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  • : Le blog de pierre verhas
  • : Blog consacré à l'actualité dans les domaines de la politique et de l'astronomie, vus au sens large. Ce blog n'est pas neutre : il se positionne à gauche, de philosophie laïque et donnant la primauté à l'expérience sur la spéculation. Ce blog est ouvert au débat, à l'exception des invectives, des attaques personnelles et des insultes qui seront systématiquement rejetées afin de permettre à chacun(e) de débattre en toute liberté et dans la sérénité qui n'exclut en rien la passion.
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2 mai 2011 1 02 /05 /mai /2011 20:43

Ô mort où est ta victoire ? demandait l’apôtre Paul dans l’Epître aux Corinthiens. Cette antique question peut se poser après l’annonce de la mort du leader d’Al Qaïda. Quelles seront les conséquences de son décès ?

 

Ben Laden était devenu une sorte de symbole pour les combattants « djihadistes » qui luttent avec l’arme du terrorisme contre les armées et les intérêts occidentaux au Moyen-Orient, comme aux Etats-Unis, comme en Europe. Il n’a pas été le leader d’une armée bien structurée qu’on appellerait Al Qaïda, en français « la base ». Pour le professeur Nafeez Mossadeq Ahmed, directeur de l’Institute for Policy Research & Development de Brighton, auteur d’un ouvrage passionnant sur le 11 septembre : « La guerre contre la vérité » (Ed. Demi Lune, collection Résistances, Paris, 2006), Al Qaïda vient de l’expression « Data base » (base de données) utilisée en informatique. Il s’agissait au départ de la liste des noms des moudjahidin qui combattaient en Afghanistan contre les Soviétiques, dont certains étaient sous les ordres de Ben Laden, fort proche, à l’époque, de la CIA. On a utilisé, voire abusé, de ce nom d’Al Qaïda pour nommer les coupables de tous les actes terroristes à consonance islamiste.

 

 

 ben_laden.jpg

 

Ben Laden ne se cachait pas dans des grottes aménagées

dans les montagnes pakistanaises.

  

Il ne s’agit donc pas – tous les spécialistes du Moyen Orient le rappellent régulièrement – d’une organisation structurée, hiérarchisée comme une armée, mais d’une kyrielle de groupes, voire de groupuscules, autonomes, qui justifient leurs actes par la volonté de sauver l’Islam des « croisés » de l’Occident. N’oublions pas que la grande majorité des victimes du terrorisme islamiste sont des musulmans. Ainsi, sur les 114 attentats recensés d’Al Qaïda, 100 ont frappé un pays musulman et 14 les pays occidentaux.

 

Ben Laden qui fut un chef de guerre en Afghanistan s’est mué en chef terroriste lors de la guerre du Golfe. Il est incontestablement responsable des attentats contre les ambassades US au Kenya et en Tanzanie, ainsi que du premier attentat (raté) contre les tours du WTC en 1993. Cependant, comme il était membre d’une importante famille saoudienne, proche de la famille royale, il resta un « protégé » des services secrets américains, malgré qu’il fût dès le début de la décennie 1990, recherché par le FBI pour terrorisme. Les diplomates et les agents secrets ne souhaitaient pas « indisposer » le roi et son entourage en capturant Oussama Ben Laden. Il est donc évident que le « leader » d’Al Qaïda entretenait des liens politiques et financiers importants avec les intérêts saoudiens au plus haut niveau. De nombreux témoignages montrent que, jusqu’au 11 septembre, il y aurait eu aisément moyen de l’appréhender. Aussi, on peut raisonnablement se demander si le Saoudien ne bénéficiait pas de protections en très haut lieu. En outre, et c’est le plus grave, ces « protections » motivées par les intérêts des puissants lobbies pétroliers qui étaient proches du pouvoir aux Etats-Unis, notamment par l’intermédiaire de Dick Cheney et de Donald Rumsfeld, ont permis à Ben Laden de développer en toute impunité une organisation d’une efficacité redoutable dont la structure en cellules autonomes la rendait très difficile à neutraliser.

 

 donald-rumsfeld_dick-cheney.jpg

Donald Rumsfeld et Dick Cheney ont aidé Ben Laden.

 

Cela expliquerait les énormes lacunes des services de renseignement, des autorités civiles et militaires américaines, lors des attaques du 11 septembre 2001.

 

En plus, on ne sait même pas si Oussama Ben Laden est directement responsable de ces attaques. Il y a d’ailleurs un fait curieux : si le FBI a lancé un avis international de recherches de Ben Laden pour terrorisme, cet avis n’a pas été mis à jour après le 11 septembre. Voici, en anglais, le texte de l’avis de recherche du FBI : «Usama Bin Laden is wanted in connection with the August 7, 1998, bombings of the United States Embassies in Dar es Salaam, Tanzania, and Nairobi, Kenya. These attacks killed over 200 people. In addition, Bin Laden is a suspect in other terrorist attacks throughout the world. »  Des journalistes ont interrogé des responsables du FBI sur ce curieux « oubli ». Il leur a été répondu qu’ils ne disposaient d’aucune preuve de la participation directe ou indirecte de Ben Laden aux attentats de New York et de Washington.

 

Et puis, tout est faux avec Ben Laden. Ainsi, juste après le 11 septembre, les télévisions occidentales ont diffusé une vidéo montrant Ben Laden se réjouir avec son « état-major » de la réussite des attaques. Plusieurs mois après, il a été avéré que cette vidéo était un montage. On a diffusé des photographies de Ben Laden où il portait une barbe grisonnante avec un visage ridé et quelques semaines plus tard, un visage à peau lisse à la barbe noire. Et le jour « officiel » de sa mort, l’AFP parvient à prouver aisément que la photographie de son cadavre est un faux aussi ! Ses funérailles en pleine mer, soi-disant respectueuses du prescrit musulman, soulèvent aussi pas mal de questions. Enfin, le commando qui l’a éliminé, aurait eu pour mission de le capturer. De qui se moque-t-on ?

 

En réalité, il est probable que Ben Laden ait joué un rôle secondaire dans le terrorisme islamique. Cependant, il a servi de symbole aussi bien aux djihadistes qu’aux Occidentaux. En dix ans, avec tous les moyens mis en œuvre, on n’a pas réussi à mettre la main dessus. C’est fort peu crédible. Après tout, cet épouvantail servait, pour les opinions publiques, de prétexte aux coûteuses et meurtrières occupations militaires de l’Irak et de l’Afghanistan. Aujourd’hui, c’est différent et on peut supposer qu’Obama va pouvoir diminuer substantiellement l’effort de guerre américain au Moyen-Orient. De toute façon, on finit par se demander s’il est utile de poursuivre ces aventures militaires qui mènent à l’impasse.

 

Les élites occidentales dominées par les conservateurs se leurrent depuis le début dans toute cette affaire et sont incapables, à cause de leur arrogance, de se remettre en question, ou tout simplement, de faire leur autocritique.

 

La doctrine du « choc des civilisations » continue à dominer au sein des dirigeants occidentaux conservateurs. Ils voient toujours un Occident dominant contre un monde musulman rétrograde et menaçant.

 

Le politologue Guy Hermet écrit dans l’hiver de la démocratie ou le nouveau régime  (Armand Colin, Paris, 2006) : « Suite à la défaite des « totalitarismes » nazi puis communiste en 1945 et 1989, la démocratie est perçue maintenant comme relevant de l’évidence, sans qu’il soit nécessaire d’argumenter et sans contestation admisse, sans qu’on puisse surtout lui imaginer la formule de gouvernement rivale ou alternative (…). La démocratie va aujourd’hui de soi. Elle est l’unique gouvernement imaginable dont ne se trouvent privées que des sociétés aberrantes comme la plupart des sociétés musulmanes. » C’est ainsi que l’élite occidentale voyait les choses jusqu’à décembre 2010. Les révolutions tunisienne et égyptienne, toujours en cours, ainsi que les contestations réprimées par le sang en Syrie, au Yémen et à Bahreïn, avec les mouvements en Algérie, au Maroc, en Jordanie, sont un cinglant démenti ([1]). Un processus est en cours. Il est entravé par le manque de structures politiques, mais il est clair que l’on s’oriente vers un système démocratique qui sera sans doute différent et qui sera l’œuvre du peuple qui est toujours mobilisé en Tunisie et eu Caire.

 

 

 obama_ben_laden.jpg

Barack Obama pense un peu vite qu'il a obtenu

une victoire décisive.

 

Obama pense sans doute qu’il vient d’obtenir une victoire décisive. À entendre les déclarations des dirigeants européens – à l’exception de Cameron, « la voix de son maître » qui reprend mot à mot une partie du discours du président US – montrent une grande prudence. Ils ont raison. Ce n’est pas le moment de se réjouir.

 

liesse_US.jpg

 

Liesse aux USA : quelque-chose d'indécent

 

A propos, il y a quelque-chose d’indécent dans ces réjouissances de la foule américaine à l’annonce de l’élimination d’Oussama Ben Laden. Cela ressemble à la populace qui se rassemblait au Moyen-âge pour jouir du spectacle du supplice de condamnés. Une sale mentalité dont les médias sont responsables, se répand dans l’opinion du monde occidental, mentalité qui amène au pouvoir le « populisme », c’est-à-dire l’extrême-droite et l’autoritarisme. Interrogé par un journaliste, un des participants à ces liesses à New York déclara qu’avec la mort de Ben Laden, les familles des victimes du 11 septembre pouvaient enfin porter leur deuil. Il se trompe et on s’en apercevra assez vite car les mensonges finissent toujours par s’effondrer.

 

Pierre Verhas



[1] La Libye n’est pas citée ici car il s’agit d’une guerre civile entre des tribus et des clans pour le partage de la manne pétrolière et on peut se poser des questions sur le caractère « démocratique » du fameux Conseil national de transition dont le dirigeant est l’ancien ministre de la Justice de Kadhafi, responsable du calvaire des infirmières bulgares.

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1 mai 2011 7 01 /05 /mai /2011 16:06
Ci-dessous une intéressante analyse de Merry Hermanus sur les révolutions arabes. Merry est une personnalité controversée, mais qui possède deux qualités appréciables : le courage – il s’est toujours battu pour le Socialisme, en dépit des embûches qui jalonnent son parcours – et la lucidité. Dans bien des domaines de la politique, il a très souvent vu juste et porté une analyse rigoureuse des faits et il sait choisir le chemin qu'il juge le meilleur. En cela, il ne s’est jamais renié.

 

J’ai ce défaut de l’apprécier et d’avoir de l’amitié pour lui.

 

Pierre Verhas

 

Merry Hermanus : une analyse politique lucide

La façon dont, en Occident, on a perçu et imaginé le monde arabe a subi pas mal d’évolution.

 

Aux 18ème et 19ème siècles, tout était figé par la masse constituée par l’Empire turc.

 

Le monde arabe était une menace du fait des pirates qui infestaient la Méditerranée.  C’est d’ailleurs ce qui servira de prétexte, en plus du coup de chasse-mouches du Sultan d’Alger à l’Ambassadeur de France, pour justifier l’invasion de l’Algérie en 1830.

 

 

Viendra ensuite la vague dite orientaliste en Arts et en Littérature.

 

On aura le voyage de Maxime du Camp, et de Flaubert.

 

On aura les toiles orientalistes de Delacroix.

 

Tout s’écroule à la fin de la guerre 14-18. L’Empire ottoman n’existe plus, et les Puissances victorieuses se partagent le Moyen-Orient.

 

La France, déjà Puissance tutélaire du Maroc et de la Tunisie, Puissance coloniale en Algérie, reçoit, en outre, un mandat sur le Liban et la Syrie.

 

Quant à la Grande-Bretagne, elle prend possession de la Jordanie et de l’Irak, et elle contrôle l’Arabie saoudite et le Yémen. En un mot : toutes les voies d’accès vers les Indes.

 

Dans le grand mouvement vers l’indépendance qui commence après la deuxième Guerre mondiale, l’image qu’on a en Europe occidentale est celle d’un chaos et de dictatures.

 

Le monde arabe, c’est le massacre de la famille régnante en Irak, le massacre télévisé, quelques années plus tard, du dictateur Kassem, le coup d’état en Algérie, un régime marocain autoritaire, de multiples révolutions au Liban, et la mise en place d’une série de régimes baasistes qui ne sont que des dictatures couvertes d’un léger vernis de socialisme.

 

Ceci étant dit, ces régimes et  ces dictatures conviennent parfaitement au monde occidental, pour autant que l’approvisionnement en pétrole soit assuré, et l’ennemi communiste, contenu.

 

Les mouvements islamistes qui trouvent leur naissance à l’Université Al Azar au Caire, avec la création des « Frères Musulmans » dans les années 20, sont à la limite considérés comme folkloriques, et on laisse les dictatures du Moyen-Orient les réprimer sans intervenir.

 

Mais tout bascule avec la chute du Communisme et, dix ans plus tard, avec le 11 Septembre !

 

 L’image du monde arabe et l’image des Musulmans devient celle du terroriste,et celle du kamikaze,  la bombe cachée sous la djellaba.

 

Dix ans plus tard, en janvier 2011, tout change, sans qu’aucun observateur, sans qu’aucun diplomate et sans qu’aucun service secret n’ait pu prévoir l’extraordinaire réveil des peuples auquel on assiste dans le monde arabe et au Moyen Orient en général.

 

 C’est un remake du « Printemps des Peuples » de 1848.

 

On se rappellera qu’après la première Révolution de février 1848 à Paris, c’est l’Europe toute entière qui bouge.

 

En Allemagne, la bourgeoisie prend, de façon éphémère, le pouvoir.

 

En Autriche, l’empire dominant toute la Mittle Europa est à ce point ébranlée que le Ministre Metternich doit s’enfuir, caché dans une manne à linge !

 

Même en Belgique, on assistera à un mini épisode révolutionnaire à « Risquons Tout ».

 

Comme les Européens, en 1848, les peuples du Moyen-Orient en ont assez de souffrir !

 

 Ils en ont assez du manque de liberté !

 

On constate que, dans ces révoltes, qui, au jour le jour, déboulent dans nos foyers à travers les images de la télévision, il n’y a pas de leader. C’est le peuple tout entier qui est en mouvement.

 

C’est donc toute notre façon d’appréhender le Moyen-Orient et le monde arabe qui va changer.

 

Ne nous y trompons pas : on assiste à une mutation géo politique aussi importante que fût la chute du Communisme, mais à laquelle va s’ajouter une révolution de l’image et de la perception qu’ont les Occidentaux du monde arabe et du monde musulman en général.

 

Celui-ci n’apparaîtra plus comme un risque terroriste, mais sera, demain, un partenaire dans un monde de plus en plus acquis aux idées de démocratie et de respect de l’Homme.

 

Ceci démontre une fois de plus que l’analyse du passé peut parfois conduire à l’espérance du futur.

 

Merry Hermanus

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26 avril 2011 2 26 /04 /avril /2011 17:22

La disparition de Marie-France Pisier, une des plus belles actrices de ma génération, femme forte, au talent exceptionnel, de grande classe, m’amène une réflexion. Elle avait cette rare sagesse d’écraser la vulgarité en toute sérénité.

 

 

 

Marie-France-Pisier.jpg

                                  Marie-France Pisier : le symbole de la

                                                  résistance de notre temps

 

 

 

La vulgarité est la plaie de notre temps. Elle envahit tout : l’art, la littérature, la politique.

 

Chacun se souvient du fameux « détail » sur les chambres à gaz des camps d’extermination prononcé par un rustre. Ce fut sans doute l’expression la plus vulgaire formulée depuis longtemps. Je connais un couple d’enfants cachés. J’ai pensé à eux, en ce moment. Quelle blessure profonde cette parole a réveillée en eux et en bien d’autres ! Ces enfants cachés ont une certitude : leurs parents sont morts. Le reste n’est que suppositions : où ont-ils disparu ? Comment sont-ils décédés ? De mort violente ? De maladie ? De faim ? Ont-ils souffert ? Qui les a tués ? Où se trouvent leurs dépouilles ? Et combien d’autres questions dont les réponses sont éparpillées dans un brouillard qui ne se dissipera jamais.

 

Alors, pourquoi blesser ? Sans doute par haine, sûrement par mépris. Aujourd’hui lui succède cette femme sans tenue, mal soignée, au regard furtif et pourtant populaire, ambitionnant la plus haute charge. Son géniteur lui a transmis sa vulgarité. Elle emballe mal ses propos du langage mal maîtrisé de la modération. Plus subtile, elle sait tirer avantage de ses provocations dictées aussi par la haine et le mépris.

 

Il y a ce président à l’insulte facile et aux nerfs fragiles, incapable de cohérence et de ténacité. Il y a ce premier ministre pratiquant l’orgie, pillant l’Etat et, pire, répandant par les médias qu’il a volés, une non-culture destinée à salir le beau. Ne sont-ce les pires outrages que faire de la femme un simple objet de plaisirs éphémères, que voler la culture à tous, que faire de la cupidité la valeur suprême ?   

 

La vulgarité rassemble ces gens-là. Mais leurs trônes vacillent.

 

Le peuple dont ils prétendent être proches, déteste la vulgarité. Il aspire à son élévation matérielle car il n’y a pas de liberté sans le bien-être que ces gens veulent leur ôter. Il aspire à la culture, car il n’y a pas de liberté sans savoir, et cette classe d’ignorants prétend détenir le savoir pour son seul usage. Il aspire enfin à la dignité qu’ils veulent leur voler.

 

Marie-France Pisier, femme engagée, combattait la vulgarité avec l’arme qu’elle méritait : la dignité. Elle est désormais le symbole de la résistance de notre temps.

 

Pierre Verhas

 

 

 

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24 avril 2011 7 24 /04 /avril /2011 09:11

Saturne est connectée électriquement à Encelade, un de ses satellites, pourtant distant de 240 milliers de kilomètres. Le flux d’électrons passant en permanence par ce lien s’écrase sur Saturne et y créé une aurore boréale mobile, de la taille de la Californie.

 

saturne_encelade.jpg

 

Sur Saturne, Encelade lance son propre flot d’électrons. Nasa


Les aurores polaires se créent lorsque des particules chargées sont capturées par le champ magnétique d’une planète et guidées jusqu’à ses pôles. En percutant la partie supérieure de l’atmosphère, la ionosphère, les charges lui font émettre de la lumière et créent ainsi de superbes rideaux de lumière. Sur notre Terre c’est le vent solaire qui apporte ces particules chargées.

Sur Saturne, Encelade lance son propre flot d’électrons.  Ceux-ci suivent donc les lignes de champ magnétique de Saturne, ce qui les mène jusqu’au pôle nord de la planète. Le faisceau d’électron est cohérent et créer une aurore boréale permanente, en lumière ultraviolette, large de 1200km et haute de 400, qui tourne autour de la planète en même temps qu’Encelade.


vidéo sur  hiss20110414-640

  

Il a fallu deux ans à une large équipe internationale pour analyser les données de Cassini, trouver l’aurore mobile et publier le tout dans la revue scientifique Geophysical Review Letters, ce mois-ci.

Il leur a fallu distinguer la tache de l’aurore boréale normale de Saturne, un peu plus au nord. Ils étaient toutefois aidés par leur expérience précédente avec des aurores mobiles analogues sur Jupiter, résultant des interactions de celle-ci avec ses satellites Io, Europe et Ganymède.
   
L’apport de ces nouvelles données est considérable. Un débat de longue date concernait la variabilité (ou la stabilité) de l’activité de cette petite lune : des fluctuations de l’aurore semblent indiquer que oui, cette activité varie. L’analyse de ce lien promet également d’être riche en renseignement sur le champ magnétique de Saturne, qui présente des anomalies encore inexpliquées...

 

  

Cordialement

Jean
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Cercle Astronomique de Bruxelles (CAB) http://www.astro-cab.be/
Occultations of stars by the Moon (Apex)
http://www.astrosurf.com/apex-occult/
Popular Astronomy http://home.base.be/apexoccult/
Jean Schwaenen apexoccult@base..be
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26 mars 2011 6 26 /03 /mars /2011 14:30

Reprenons depuis le début. Kadhafi, l’Ubu libyen assassin et terroriste redevenu « fréquentable » par la magie du baril de pétrole, craint par-dessus tout, les révoltes arabes qui ont commencé en Tunisie et se sont poursuivies en Egypte. Il a raison.  Une partie du peuple libyen commence à le contester. La répression sanglante ne suffit pas. Les rebelles tentent de constituer une armée qui lance sa première offensive depuis Benghazi. Après avoir subi l’assaut des rebelles libyens qui avançaient le long de la côte méditerranéenne de la Cyrénaïque – la partie Nord – Est de la Libye – jusqu’à la Tripolitaine, en plus de ses paroles aussi menaçantes qu’incohérentes, Kadhafi  jette toutes ses forces dans la bataille, particulièrement ses chasseurs – bombardiers Sukoï et ses chars qui lui permettent de reprendre du terrain à une rébellion mal armée, mal organisée, mal entraînée. En quelques jours, cette avancée des troupes « fidèles » au régime et de mercenaires provenant d’Afrique sub-saharienne qui sèment la terreur dans la population est fulgurante, Benghazi est menacée.

 

kadhafi.jpg

 

Kadhafi : le père Ubu de Tripolitaine

 

Jusqu’alors, les « Occidentaux » s’étaient contentés d’observer avec inquiétude ce qu’il se passait. La certitude que Kadhafi allait l’emporter les fit réagir, mais pas comme on l’a cru. Si, formellement, c’est la France qui a proposé la fameuse résolution 1973 du Conseil de Sécurité, c’est en réalité les Etats-Unis qui mènent la danse. Ce sont trois femmes –  Hillary Clinton, la Secrétaire d’Etat, Susan Rice, l’ambassadrice des USA à l’ONU et Samantha Power, dirigeante à la Sécurité intérieure – qui ont convaincu le président Obama d’intervenir en Libye, ce dernier craignant une escalade qui pourrait mener à un second Irak.

 

 Susan_Rice.jpg

 

Susan Rice, déléguée des Etats-Unis à l'ONU : le rôle majeur des

femmes dans la prise de décision au sujet de l'intervention en Libye

 

On a laissé à la France l’illusion d’avoir pris l’initiative de « la »1973, mais les USA commandent toutes les forces coalisées. Sarkozy joue pour la galerie et… son éventuelle réélection. Aussi, le cirque de BHL qui a amené, à grand tapage, à Paris, la délégation du Conseil d'opposition qui est censé être l’organe politique de la rébellion, est à usage uniquement franco – français, le « philosophe » médiatique n’ayant joué aucun rôle réel en cette affaire. En l’espèce, le président français a commis une grave erreur diplomatique : il a reconnu le Conseil d'opposition comme étant le seul interlocuteur valable. En cela, il a violé le principe évident : on reconnaît des Etats et non des gouvernements. Cela aura certainement de sérieuses conséquences plus tard. En attendant, en cas d’échec ou d’enlisement, ce ne sont pas les Américains qui porteront le chapeau, mais la France de Sarkozy.

 

BHL_Libye.jpg

 

BHL pose en Libye... auprès d'un camion renversé. Tout un symbole !

 

Au niveau des opérations qui ont débuté juste après une réunion de coordination qui a eu lieu dimanche 20 mars à Paris, l’on constate que les Français y ont été un peu fort et pas toujours de manière efficace. Les Américains ont décidé de calmer le jeu après qu’ils aient perdu un appareil au-dessus du territoire libyen. De toute façon, l’objectif est atteint. La zone d’exclusion aérienne fonctionne et Benghazi est sauvée, les loyalistes ayant reculé de quelque 160 km.

 

Libye_intervention04.jpg

 

La résolution 1973 demande une zone d'exclusion aérienne,

pas de favoriser un  camp.

 

 

Cependant, nul ne peut prévoir l’avenir. Les Occidentaux sont divisés (comme d’habitude…). L’Allemagne refuse de s’inscrire dans ce conflit et les raisons qu’elle invoque sont respectables. Une polémique est née sur le rôle de l’OTAN. Les Français et les Britanniques, ou l’alliance de deux conservateurs : Sarkozy et Cameron, ne sont guère enthousiastes de voir l’organisation politico – militaire jouer un rôle. Un accord est finalement intervenu : l’OTAN se chargera de faire appliquer l’embargo sur les armes à destination de la Libye en assurant un commandement maritime. N’oublions pas qu’en plus de l’abstention de l’Allemagne, un membre important de l’OTAN est hostile à toute intervention militaire, la Turquie. Et puis, nouveau revirement, c’est l’OTAN qui va coordonner les opérations. Tout cela est d’une cohérence exemplaire !

 

1973 n’est pas respecté : ce sera l’enlisement.

 

Si les premiers jours ont montré des succès sur le terrain, la question fondamentale est : quels sont les buts de guerre ? Si on s’en tient à la résolution 1973, c’est empêcher le massacre du peuple libyen par l’armée de Kadhafi. Certains en ont une lecture extensive, comme le va-t-en guerre belgo-flamand Pieter De Crem et l’ineffable Armand De Decker, leader libéral bruxellois, à savoir éliminer Kadhafi et envisager une intervention militaire au sol. Or, toute occupation de la Libye est formellement interdite par la résolution :

 

« Protection civile

4. Autorise les États Membres qui ont adressé au Secrétaire général une notification à cet effet et agissent à titre national ou dans le cadre d'organismes ou d'arrangements régionaux et en coopération avec le Secrétaire général, à prendre toutes mesures nécessaires, nonobstant le paragraphe 9 de la résolution 1970 (2011), pour protéger les populations et les zones civiles menacées d'attaque en Jamahiriya arabe libyenne, y compris Benghazi, tout en excluant le déploiement d'une force d'occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n'importe quelle partie du territoire libyen, et prie les États Membres concernés d'informer immédiatement le Secrétaire général des mesures qu'ils auront prises en vertu des pouvoirs qu'ils tirent du présent paragraphe et qui seront immédiatement portées à l'attention du Conseil de sécurité; »

 

Libye_intervention05.jpg

 

Un char de Kadhafi bombardé par les Français près de Benghazi.

Est-ce vraiment le rôle dévolu à la France par l'ONU ?

  

En cette affaire, il est clair que les néoconservateurs tentent de relever la tête. Il faut à tout prix les empêcher de nuire. Ils sont aussi dangereux que Kadhafi !

 

L’Europe affaiblie

 

Tout indique que l’on s’oriente vers un enlisement dans ce conflit qui n’est même pas tout à fait déclenché. L’Union européenne s’est dotée, avec le Traité de Lisbonne, d’instances qui doivent mener à une politique étrangère cohérente. Une certaine Catherine Ashton, comme à son habitude, est aux abonnés absents. « La décision de lancer l'opération, poussée par la France et la Grande-Bretagne et votée au Conseil de sécurité malgré l'abstention de l'Allemagne, constitue peut-être une victoire diplomatique pour Paris et Londres, mais en même temps "un échec absolu pour la politique étrangère européenne", juge l'eurodéputé conservateur britannique Charles Tannock. » (Libre Belgique 23 mars 2011).

 

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Daniel Cohn Bendit et Guy Verhofstadt : il ne fallait pas voter

"Lisbonne". L'Europe n'en serait pas là !

 

De son côté, le groupe Spinelli dont les deux leaders sont l’ancien Premier ministre libéral flamand Guy Verhofstadt et Daniel Cohn Bendit, fustige l’absence de politique étrangère de l’Union, en violation de l’article 14 du Traité de Lisbonne. Voilà où on arrive quand on accepte des traités ambigus au lieu de tout remettre à plat ! Il ne fallait pas voter « Lisbonne », Messieurs, vous récoltez ce que vous avez semé. Vous saviez bien que cela ne marcherait pas et vous avez lancé les pires insultes à ceux qui y étaient opposés, non par « euroscepticisme », mais parce qu’ils veulent une Europe plus efficace sans passer par les fourches caudines du néo-libéralisme.

 

Une époque historique est révolue.

 

Alors, que faire ? La solution vient sans doute du monde arabe. Après tout, il est le premier concerné. Guy Stibon, journaliste à l’hebdo français Marianne, a publié une interview du Premier ministre tunisien, Béji Caïd Essebsi, qui a succédé à Gannouchi renversé par la pression populaire et qui est un homme bien plus crédible. Que dit-il ?

 

« Attention, pour nous la Libye ce n’est pas l’étranger, c’est une affaire intérieure. Les mêmes familles vivent des deux côtés de la frontière. Presque chaque ville de Tunisie possède son quartier tripolitain. Nous avons reçu plus de 160.000 réfugiés en quelques semaines. Nous n’avons pas crié à l’invasion. Nous leur avons porté secours dans la limite de nos moyens. Les habitants des régions frontalières les ont reçus chez eux. On ne nous a pas signalé de mécontentement local. 

 

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Le Premier ministre Tunisien : Béji Caïd Essebi

 

Vous, en France, quand dans un moment de crise, 5.000 Tunisiens débarquent à Lampedusa (ils sont 15.000 aujourd'hui), très, très loin de votre territoire, vous y voyez un cataclysme.  Marine le Pen  court à Lampedusa. Il vaut mieux rester calme. Ce sont des drames humains accidentels qui ne tirent pas à conséquence irrémédiable. On fait avec. Vous réalisez : 160.000 immigrés survenant soudainement chez nous, toute proportion gardée, c’est l’équivalent d’un million d’immigrés en France en quelques jours. Je n’ose même pas imaginer la panique. Je ne donne de leçon à personne mais je crois que la démocratie consiste justement à régler sans heurt les problèmes qui surgissent naturellement dans une société. A propos de cette vague d’immigration, j’ai entendu des voix nous féliciter, « Vous êtes des héros », m’a-t-on dit. J’ai répondu, merci mais les héros sont fatigués, tout cela coûte cher et nous sommes un petit pays en difficulté économique. Aidez nous un peu en attendant que la Libye entre dans une ère de stabilité. »

 

Bien sûr, nous nous trouvons une fois de plus confronté à nos fantasmes, ceux d’une immigration incontrôlée, comparable à une invasion, où nous nous ferons absorber. Que nous répond Essebi ? Arrêtez de fantasmer, votre régime démocratique, si vous savez vous en servir, vous aidera à sortir de ce mauvais pas, et puis aidez-nous à nous redresser, car cela fait partie de la solution à vos problèmes d’immigration.

 

Marine_Le-Pen_Lempadusa.jpg

 

Marine Le Pen à Lampedusa : tout est bon pour faire

une démagogie odieuse.

 

Que conclut le Premier Tunisien de tout cela ? « L’histoire obéit à des cycles. Le temps des colonisations, les vagues de décolonisation, la phase des dictatures. Cette page des dictatures est tournée. En Tunisie comme partout ailleurs, nous sommes heureusement entrés dans l’ère de la liberté, l’ère de la démocratie. Nous avons donné le départ, d’autres ont suivi. D’autres encore sont pour l’instant sur le bord de la route. Tous seront touchés, d’une manière ou d’une autre. Une époque historique est révolue. Ceux qui ne le voient pas le paieront très cher. »

 

Espérons que l’avenir lui donnera raison.

 

Est-ce aux Occidentaux à éliminer Kadhafi ? La réponse est non, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il y a eu trop de « copinages » entre le « chef » libyen et les Occidentaux n’auraient aucune crédibilité vis-à-vis des Arabes s’ils se chargeaient d’éliminer le tyran. Ils diraient qu’ils l’ont tué car il devenait gênant pour eux. Ce qui serait conforme à la vérité…  C’est aux Libyens et à eux seuls, à régler leurs problèmes intérieurs. Ensuite, il faudra se retirer le plus rapidement possible, quitte à laisser la zone d’exclusion aérienne tant qu’il y a un risque de massacres de la population. Pour le reste, l’urgent est d’attendre pour la Libye, car on ne sait pas ce qui va sortir de cette quasi guerre civile.

 

En effet, ce Conseil reconnu un peu vite par Sarkozy est un organe hétéroclite. Il constitue une coalition tribale de Cyrénaïque s’étant affublée du nom de Conseil National de l’Opposition.

 

Une guerre tribale

 

Les Occidentaux n’ont pas compris qu’il ne s’agit pas d’une insurrection pour la démocratisation du pays, comme c’est le cas en Tunisie et en Egypte. Le peuple libyen n’a connu que la dictature de Kadhafi avec sa fameuse Jamahiriya. « Il est impossible de rationaliser le système politique libyen. Le terme Jamahiriya lui-même [le nom officiel de la Libye, institué par la Constitution de 1977] repose sur la traduction du mot “république” par un jeu de mots signifiant que le pouvoir appartient au peuple. C’est le populisme sauce Kadhafi”, explique Barah Mikaïl, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). François Burgat décrit un système de pouvoir “plastique”, qui voit “coexister en parallèle plusieurs légitimités politiques (tribale, militaire, institutionnelle), dont l’une peut à tout moment prendre le pas sur l’autre”. Le “Guide se définit comme au-dessus du système, quelles que puissent être les révolutions de palais”, poursuit Barah Mikaïl. “Pourquoi voulez-vous que l’on me critique ? Moi je ne dirige rien, je n’ai pas de compétence politique ou administrative. C’est le peuple qui gère les affaires”, assénait-il sur France 2 lors de son passage controversé à Paris fin 2007. » (Journal suisse « Le Temps », 1er septembre 2009).

 

Le peuple libyen n’a donc comme culture politique le contenu du fameux « Livre vert » de Kadhafi. La véritable cause de ces événements est tribale. Le pouvoir de Kadhafi reposait sur un accord entre les tribus de Tripolitaine – c’est à l’une d’elle qu’il appartient – et les tribus de Cyrénaïque. Cet accord s’est brisé suite aux révolutions tunisienne et égyptienne. Aussi, la coalition commet la même erreur que lors des conflits sur l’ex-Yougoslavie. Elle prend ouvertement parti contre un camp, celui de Kadhafi, c'est-à-dire des tribus qui lui restent fidèles, comme jadis contre les Serbes dans les Balkans.

 

Le mandat du Conseil de sécurité n’autorise pas à aider une des parties de ce conflit. Il se limite à créer une zone d’exclusion aérienne et à éviter le massacre de populations. Or, on s’aperçoit que les forces coalisées, particulièrement la France, aident les troupes du Conseil d’opposition. Cela va favoriser ce que d’aucuns craignent : la partition de la Libye.

 

Comme l’écrit Mohamed Tahar Bensaada : « Rien n’interdit aux Occidentaux et à leurs alliés arabes de soutenir l’opposition de Benghazi. Mais s’ils veulent sincèrement une démocratisation dans le cadre de la stabilité, de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale de la Libye comme ils le prétendent, ils devraient user de leur influence auprès de cette opposition pour qu’elle accepte d’entrer dans un dialogue national sérieux avec le camp Kadhafi en vue de négocier les modalités d’une transition démocratique pacifique. Si elle sait s’arrêter comme elle a su commencer, et comme le lui conseille la Turquie en vue de laisser désormais la place à la diplomatie, l’intervention militaire occidentale aura au moins réussi, dans ce cas, à imposer aux deux protagonistes la nécessité de se réunir autour d’une table de négociations. Ce dernier scénario semble le mieux indiqué pour la Libye dans la mesure où il satisfait beaucoup de monde à la fois. Dans ce scénario, le seul accroc est que ni le clan Kadhafi ni le clan de Benghazi ne pourra tout avoir. Mais ne vaut-il pas un peu que rien du tout ? Reste à neutraliser la position française qui semble la plus belliqueuse et la plus irresponsable dans ce dossier, essentiellement pour des raisons de politique intérieure. » Et cela n’est pas gagné !

 

Pierre Verhas

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18 mars 2011 5 18 /03 /mars /2011 17:09

Après nous avoir présenté le mois dernier l'intégralité de la face visible de la Lune, Lunar Reconnaissance Orbiter nous propose maintenant d'admirer la face cachée.

 

La Lune nous présente toujours le même hémisphère, appelé la face visible. Lorsque la Lune s'est formée il y a 4,4 milliards d'années après une collision entre notre jeune Terre et Théia, un corps céleste de la taille de Mars, elle tournait beaucoup plus vite. C'est l'attraction terrestre qui a peu à peu freiné la Lune, synchronisant sa période de rotation sur sa période orbitale. Si la face visible de notre satellite naturel est connue depuis que l'Homme existe et fait l'objet d'explorations télescopiques depuis 400 ans, il a fallu attendre les années 1960 et les premières sondes pour recevoir les images de la face cachée.

 

Les astronomes ont eu alors la surprise de découvrir un hémisphère très différent de la face visible, caractérisé par une carence en bassins basaltiques (les fameuses « mers » lunaires) et un plus grand nombre de cratères. Cette asymétrie de la Lune reste toujours laborieuse à expliquer, surtout depuis qu'on sait que l'épaisseur de la croûte sur la face cachée est supérieure à celle mesurée sur la face visible. C'est dire si les scientifiques étaient impatients d'avoir à leur disposition une carte haute résolution de l'autre hémisphère lunaire, ce que vient d'achever LRO.

 

 

Une face cachée hautement cratérisée

 

Il y a quelques semaines les responsables de la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter publiaient la carte détaillée de l'hémisphère visible de la Lune, une mosaïque de 24.000 pixels de côté réalisée en assemblant 1.300 images prises avec la WAC (Wide Angle Camera) offrant une résolution d'environ 145 mètres. L'absence de turbulences atmosphériques et la proximité de l'orbiteur (qui tourne à une cinquantaine de kilomètres d'altitude) permettent ainsi d'obtenir une résolution dix fois supérieure à celle qu'on peut espérer d'un télescope amateur terrestre lors de la photographie d'un premier quartier de Lune. La même prouesse a donc été rééditée pour la face cachée.

 

On est bien loin de la trentaine d'images granuleuses expédiées en 1959 par la sonde soviétique Luna 3, la première à contourner notre satellite. Cette fois, LRO a pris la bagatelle de 15.000 images entre novembre 2009 et février 2011 et nous révèle une face bien plus accidentée. Avec cette nouvelle carte, les chercheurs espèrent pouvoir avancer dans leur compréhension des mécanismes à l'origine de la disparité entre les deux hémisphères lunaires.

 

 

Lune face cachée 

 

 

La face cachée de la Lune, comme on ne l'avait jamais vue. © Nasa/GSFC/Arizona State University

 

 

 

Cordialement

Jean
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Cercle Astronomique de Bruxelles (CAB) http://www.astro-cab.be/
Occultations of stars by the Moon (Apex)
http://www.astrosurf.com/apex-occult/
Popular Astronomy http://home.base.be/apexoccult/
Jean Schwaenen apexoccult@base..be
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J'ai trop aimé les étoiles pour avoir peur de la nuit
I too much liked stars to be afraid of the night

 

Tout le monde savait que c'était impossible à faire,

il est venu un imbécile qui ne le savait pas et qui l'a fait.

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12 mars 2011 6 12 /03 /mars /2011 11:10

La femme soumise, la femme libére, débat toujours d'actualité. Voici ce qu'en pense le site "activista" :

 

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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 21:48

On le sentait. Depuis quelques mois, il y avait une certitude : il allait se passer quelque-chose. Quoi ? Quand ? Où ? Comment ? Nul ne pouvait répondre. Et puis…

 

En décembre, juste avant les fêtes, paraît un petit bouquin de 29 pages vendu dans toutes les librairies francophones au prix de 3 €. Son titre : « Indignez-vous ! », son auteur, un vénérable personnage âgé de 93 ans inconnu du grand public, du nom de Stéphane Hessel, ancien résistant, rescapé des camps de Buchenwald et de Dora, co-rédacteur de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 et Ambassadeur de France. Son allure, son sourire permanent, bon et sans illusion, son parcours exceptionnel et inflexible  évoquent les célèbres mots qui concluent les « Mémoires de guerre » du général de Gaulle, dont il fut d’ailleurs un combattant : « Vieil homme, recru d’épreuves, détaché des entreprises, sentant venir le froid éternel, mais jamais las de guetter dans l’ombre la lueur de l’espérance ! »

 

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Stéphane Hessel : un regard lucide

sur le monde

 

Pourquoi cet ouvrage ? Pour rappeler l’essentiel : appeler à la Résistance dont le carburant est l’indignation. L’indignation face aux inégalités, face aux injustices, face aux traitements inhumains, face à la destruction de la planète, face à la dictature, celles des marchés, comme celle des tyrans. Et comme à l’époque de la Résistance, il faut agir en réseau. Et des réseaux, il y en a et rien n’empêche d’en créer. Hessel dit aux jeunes : « Regardez autour de vous, vous y trouverez des thèmes qui justifient votre indignation – le traitement faits aux immigrés, aux sans-papiers, aux Roms. Vous y trouverez des situations concrètes qui vous amènent à donner cours à une action citoyenne forte. Cherchez et vous trouverez ! »

 

Hessel, bon produit éditorial ? Champion du « boboïsme » ? Peu importe. L’essentiel n’est pas le « coup » médiatique – quelle imbécillité de croire qu’il a besoin de cela, à son âge – mais l’effet de son appel. Ah ! Le percentile – cette classe de un pour cent de la population qui détient la majorité des richesses – n’apprécie guère ! Et c’est tant mieux ! Comme le dit Régis Debray dans le « Nouvel Observateur » du 24 février : « (…) il s’agit du succès d’un homme plus que d’un texte. Dans la soft corruption ambiante, quand la droite de Neuilly et la gauche de Marrakech – dont on se demande bien ce qui les départage – battent l’estrade en toute impudeur, la simple droiture d’un modeste entêté qui a toujours mis sa vie, et son existence physique, en accord avec ses idées, rafraîchit l’atmosphère. »

 

Bien sûr, Stéphane Hessel est antisémite, péché suprême, car il a osé écrire : « Que des Juifs puissent perpétrer eux-mêmes des crimes de guerre, c’est insupportable. Hélas, l’histoire donne peu d’exemples de peuples qui tirent les leçons de leur propre histoire. » Le lobby sioniste ne tolère aucune critique, il condamne ses contradicteurs sans appel. Pourtant, ces gens n’ont tiré aucune leçon de l’œuvre de leurs pères qui projetaient de bâtir un Etat juste. Ils l’ont polluée.

 

Est-ce une coïncidence ? Là où on ne l’attend, l’indignation éclate.

 

Fin décembre, pendant les fêtes, éclatent des troubles en Tunisie. Le suicide par le feu de Mohammed Bouazizi, jeune marchand ambulant, exprimant ainsi son indignation face à l’arbitraire d’un pouvoir affameur, soulève un peuple entier qui chasse son tyran en trois semaines et qui se bat toujours pour un réel changement.

 

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En Egypte, en Libye, en Tunisie et bientôt dans l'ensemble

du monde arabe, le peuple chasse ses tyrans : Quelle leçon !

 

Fin janvier, bien après les fêtes, le peuple se soulève dans l’antique Egypte, témoin de tant de civilisations et de conquêtes, et renverse son tyran en deux décades.

 

Mi février, le peuple se soulève en Libye. Un tyran assassine son peuple. Tout se terminera dans le sang en quelques jours.

 

L’ensemble du monde arabe s’embrase. Et le feu se propagera ailleurs. Sur les décombres des schémas concoctés dans les meilleurs intérêts du percentile, un monde nouveau se bâtit, dont on ne sait s’il sera pire ou meilleur. Le choc des civilisations n’a pas eu lieu. Le séisme de l’histoire, oui.

 

L’indignation est donc partout ! Elle s’exprime avec force et parfois violence. Cependant, une nouvelle classe porteuse d’un projet répondant aux aspirations populaires n’est pas encore née. Le percentile est ébranlé, mais il est loin de sombrer.

 

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Le percentile est ébranlé, mais il est loin de sombrer.

 

Un livre. De plus en plus de peuples s’indignent. C’est l’effet domino tant redouté par le percentile. On parle de mouvements en Grèce, en Chine, en Afrique centrale et – pourquoi pas ? – bientôt en Europe et aux Etats-Unis. Est-ce une révolution ? Laissons aux idéologues le soin de trancher. La réalité est le réveil d’une partie de la société oubliée, méprisée, voire même rejetée : le peuple. Il n’a plus confiance en ses « élites » autoproclamées. Il veut décider lui-même. Il veut la liberté et le pouvoir après avoir chassé les tyrans. Il lui faudra maîtriser le percentile. Ce sera difficile. Ce sera périlleux. Le risque d’un retour en arrière est énorme. Le devoir de chacun est d’aider le peuple à le juguler. Justice, liberté, égalité, voilà sa volonté. Et ces mots écrits voici bientôt trois siècles par un révolutionnaire injustement méconnu, Thomas Paine, ont toute leur actualité : « Punissons, en répandant des lumières, plutôt qu'en exerçant des vengeances. Commençons cette ère nouvelle en déployant de la grandeur, de la générosité ; et ne songeons plus qu'à maintenir l'union et à gagner les cœurs, pour assurer nos succès. »

 

Pierre Verhas

 

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19 février 2011 6 19 /02 /février /2011 14:05

Alors que tous les observateurs un peu sérieux plaident pour une réelle politique méditerranéenne de l’Union européenne suite aux révoltes arabes, voici que Mme Ashton ci-devant « ministre des affaires étrangères de l’Union » est allé serrer la pince de Gannouchi, chef du gouvernement de « transition » de Tunis – c’est-à-dire un gouvernement de caciques du régime de Ben Ali – avec dans son escarcelle une aide mirobolante de 17 millions d’Euros qui se monteront à 258 millions en 2013. Quelle générosité ! Quelle cohérence ! Et après cela, on dira que l’Union qui jusqu’ici s’était contentée de prendre acte de la chute des dictatures «amies», incapable d’avoir la moindre initiative, s’est enfin décidé à agir. C’est se moquer du monde et en particulier du monde arabe !

 

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Catherine Ashton et Mohammed Gannouchi :

se moquer du monde !

 

On assiste, comme l’a rappelé Cohn Bendit au Parlement européen à un « tsunami démocratique, équivalent à la chute du mur de Berlin. » et le Parlement, la Commission, le Conseil européen restent passifs.  Comme l’écrit Libération « les Etats, surtout les grands, ne veulent pas accorder la moindre autonomie à Lady Ashton, comme s’en est plaint, mardi, José Manuel Durão Barroso, le président de la Commission, devant les eurodéputés. » Gageons que les plaintes de ce dernier sont de pure forme !

 

En réalité, ce dont les dirigeants de l’Union européenne ont peur, c’est d’un flux migratoire massif consécutif aux révoltes des pays du Maghreb. Comme l’écrit toujours Libération : « Seule la peur de la pression migratoire, incarnée par l’arrivée de 5 000 boat people tunisiens sur les côtes italiennes, semble sortir les Européens de leur apathie. Hier, Cecilia Malmström, commissaire aux Affaires intérieures, est venue expliquer aux députés réunis à Strasbourg que l’Union allait mobiliser ses moyens pour aider l’Italie afin d’empêcher les migrants d’arriver en masse en Europe. «En fait, l’absence d’enthousiasme de l’Union face aux révolutions arabes se comprend, car toute sa politique d’immigration s’appuie sur la collaboration des dictatures du sud de la Méditerranée», dénonce l’Allemande Franziska Brantner, eurodéputée verte. Si elles s’effondrent, ce sera une catastrophe pour l’Europe.» C’était en effet la véritable raison du voyage de Catherine Ashton à Tunis : l'UE examine les mesures qu'elle pourrait prendre pour aider l'Italie à faire face au débarquement des immigrants clandestins tunisiens sur son île de Lampedusa, a répondu Bruxelles dimanche.

 

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A Lampedusa, des milliers de réfugiés tunisiens attendent une solution

de l'Union européenne.  Les échéances électorales sont-elles prioritaires à une crise humanitaire ?

Et puis, n'oublions pas que Sarkozy et Merkel sont proches d'échéances électorales qui détermineront leur avenir politique. Dès lors, une importante vague d'immigration serait particulièrement mal venue. La peur, toujours la peur...

La haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères doit évaluer la situation sur le terrain alors que le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini doit faire une visite éclair à Tunis lundi 21 février. Catherine Ashton doit également évaluer l'aide que l'UE peut apporter à la Tunisie pour relancer l'activité économique. Voici le dialogue qu’a eu le ministre tunisien, M. Chelbi, avec Catherine Ashton, tel que le rapporte « Le Monde » : « "Quand la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, l'a dit à notre ministre, celui-ci a pensé qu'il avait mal entendu et a demandé : 'Millions ou milliards ?'", a expliqué M. Chelbi à la presse à l'issue d'une table ronde organisée à Rome avec le ministre des affaires étrangères italien.

"Nous allons immédiatement débloquer 17 millions d'euros pour aider le gouvernement. Mais il y aura 258 millions d'euros de l'UE d'ici à 2013", avait déclaré Mme Ashton lundi pendant sa visite de quelques heures à Tunis.

"L'Europe démontre de cette manière ne pas avoir saisi la portée de l'événement historique qui s'est produit sur la rive sud de la Méditerranée", a ajouté le ministre tunisien, déplorant le fait que l'UE n'ait "pas été à la hauteur des événements" et espérant "une prise de conscience" nouvelle.

L'Union européenne croit sans doute qu'elle résoudra le problème avec une petite obole ! C'est une vraie politique qu'il faut mettre en oeuvre, mais qui en est capable ?

Le mois dernier, le Parlement européen a donné son feu vert pour un accord d’association avec la Libye en échange de la collaboration de Khadafi à la lutte contre l’immigration clandestine.

 

Rappelons qu’aujourd’hui, à Benghazi, foyer de la révolte actuelle contre le sémillant colonel, la police s’est ralliée aux manifestants. Cela commence à sentir le roussi pour la Jamâhîriyya libyenne. Jamâhiriyya signifie grossomodo « ce qui appartient aux masses ». Manifestement, cela n’appartient plus à Mouammar El Kadhafi. Il n’y a que les dirigeants de l’Union européenne pour ne pas s’en apercevoir.

 

Ce serait risible, si tout cela ne risque de coûter très cher aux peuples du Sud et du Nord de la Méditerranée. Et puis quarante morts en Libye et des dizaines à Bahreïn, au Yémen, en Algérie, cela commence à faire beaucoup.

 

Pierre Verhas

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17 février 2011 4 17 /02 /février /2011 21:45

Personne n’a prévu le 14 janvier à Tunis, nul n’a vu venir le 25 janvier au Caire. Aucun observateur, qu’il soit diplomate, journaliste, universitaire, n’a envisagé un seul instant avant ces deux dates que les dictateurs Ben Ali et Moubarak allaient être renversés par des révoltes populaires.

 

Aussi, il est trop facile de jouer les Cassandre d’après coup comme le « gourou » mondialiste Jacques Attali qui, péremptoire, tire les conclusions de ces événements : « Aucune dictature ne résiste à l’économie de marché ! » (Le Soir du 12 février). Cette analyse est fausse. Une des causes des révoltes arabes – et ce n’est sans doute pas fini – est justement le rôle joué par l’économie de marché mondialisée et elle pourrait aussi sonner l’échec de ces mouvements.

 

manif Tunis 27 12 01

 

Les Tunisiens n'ont pas eu besoin de "l'économie

de marché" pour renverser Ben Ali.

 

En Tunisie, au début de la deuxième quinzaine du mois de décembre 2010 des troubles ont éclaté en contestation d’une hausse brutale des prix et d’une pénurie des produits de base et ensuite, le peuple se révolta contre la hogra (mépris) de l’élite à son égard. C’est ainsi que, progressivement, est apparu  le mot d’ordre de ce mouvement : liberté, travail, dignité.  Les choses prirent une tournure dramatique le 17 décembre à Sidi Bouzid (ville du centre-ouest de la Tunisie à quelque 265 km de Tunis) : Mohamed Bouazizi, un jeune diplômé qui vivotait du commerce ambulant, s’est immolé par le feu. Transporté à l’hôpital des grands brûlés de Ben Arous, il décéda le 4 janvier 2011. Bouazizi est devenu l’icône de cette révolution. Plus rien n’arrêtera le processus.

 

La crise alimentaire touche durement le Maghreb.

 

La crise alimentaire mondiale qui débuta en 2008, avant la crise financière, par une hausse vertigineuse des prix alimentaires, suite à la spéculation, toucha spécifiquement les pays du Maghreb.  D’ailleurs, les pouvoirs en place prirent très tôt conscience du danger que représentait cette instabilité des prix des denrées de base. Ainsi, le gouvernement égyptien décida, dès 2008, de consacrer, chaque année, 7 % de son PIB à des subventions destinées à compenser les hausses de prix.

 

Lorsque la révolte a éclaté en Tunisie, son voisin, la Libye, a décidé de «supprimer les droits de douane et autres taxes sur les produits alimentaires, y compris les denrées de base, ainsi que le lait pour enfants». L'Algérie, l’autre voisin, a fortement réduit les taxes sur des produits de première nécessité importés, comme le blé et les huiles. La Jordanie a choisi de subventionner davantage les grands fournisseurs du pays, pour les inciter à baisser leurs prix sur le sucre, le riz et la volaille. Et cela s’étend à toute la région qui renfloue ses réserves de céréales. Parmi les mesures les plus spectaculaires, le Maroc a lancé à la mi-janvier un appel d'offres pour l'achat de 255.000 tonnes de céréales. L'Algérie aurait déjà acquis, depuis le 1er janvier, un million de tonnes de blé. L'Egypte, elle, a acheté ces six derniers mois 4,5 millions de tonnes de blé, soit l'équivalent du volume importé sur l'ensemble de l'année précédente... L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis se tiennent eux aussi prêts. (Source Ludovic Lamant dans Mediapart du 26 janvier 2011)

 

La région du Maghreb était considérée comme un grenier à blé. Aujourd’hui, suite à l’impéritie des dictatures nationalistes de chaque pays, suite à l’attentisme d’un Occident guidé uniquement par ses intérêts immédiats, suite à la mondialisation et au libre échangisme imposé par l’OMC, les pays d’Afrique septentrionale sont devenus importateurs nets de denrées alimentaires, donc totalement dépendants de l’extérieur. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : Les cinq pays de la région (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye et Egypte)  représentent 2% de la population mondiale mais consomment 6% du blé de la planète, et réalisent à eux seuls 18% des importations de cette céréale. Une distorsion qui devrait encore s'accroître dans les années à venir, au vu des perspectives démographiques. L'Egypte devrait ainsi franchir le cap des 100 millions d'habitants en 2025, contre un peu plus de 80 aujourd'hui, avec un taux de fécondité supérieur à trois enfants par femme.

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Indice des prix alimentaires de la FAO.

On constate la hausse vertigineuse des prix !

Ensuite, les cours n’ont jamais été aussi hauts et frappent particulièrement la région. Selon la FAO, l’indice des cours a augmenté de 4 % en novembre 2010 et de 25 % sur toute l’année dernière. Or, les pays du Maghreb, à l’exception de l’Algérie et de la Libye, ont orienté leur économie vers le tourisme, ce qui a enrichi les familles Ben Ali et Moubarak et ce qui a vidé les campagnes et contribué à leur désertification. De plus, les stocks de céréales sont historiquement bas, ce qui provoque la volatilité des prix, sans compter la spéculation qui joue à fond.

Sans redressement économique et social, ce sera un dramatique échec.

De plus, l’absence d’une Union du Maghreb arabe qui devait regrouper les pays de la région, à l’exception de l’Egypte, est un frein majeur au développement économique. En effet, comme nous l’avons déjà rappelé au sujet du conflit du Sahara occidental, le commerce entre les Etats d’Afrique du Nord représente 1,3 % de leurs échanges extérieurs. C’est le taux le plus bas du monde. Cette entrave doit être levée si l’on veut que l’économie des pays de la région puisse se développer.

Sans un redressement économique et une politique sociale, les révoltes arabes sont vouées à l’échec, avec toutes les sanglantes conséquences que cela peut entraîner. Or, ce redressement est possible. Pour cela, il faut résoudre le conflit du Sahara occidental afin d’assurer une véritable autodétermination au peuple Sahraoui et permettre la renaissance de l’Union du Maghreb arabe. D’autre part, l’économie maghrébine doit être réorientée vers sa vocation naturelle, l’agriculture, afin d’assurer aux peuples de la région l’autosuffisance alimentaire sans dépendre de la spéculation. D'autre part, des efforts considérables doivent être consentis en matière d'infrastructures, ce qui nécessite une industrialisation locale. Enfin, cette Union pourra être un instrument efficace contre les nationalismes qui risquent de renaître.

L’Union européenne a un rôle majeur à jouer. Il est indispensable d’élaborer un plan Marshall pour l’Afrique septentrionale, plan à concevoir et à exécuter en association avec les autorités démocratiques, espérons-le, qui succéderont aux dictateurs renversés. Et c'est vital pour l'Europe elle-même si elle veut échapper à un déséquilibre dramatique entre le Nord et le Sud de la Méditerranée. 

Plus jamais comme avant

Le bouleversement du monde arabe, même si l’on peut craindre à terme un échec, a néanmoins transformé les choses. Un retour en arrière n’est désormais plus possible. C’est là sa force. Comme l’écrivait Jules Verne : « La liberté est un bien immense que l’on ne peut goûter qu’à la condition de vivre. » Et une fois qu’on y a goûté, on ne peut plus s’en passer.

En outre, la démocratie, ce ne sont pas seulement les élections – dont il n’est d’ailleurs pas encore sérieusement question – c’est aussi la liberté de la presse, la liberté d’expression, le pluralisme politique. Et tout cela, il sera dorénavant très difficile de le confisquer à nouveau.

Néanmoins, ces révolutions sont faibles. Elles n’ont aucune organisation structurée. Il n’y a pas de chefs charismatiques. Il n’y a aucune idéologie, aucun projet. De plus, elles n’ont disposé d’aucun soutien extérieur. Elles ont exprimé le rejet des dictatures par les peuples arabes et surtout par la jeunesse qui se sent dépourvue d’avenir. Cependant, si d’aventure, de nouveaux pouvoirs totalitaires s’installent, ils feront sans doute illusion que quelques temps et de nouvelles révoltes pourraient surgir.

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Ben Ali et Moubarak ont été renversés par l'armée, sous la pression du peuple.

En effet, on s’est laissé quelque peu aveugler par l’effet médiatique de ces soulèvements populaires. Ils ont fait vaciller les dictatures en place, mais n’ont pas renversé les dictateurs. En Tunisie, comme en Egypte, c’est l’armée  qui a déposé Ben Ali et Moubarak.

Le rôle de l’armée

En Tunisie, ce n’était pas l’armée qui était au pouvoir. La « garde prétorienne » de Ben Ali était la police. Depuis l’indépendance, l’armée tunisienne n’a jamais manifesté une volonté de prise de pouvoir. Elle n’a pas de tradition putschiste. Cependant, elle a pris le pouvoir et a installé des sbires de l’ancien régime avec le soutien de la bourgeoisie qui, au départ, soutenait le soulèvement populaire. Le peuple ne l’a pas accepté et de nombreuses manifestations ont toujours lieu pour épurer la classe politique et l’administration des anciens collaborateurs de la dictature.

En effet, si on lit Robert Baduel dans « Le Monde » du   février 2011, le chef d’état-major de l’armée, Rachid Ammar, qui avait refusé de tirer sur les manifestants, l’a fait plus par calcul que par ralliement au mouvement.

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Rachid Ammar surnommé le "centurion du peuple" avait un plan bien élaboré.

  « Quel était ce calcul possible et en quoi peut-on dire que cette dissidence de l'armée a bénéficié à la rue ? En n'obtempérant pas aux ordres du président, la hiérarchie militaire n'est pas devenue pour autant une alliée "subjective" de la rue. Le refus du général Ammar résulte sans doute d'une analyse du champ de bataille et de calculs. Cette dissidence ferme mais feutrée est d'abord une fracture dans l'oligarchie au pouvoir dont un groupe, pas seulement de militaires sans doute, a su intelligemment instrumentaliser la rue pour éliminer la fraction la plus compromise de l'oligarchie et ainsi s'est doté des moyens de faciliter dans l'immédiat la reprise du pouvoir par la fraction la plus présentable de cette même oligarchie. (…) L'armée tunisienne serait-elle républicaine d'esprit ou l'a-t-elle été de circonstance ? » Le jeu malsain de la diplomatie secrète est toujours en cours !

 

Pour preuve, rien n’a bougé dans la société tunisienne. Aucune mesure n’est prise, aucune réforme n’est enclenchée. On est toujours sous un gouvernement de « transition » et sans doute pour longtemps. Ainsi, une véritable crise de confiance a vu le jour. C’est la raison pour laquelle des dizaines de milliers de jeunes qualifiés, ne voyant aucun avenir en Tunisie, ont décidé d’émigrer vers l’Europe. L’île de Lampedusa est envahie depuis deux semaines de milliers de demandeurs d’asile tunisiens qui, au terme d’une traversée au péril de leur vie, croient trouver du travail dans le vieux continent.

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Une embarcation d'émigrés tunisiens arraisonnée par un garde-côte italien.

Ici aussi, on constate l’urgence d’une politique européenne en la matière qui ne soit pas celle de la diplomatie secrète basée sur des données géopolitiques obsolètes. On ne peut rester sans réponse face à cette situation et l’Union européenne a les moyens d’agir. Aura-t-elle seulement la volonté politique ? Avec des Sarkozy, des Merkel, des Berlusconi, on peut en douter.

En Egypte, finalement, en dehors du renversement d’Hosni Moubarak qui se trouve toujours sur le territoire, bien protégé, à Charm-el-Cheikh, cité contrôlée par l’armée et aussi par des forces internationales, il n’y a pas grand changement. L’armée est toujours au pouvoir. Elle l’est depuis le renversement du roi Farouk en 1952, soit près de soixante ans.

Or, depuis Moubarak, et la chute de l’Union soviétique, l’armée égyptienne est en réalité placée sous le contrôle des USA. Selon le géographe et politologue italien, Manlio Dinucci : « Le fait que ce soit le directeur de la CIA, Leon Panetta, qui ait annoncé jeudi (10 février 2011) « la forte probabilité que Moubarak puisse s’en aller dès ce soir » indique que la décision a été prise à Washington avant le Caire.

Et la déclaration de ce même directeur de la CIA d’ « espérer en une transition ordonnée en Egypte » confirme que le feu vert a été donné pour le plan annoncé par le président Obama : la « transition ordonnée et pacifique » qui, mettant de côté le désormais insoutenable Moubarak emporté par la rébellion populaire, laisse intacts les piliers de la domination états-unienne sur le pays : et avant tout la structure portante des forces armées égyptiennes que les Etats-Unis ont financées, équipées et entraînées.

C’est donc le général Sami Anan, chef d’Etat-major, qui a annoncé place Tahir que ce seront les forces armées qui « sauvegarderont les requêtes du peuple et sa sécurité ». Celui-là même que le secrétaire de la défense, Robert Gates, avait convoqué au Pentagone au début de la crise et à qui il avait donné des instructions au jour le jour sur les mouvements que l’armée égyptienne devait accomplir. Cette armée que le président Obama avait félicitée pour son « patriotisme et professionnalisme », en la désignant comme garante de la «  transition pacifique et ordonnée ». Cette armée qui, par l’intermédiaire du général Hassan al-Rouini, commandant de la place du Caire, a annoncé aux manifestants de place Tahir : « Toutes vos requêtes seront exaucées aujourd’hui ».

 

Le pouvoir passe au Conseil militaire suprême qui, réuni sans le « commandant en chef » Moubarak, annonce « des mesures pour sauvegarder les conquêtes et les ambitions de notre grand peuple ». »

 

Le rôle de l’armée égyptienne est fondamental pour la stratégie étatsunienne. Forte de 450 000 hommes (711 000 avec les réserves), cette armée est un immense réservoir humain, qui peut être mobilisé en cas de péril national ou aux frontières ; c’est aussi une force militaire relativement moderne — une des seules du continent africain à disposer d’une panoplie interarmes complète et d’une capacité d’intervention sur toute la gamme des moyens. Elle est en effet dotée des armements les plus modernes dont certains sont fabriqués en commun USA – Egypte, comme les chars M1A1 Abrams, le tout financé à raison de 60 milliards de dollars par les Etats-Unis. Des manœuvres biennales se déroulent en Egypte avec la participation de 25.000 militaires US.

 

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Le fameux char Abrams "protège" le peuple,

place Tahrir.

 

Le rôle fondamental de l’Egypte dans la géopolitique américaine est de maintenir une paix séparée avec Israël et d’empêcher « l’instabilité » à Gaza en bloquant les envois illicites d’armes aux Palestiniens. Cela explique la fermeture de la frontière égyptienne de la bande de Gaza.

 

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L'état-major égyptien avec des officiers US :

l'entente est parfaite sous le regard de Moubarak.

 

 

Le pouvoir réel en Egypte est donc exercé par le Conseil militaire suprême qui est composé d’officiers supérieurs pro-américains et qui a placé provisoirement à la tête de l’Etat, le maréchal (!) Mohamed Tantaoui. Ce vieux reitre âgé de 75 ans a participé aux trois guerres israélo – égyptiennes (1956, 1967 et 1973). Il a conduit le corps expéditionnaire égyptien en 1991 au Koweït lors de la guerre du Golfe. Depuis, il a été ministre de la Défense de Moubarak jusqu’à la fin.

 

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Le maréchal Mohamed Tantaoui "marionnette" du

Conseil militaire suprême ?

 

Tantaoui est considéré comme un vieil homme tranquille, peu enclin au changement, mais garant de la stabilité. Dans les milieux diplomatiques, l’on dit qu’il est le candidat idéal des Etats-Unis et d’Israël. Mais n’est-il pas en réalité une marionnette des jeunes et ambitieux officiers du Conseil supérieur de l’armée ? En tout cas, on le voit difficilement engager les audacieuses réformes démocratiques dont l’Egypte a grand besoin.

 

À défaut de structures politiques crédibles, le seul instrument de pouvoir efficace en Tunisie et en Egypte est l’armée. L’armée de ces deux pays est soutenue par les Etats-Unis et l’Europe dans leur stratégie de lutte contre l’islamisme et de soutien inconditionnel à Israël. L’armée est un facteur de stabilité politique, à défaut d’être démocratique, et est un outil efficace dans la « guerre contre le terrorisme », traduisez l’islamisme…

 

La chimère de l’islamisme

 

Voici encore une certitude qui s’envole. À l’exception de quelques néoconservateurs indécrottables, on s’aperçoit que le « danger islamiste » qui a tant mobilisé les esprits et les moyens depuis le 11 septembre 2001, est une chimère.

 

Les révolutions dans les pays arabes ont désarçonné l’establishment occidental : les chancelleries occidentales, les spécialistes du monde arabe, les médias et leurs envoyés spéciaux … On croyait que le peuple arabe était maintenu dans un coma profond et que les dictatures en place étaient inébranlables. Ces mêmes dictatures, que l’Occident soutenait aveuglément, étaient considérées comme le seul rempart contre le danger suprême : l’islamisme. L’ineffable éditorialiste du « Figaro », Alexandre Adler, écrivait : « Non, à tout prendre, je préfère que les Frères musulmans soient cooptés par les militaires égyptiens qui gardent l’essentiel du pouvoir plutôt que de les voir gagner des élections libres, […] Je soutiens donc le maintien des dictatures les plus éclairées possibles – voir pas éclairées du tout – en Egypte et en Arabie saoudite plutôt que l’application, dans ces régions du monde, des principes démocratiques qui, dans l’immédiat, ne seraient que porteurs de désordres et de violence ».

 

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Alexandre Adler s'est une fois de plus trompé

de chemin.

 

Il est évident que les groupes islamistes ont joué un rôle secondaire dans les révoltes du monde arabe. En Tunisie, ils étaient absents. En Egypte, les fameux Frères musulmans ont apporté un soutien moral et logistique au mouvement populaire et n’ont en rien été le fer de lance de la révolte. D’ailleurs, ce vieux parti des Frères musulmans a perdu de sa superbe. La moyenne d’âge de ses dirigeants est de 70 ans et ils ont été déstabilisés par l’attentat sanglant contre une Eglise copte au Caire qui a suscité une réprobation générale de l’opinion égyptienne, musulmans et chrétiens ensemble. Sans doute, cette vague d’indignation  a été un des déclencheurs du mouvement populaire égyptien.

 

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Attentat à la voiture piégée contre une église copte

au Caire. Un des déclencheurs de la révolte ?

 

Dans les autres pays arabes, aucune des révoltes n’est menée par les mouvements islamistes locaux et les dictatures et monarchies absolues se basant sur l’islamisme, comme dans les Emirats, sont aussi violemment contestées.

 

En outre, on connaît mal la nature de l’Islam et ses nombreuses nuances. Certains imaginent en Europe et aux USA qu’il constitue un bloc monolithique animé par la seule haine de l’Occident. C’est ridicule et aberrant. On ne peut tout de même pas mettre dans le même sac Erdogan et les Talibans !

 

Dans le site « Le Grand Soir » du 15 février 2011, trois intellectuels arabes, Zhor Firar, militante associative, Fouad Imarraine, militant associatif  et Omar Mahassine, imam et militant associatif, écrivent : « Un discours sous jacent, qui ne dit pas son nom, désigne le monde arabe comme n’étant pas suffisamment mûr pour accueillir les idéaux universels. C’est assez incroyable d’entendre cela au vingt et unième siècle et de se dire que finalement l’agora n’est accessible qu’à une certaine élite. Nous sommes loin des idéaux du peuple, de son aspiration à plus de justice et de dignité. »

 

On se trouve à un tournant de l’histoire et les discours de certains intellectuels laissent pantois, tant ils balaient d’un revers de la main la question des droits fondamentaux. Comment peut-on aujourd’hui, dire tout et son contraire, être pour la démocratie dans le Nord mais pas dans le Sud, accepter des droits pour les uns et l’aliénation pour les autres ? Le droit à la dignité ne peut être monnayable ou à géométrie variable, en fonction d’intérêts économiques, politiques ou géostratégiques.

 

Depuis le 11 septembre, le concept d’islamisme est devenu une arme psychologique et une propagande islamophobe utilisées afin de façonner l’inconscient des masses et de faire accepter leurs régimes autoritaires et leurs politiques d’humiliations. Le phénomène de l’islam politique, comme source de libération, a une histoire ancienne et inhérente à l’époque postcoloniale et à la reconstruction de l’identité du monde arabo-musulman.

 

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Abd el Kader, musulman et franc-maçon,

combattit la colonisation française en Algérie

au nom de l'Islam et de la Liberté.

 

En effet, la plupart des mouvements de résistance aux colonisations occidentales se référaient à l’islam. Au XIXe siècle, Abd el Kader (1820 – 1883) qui lutta contre la colonisation de l’Algérie par la France, qui était franc-maçon, se battit au nom de l’Islam.  La question culturelle et identitaire a été très tôt un vecteur fondamental. En ce qui concerne le Maroc, Mehdi Elmandjra, fondateur de l’Organisation marocaine des Droits de l’Homme, professeur dans des universités américaines et à la London school of economics, explique : « […] le cas du Maroc, à la fin du 19e siècle, il y avait un mouvement moderniste Salafi qui venait pour dire que l’Islam est une religion dynamique, c’est à dire qu’il y a certaines constantes, mais qu’il y a une flexibilité énorme découlant de l’Ijtihad (la recherche). C’est ce mouvement qui a motivé la défense des Droits de l’Homme et la lutte contre l’impérialisme et le colonialisme. Il n’y aurait pas eu de libération sans l’Islam. Cet Islam libérateur qui régnait dans tous les mouvements nationalistes traduisait une culture d’émancipation. […] Cet Islam libérateur devenait ainsi aussi dangereux pour eux (le régime en place) qu’il l’a été lors de la période coloniale pour l’occupant. Par conséquent, ces régimes ont commencé à établir et à encourager des mouvements, des sectes, des traditions bref un Islam hermétique et archaïque. Mais on oublie souvent que l’Islam est libérateur. »

 

Par contre, il existe – chacun le sait –  un puissant Islam conservateur, voire réactionnaire qui se retrouve en Iran dans le courant chiite et dans la péninsule arabique, en ce qui concerne les sunnites, par le Wahabisme qui se réclame faussement su Salafisme. Les Wahabites ont une interprétation rigoriste et figée du Coran et de la Sunna qui définit les règles issues de ce Livre regroupées sous le nom de Charia. La dynastie saoudienne adhère au Wahabisme et le finance. Al Qaida qui, au départ, était une organisation financée par les USA pour lutter contre l’invasion soviétique en Afghanistan et qui a combattu avec les Etatsuniens dans les Balkans, se réclame du Wahabisme. Oussama Ben Laden est Saoudien, membre d’une riche famille. Il fut au départ un agent de la CIA avant de se retourner contre les Etats-Unis en 1991, suite à la guerre du Golfe, lorsque l’US Army occupa une partie de l’Arabie saoudite, accusée de « souiller » le territoire « sacré » des lieux Saints de l’Islam, La Mecque et Médine. (Voir à ce sujet l’excellent ouvrage de Nafeez Mossadeq Ahmed, La guerre contre la vérité, éditions Demi Lune, collection Résistances, 2006)

 

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Oussama Ben Laden : la CIA l'a soutenu dans sa

Jihad contre l'occupation soviétique en Afghanistan.

 

On voit là toute l’ambigüité de la position américaine qui, d’un côté, impose la « guerre contre le terrorisme » à ses alliés, jusqu’à les contraindre à adopter des dispositions légales liberticides et de l’autre, défendent l’Arabie saoudite, à cause de son pétrole, qui finance les mouvements islamistes les plus réactionnaires.

Les principaux pays de l’Union  européenne ont adhéré à cette politique. Dès lors, ils ont considérablement affaibli leur position politique et diplomatique dans le Proche Orient.

 

Un revirement radical est indispensable. Il faut traiter les pays arabes en partenaires et considérer le peuple arabe comme adulte et les pays de l’Union européenne doivent s’affranchir du carcan diplomatique américain.

 

Dans les révoltes arabes, il y a une constante : l’islamisme n’a qu’une influence mineure dans les mouvements populaires qui secouent toutes les dictatures arabes peu ou prou soutenues par l’Occident.

 

Et en Europe ?

 

Ce vaste mouvement de remise en question des régimes totalitaires du Proche Orient a-t-il une influence en Europe ? La réponse est oui.Les révoltes arabes ont secoué la « Vieille » Europe. Les « certitudes » des penseurs officiels ont volé en éclats. Ils sont pitoyables sur les plateaux de télévision. Certains n’osent plus se montrer. D’autres prennent un air étonné et se trouvent dans l’incapacité d’analyser ces faits historiques. Evidemment, tout cela sort de leurs schémas. Jacques Julliard, un des seuls intellectuels de gauche lucide, éditorialiste à l’hebdo « Marianne » écrit : « La preuve est faite que les droits de l’homme ne sont pas des valeurs occidentales, mais bien des valeurs universelles. » Cela est une fameuse leçon pour les tenants du « droit à la différence » qui devenait petit à petit « la différence de droit » !

 

L’attitude lamentable de la gauche dite démocratique en Europe face à cette révolution, prouve son ignorance théorique, son incapacité à analyser les événements et son absence totale de réponse aux défis de notre temps. L’exemple le plus caricatural est celui du… caricaturiste Plantu qui a accepté tout récemment de recevoir un prix du très démocratique émirat de Qatar !

 

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Le caricaturiste français Plantu reçoit un prix de

la part du très démocratique émirat de Qatar.

 

Quelles sont ces fausses « certitudes » ? La première, c’est l’idéologie née du livre de Samuel Huntington « Le choc des civilisations » qui justifiait une sorte de conflit global entre l’Islam et l’Occident, en raison de la supériorité de ce dernier. L’analyse de Huntington partait du fait que les civilisations non occidentales, essentiellement la Chinoise et la Musulmane, n’ont pas de contacts avec l’Occident et ne peuvent dès lors évoluer. Aussi, il y a automatiquement conflit.

 

Cette théorie absurde avait déjà du plomb dans l’aile. Les derniers événements l’ont rejetée dans les poubelles du fameux néo conservatisme qui subsiste encore chez des néolibéraux indécrottables.

 

La seconde, c’est le déclinisme. Certains pensaient que la pensée universelle était en déclin et que le différentialisme allait s’imposer. Or, les aspirations des peuples arabes en lutte prouvent le contraire, contrairement à ce qu’écrit  Ayaan Hirsi Ali, la militante anti – islamiste d’origine somalienne, aujourd’hui réfugiée aux Etats- Unis : « Quand je regarde les images des masses au Caire, je n'ai aucune peine à imaginer le fort sentiment d'unité qui les habite. Beaucoup de téléspectateurs occidentaux s'identifient aux milliers de manifestants - pas seulement en Egypte, mais aussi en Tunisie, en Jordanie, au Yémen et ailleurs - pour exiger la fin de la dictature. D'innombrables commentateurs ont dressé des comparaisons avec les révolutions de 1989 en Europe de l'Est.

 

Or, cette comparaison méconnaît la profonde différence entre une foule occidentale et musulmane. Les motivations qui poussent les peuples d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient à envahir les rues sont multiples. Mais rien ne les réunit mieux que la prière collective, en particulier celle du vendredi. La mosquée autant que la rue : voilà une clef d'intelligibilité de ce soulèvement. »

 

Certes, il n’y a guère de points communs entre les mouvements de « libération » en Europe de l’Est en 1989 et la révolte arabe actuelle. Les motivations ne sont pas du tout les mêmes. Mais la circonscrire à une prière collective est à la fois faux et réducteur. C’est faux parce que le mouvement n’est pas d’ordre religieux et c’est réducteur car le monde arabo-musulman est imprégné de la culture de l’Islam. Ce n’est pas (encore) une révolution laïque, que certains Européens quelque peu naïfs croient déceler, mais des intellectuels arabes réclament une société laïque sans pour autant renier leur culture musulmane. Ayaan Hirsi Ali fait en plus part de son pessimisme : « Mais aujourd'hui les masses ont également besoin d'articuler ce qu'elles veulent. La BBC a demandé à un manifestant égyptien de commenter le caractère spontané de la protestation. "Nous n'avons pas besoin de leader", a-t-il répondu - au grand étonnement du journaliste et sans doute de la plupart des téléspectateurs occidentaux.

 

On peut parfaitement comprendre son aversion pour le leadership compte tenu des changements de pouvoir tels qu'ils ont eu cours dans le monde arabe. Là, des gens qui arrivent en libérateurs se muent sur un mode somnambulique en dictateurs jusqu'à ce qu'un autre vienne mobiliser les masses pour libérer la nation de son ex-libérateur. Immanquablement, l'homme nouveau rétablit la vieille infrastructure de mouchardage et de torture. » Certes, comme écrit plus haut, c’est un mouvement sans structures, ce qui est sa faiblesse. Mais la jeunesse arabe se méfie d’un éventuel nouveau leader charismatique. Aussi, une dictature du type de celles qui viennent d’être renversées n’est guère probable. Certes, des Egyptiens ont brandi des portraits de Nasser lors de manifestations de soutien au mouvement, mais c’était… en Europe. Le danger totalitaire vient d’ailleurs : l’armée et l’immobilisme de l’économie.

 

Le consensus de Pékin

 

Enfin, il faut sortir de ce qu’on appelle le « consensus de Pékin ». De quoi s’agit-il ? « Depuis quelques années, on célèbre à satiété ce qu'on appelle le "consensus de Pékin". C'est une formule élégante pour décrire des régimes qui prônent à la fois le capitalisme et le parti unique. On y voit la martingale gagnante pour les pays du Sud, la recette du décollage économique et social, celle de l'intégration dans l'économie globalisée. L'exemple vient de Chine - sacrée cette semaine deuxième économie mondiale derrière les Etats-Unis. Même si les Chinois se sont toujours gardés de "vendre" leur modèle, le "consensus de Pékin" n'a cessé de faire des émules.

En Russie, Vladimir Poutine s'en inspire, sans le dire, mais le modèle tente aussi nombre de pays africains. Il séduit l'équipe de Mahmoud Ahmadinejad en Iran. Il est copié par d'autres en Asie et ailleurs. L'équation gagnante à tous coups résiderait dans la fameuse combinaison chinoise : libre entreprise et autoritarisme politique. Voilà ce qui marche ! C'est ce qu'on pensait aussi en Egypte, du moins jusqu'à l'incongruité survenue au beau milieu de ce doux hiver des bords de Nil : la Grande Révolte de la place Tahrir.

 

Le "consensus de Pékin" n'était pas vanté qu'au Sud. Il s'est trouvé des experts aux Etats-Unis et en Europe pour imaginer qu'il allait dominer le siècle. L'expression serait due à l'Américain Joshua Cooper Ramo. Auteur et consultant, Cooper Ramo l'a forgée en 2004 en opposition à ce qu'on a appelé vers la fin des années 1980 le "consensus de Washington" : gouvernance la plus démocratique possible, libre entreprise et immédiate ouverture des frontières aux capitaux et marchandises du monde entier - voilà ce que le Fonds monétaire international (FMI) et le département du Trésor américain, notamment, vantaient alors comme le modèle gagnant-gagnant pour les économies du Sud et celles nouvellement désoviétisées de Russie et d'Europe orientale. » (Alain Franchon dans Le « Monde » du 17 février 2011)

 

Il est donc clair que la priorité absolue est donnée à l’économie de marché néolibérale au détriment d’un régime de liberté, d’égalité et de fraternité qui a pour nom la démocratie.

 

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Manifestation en Algérie le 15 février : la révolte

arabe est bien vivante. Le peuple ne faiblit pas. Un

coup sévère aux néolibéraux totalitaires.

 

Nul ne sait ce qu’il adviendra de la révolte arabe toujours en cours qui s’attaque aujourd’hui à de gros morceaux : les pays producteurs de pétrole comme la Libye, l’Algérie, les monarchies absolues de la péninsule arabique et l’Irak. On peut penser que les Etats-Unis ne verront pas d’un bon œil l’éventuel renversement de leurs « alliés » pétroliers et tenteront de réagir. Cependant, ils sont mal pris, Obama ayant ouvertement soutenu le renversement de son ex-ami Moubarak. L’opinion publique ne comprendrait pas un revirement pour soutenir les monarchies arabes détestées et méprisées dans une grande partie du monde.

 

En tout cas, quoiqu’il arrive, la révolte arabe aura porté un coup sévère sinon mortel au « consensus de Pékin ».

 

Pierre Verhas

 

 

 

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