’exclusion, l’arbitraire n’ont jamais été et sont encore moins que jamais l’apanage d’une culture, d’une civilisation, d’une nationalité, d’une religion. Ils appartiennent à la face sombre de l’humain et, malheureusement, c’est cette face sombre qui risque aujourd’hui de prendre le pas sur la raison et de la soumettre. Au bénéfice de quoi ? De qui ? Il est intolérable de faire des manifestations contre la violence à Gaza des tribunes pour la haine, pour le rejet de l’autre et pour le racisme. Récupérer ces événements et l’actualité qui les motive, instrumentaliser le refus de la guerre, de la mort des enfants, des innocents et à travers eux de la justice et du droit, au profit d’intérêts partisans est également intolérable. Le respect dû à la mémoire des victimes de toutes les barbaries, de tous les pogroms, de tous les génocides, de toutes les déportations, de toutes les exterminations au nom de la supériorité de l’un sur l’autre, ne peut souffrir de tels amalgames. L’histoire ne sert-elle donc à rien, sinon qu’à être niée et revisitée par ceux qui ne s’en sentiraient pas les maîtres ? Pas plus que nous ne pouvons accepter que des factions extrémistes manipulent des populations civiles, leur détresse et leur foi religieuse pour les prendre en otage de leurs ambitions, nous ne pouvons accepter que pour justifier la disproportion d’une guerre, certains abritent leur indignité derrière le bouclier de la Shoah. »

 

Traiter, sans raison, quelqu’un d’antisémite est une insulte. L’insulte est trop fréquente dans ce débat. Un des insultés est Stéphane Hessel, rescapé des camps de concentration, d’origine juive, qui fait l’objet d’une campagne aussi méchante qu’odieuse parce qu’il a écrit dans sa plaquette « Indignez-vous ! » : « Que des Juifs puissent perpétrer eux-mêmes des crimes de guerre, c’est insupportable. Hélas, l’histoire donne peu d’exemples de peuples qui tirent les leçons de leur propre histoire ». Où est l’antisémitisme dans ces propos ? N’est-ce pas plutôt la question posée par l’ancien rédacteur de la Déclaration Universelle des Droits de l’homme qui est gênante pour les tenants d’une répression aveugle ? Rappelons-nous aussi le sociologue Edgar Morin qui fut condamné – et plus tard réhabilité – pour de soi-disant propos antisémites, parce qu’il avait marqué sa solidarité avec la cause palestinienne. Et il y a tant d’autres cas. C'est l'expression du fanatisme.

 

 

 stephane-hessel_veronique_de_keyser.jpg

Stéphane Hessel avec Véronique De Keyser : plus qu'une communauté de pensée, une solidarité.

 

 

Dans le même ordre d'idées, tenir des propos antisémites sous le couvert d’une fausse solidarité avec le peuple palestinien est insupportable. Ces gens salissent ce qu’ils prétendent défendre. C'est du fanatisme. 

 

Le fanatisme d'où qu'il vienne, doit être combattu avec la plus grande vigueur.

 

Revenons à un débat libre, sans a priori, de part et d’autre. La haine ne mène qu’à l’échec.

 

Mais pour débattre, il faut être présent. En claquant la porte, comme l’a fait le Docteur Brotchi, on laisse le terrain à l’adversaire.

 

En cela, vous avez commis une erreur, M. Brotchi.

 

Pierre Verhas



[1]Dérapages dénoncés dans ce blog le 25 mai 2011 : http://uranopole.over-blog.com/article-la-banalisation-74703464.html

[2] Auteur, entre autres, de l’ouvrage « Sarkozy, Israël et les Juifs » (éd. Oser dire, Embourg, Belgique, 2009) qui est une compilation de « copiés-collés » de textes sur les relations étroites qu’entretient Sarkozy avec les milieux sionistes. L’auteur a peine à camoufler son antisémitisme qui apparaît sur son site « Le Clan des Vénitiens ».

Partager cet article
Repost0

commentaires