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  • : Le blog de pierre verhas
  • : Blog consacré à l'actualité dans les domaines de la politique et de l'astronomie, vus au sens large. Ce blog n'est pas neutre : il se positionne à gauche, de philosophie laïque et donnant la primauté à l'expérience sur la spéculation. Ce blog est ouvert au débat, à l'exception des invectives, des attaques personnelles et des insultes qui seront systématiquement rejetées afin de permettre à chacun(e) de débattre en toute liberté et dans la sérénité qui n'exclut en rien la passion.
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24 juin 2014 2 24 /06 /juin /2014 09:51

Il y a dans la vie de chacun de rares personnes qui vous laissent une marque indélébile et qui vous accompagnent tout au long du sinueux parcours de l’existence. C’est le cas, en ce qui me concerne, d’André Koeckelenbergh qui nous a quittés le 23 juin 2014 à l’âge de quatre-vingt cinq ans.

 

André Koeckelenbergh était docteur en Physique de l’Université Libre de Bruxelles, chargé de cours d’astronomie à cette même Alma mater et astronome à l’Observatoire royal de Belgique.

 

Toute sa vie, il s’est préoccupé d’ouvrir les portes d’Uranie aux jeunes générations à l’Université bien sûr, où il a formé plusieurs astronomes de grande qualité dont certains sont mondialement connus comme Frédéric Clette et Alain Jorissen. En plus, Koeckelenbergh a tenu à bout de bras les cours publics d’astronomie qui étaient organisés par la Ville de Bruxelles.

 

André Koeckelenbergh aimait transmettre ses connaissances au plus grand nombre.

André Koeckelenbergh aimait transmettre ses connaissances au plus grand nombre.

 

Ces cours qui avaient été mis sur les fonts baptismaux par Adolphe Quetelet en… 1826 sont ouverts à tout un chacun. Ils se sont perpétués jusqu’aujourd’hui en dépit des aléas de l’histoire. C’est au cours public d'astronomie que j’ai connu André Koeckelenbergh qui avait un extraordinaire sens pédagogique en parvenant à passionner de jeunes ignares et à les amener à approfondir leurs connaissances en cette matière vaste, complexe et surtout à en apprécier la beauté.

 

S’il savait transmettre la connaissance, il nous poussait à la pratique. Il a soutenu toute sa vie ceux qu’on appelle avec une certaine condescendance les « astronomes amateurs » dont certains sont devenus des observateurs de grande qualité et dont quelques-uns ont franchi le pas vers une brillante carrière scientifique.

 

Astronome, Koeckelenbergh fut engagé à l’Observatoire juste après la guerre. Il fut formé au Département de Radioastronomie et de Physique solaire par Raymond Coutrez. Très vite, son métier devint passion. Il s’occupa tout particulièrement de la table équatoriale automatique d’observation du Soleil conçue et construite par Raymond Coutrez, également professeur à l’ULB, qui était, à l’époque, un des instruments les plus performants en la matière. Cet appareil est toujours opérationnel aujourd’hui. Il suit l’activité solaire en permanence – si la météo le permet – et l’équipe qui y travaille est très active dans les grandes missions spatiales d’observation du Soleil, comme SOHO.

 

André Koeckelenbergh, jeune astronome, écoute avec grand intérêt les conseils de Raymond Coutrez

André Koeckelenbergh, jeune astronome, écoute avec grand intérêt les conseils de Raymond Coutrez

 

Outre la table équatoriale, André Koeckelenbergh parvint à faire transférer de Suisse en Belgique, le SIDC (Sunspot Index Data Center) qui centralise les observations de l’activité solaire émanant d’un réseau d’observateurs répartis dans le monde entier. Le SIDC est à l’origine de la météorologie spatiale qui est destinée à mesurer les conséquences sur la Terre des éruptions solaires et des cycles de l’activité solaire.

André Koeckelenbergh devant la mythique table équatoriale solaire à l'Observatoire royal de Belgique

André Koeckelenbergh devant la mythique table équatoriale solaire à l'Observatoire royal de Belgique

 

André Koeckelenbergh participa à plusieurs expéditions d’observations d’éclipses totales de Soleil dont la première, en 1973, au Kenya. La dernière à laquelle il a pris part, fut pour l’observation de l’éclipse du 22 juin 2001 en Zambie. Je me rappelle que nous étions surpris par son extraordinaire condition physique. Il passa la nuit précédente à montrer l’extraordinaire ciel austral et était en pleine forme le lendemain pour l’observation de l’éclipse. Il avait septante-deux ans.

 

Après sa retraite survenue en 1994, Koeckelenbergh poursuivit encore quelques années les cours publics d’astronomie à l’ULB et à l’Institut des Hautes études (1) et puis orienta ses activités vers l’extension de l’ULB à Parentville (commune de Couillet à côté de Charleroi) où il organisa jusqu’à la fin de nombreuses conférences et activités en astronomie. Il s'occupa aussi du Centre de Culture scientifique de Charleroi, ainsi que de l'ASBL Jeunesse & Sciences qu'il a toujours appuyée.

 

Ernest Glinne et André Koeckelenbergh avaient les mêmes convictions politiques et les appliquaient avec fermeté.

Ernest Glinne et André Koeckelenbergh avaient les mêmes convictions politiques et les appliquaient avec fermeté.

 

André Koeckelenbergh était un homme de conviction. Dès son plus jeune âge, il milita aux Jeunes Gardes Socialistes, puis aux Etudiants socialistes de l’ULB et au sein du Parti socialiste de Belgique. Il était un grand ami du député socialiste de gauche, Ernest Glinne (voir Uranopole : http://uranopole.over-blog.com/article-34896233.html ) qui se présenta en 1981 à la présidence du Parti et qui, bien qu’ayant plus de voix que son concurrent, fut évincé dans des circonstances qui n’ont d’ailleurs jamais été éclaircies. Glinne était trop à gauche pour certains…

 

Déçu et même révolté par l’évolution du PS vers le néolibéralisme et profondément choqué par les procès de corruption qui éclaboussèrent le Parti, Koeckelenbergh le quitta avec Ernest Glinne pour rejoindre le parti Ecolo. Cependant, il garda ancrées jusqu’à la fin de sa vie ses profondes convictions socialistes.

 

Ernest Glinne et André Koeckelenbergh, parce qu’ils étaient internationalistes, étaient aussi des Fédéralistes européens dans la mouvance d’Altiero Spinelli, tout en se méfiant de l’évolution néolibérale des institutions européennes.

 

Enfin, André Koeckelenbergh était franc-maçon. Il attachait une importance primordiale aux valeurs prônées par l’Ordre maçonnique. Imprégné du libre examen, athée, chaud partisan de la laïcité, il était aussi tolérant et se plaisait à dialoguer et à débattre avec des personnes d’autres convictions politiques, philosophiques et religieuses.

 

Si André Koeckelenbergh était homme d’action et de réflexion, s’il transmettait par vocation le savoir avec talent, il savait aussi écouter l’Autre.

 

Pierre Verhas

 

(1) L'Institut des hautes études, aujourd'hui attenant à l'Université de Bruxelles est une émanation de « l'Université nouvelle» issue du schisme de l'ULB intervenu en 1894 suite au refus du Conseil d'administration de cette Université de donner une chaire au géographe Elisée Reclus auteur du monumental ouvrage « La géographie universelle» parce qu'il était anarchiste.

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