Après la disparition du « patriarche » de l’extrême droite, Jean-Marie Le Pen, « Uranopole » va publier plusieurs « papiers » sur les dangers de ce courant qui monte dangereusement en Europe, mais aussi aux Etats-Unis et dans d’autres parties du monde.
La victoire de Donald Trump et le décès de Jean-Marie Le Pen sont des événements apparemment sans aucun rapport. En réalité, ils sont liés. La nouvelle extrême-droite prend la place de l’ancienne devenue rance et inefficace bien que connaissant un incontestable progrès électoral. En France, le clan Le Pen a fait son temps. Il cède peu à peu la place au jeune Bardella et à son équipe.
Elon Musk joue les missionnaires auprès de l'extrême droite en Europe pour Donald Trump ou pour lui-même ?
En Italie, Meloni a pris le dessus sur Salvini, le représentant de l’extrême-droite traditionnelle, et se montre capable de diriger un gouvernement et de mener des négociations internationales tout en ne renonçant pas à installer par petits paquets sa politique extrémiste. C’est en cela qu’elle est dangereuse !
En Hongrie, Viktor Orban se maintient au pouvoir en dépit des pressions de l’Union européenne (UE) et se moque de ses principes fondamentaux – notamment la Charte des droits fondamentaux – qui forment la base de l’UE.
On sait aussi combien Poutine soutient les formations d’extrême droite dans l’UE dans un but évident de déstabilisation. En réalité, nous nous trouvons devant un rapport de forces entre la Russie et le prétendu Occident qui a commencé en février 2022 au moment du déclenchement de l’agression russe sur l’Ukraine, agression russe motivée par les représailles contre les russophones au Donbass de la part des milices partisanes de Zelenski, une guerre qui s’est enlisée dès le départ et qui reste un dangereux centre de tensions.
Aujourd’hui, la victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle US ajoute un nouveau point de tension où l’extrême droite européenne joue un rôle tout en étant manipulée par le futur ministre chargé de l’organisation et de la logistique, le milliardaire et homme le plus riche du monde, Elon Musk.
Pour mieux appréhender ce dossier et le terrible danger qu’il représente, « Uranopole » publie un article du journaliste grec Yorgos Mitralias est l’un des fondateurs et animateurs du Comité grec contre la dette, membre du réseau international CADTM et de la Campagne Grecque pour l’Audit de la Dette. Membre de la Commission pour la vérité sur la dette grecque et initiateur de l’appel de soutien à cette Commission. Il vient de publier un article sur les dangers que représentent les rôles de Donald Trump et d’Elon Musk au moment où ils accèdent au pouvoir. Cet article a été publié sur le site de nos amis du « Grand soir ».
Le journaliste grec Yorgos Mitralias a un fin sens de l'analyse dans l'évolution des relations internationales.
Il est essentiel pour acquérir un minimum de lucidité dans la situation actuelle. Il sert de hors d’œuvre à la série de « papiers » qu’Uranopole prépare au sujet de l’extrême-droite pour ses lecteurs.
Attention ! Danger ! chantait Serge Lama…
Pierre Verhas
Ne pas répéter les erreurs des années ’30 - Prendre très au sérieux les menaces de Trump et Musk !
Tandis que Donald Trump multiplie les déclarations belliqueuses contre le Panama, le Groenland, le Canada ou les Palestiniens, les chancelleries et les médias internationaux se limitent à parler des...manœuvres tactiques du nouveau président des EU. Et pire, une partie de la gauche internationale continue à célébrer Trump le pacificateur (!), celui qui mettra fin aux conflits en cours en Ukraine et en Palestine. Et en même temps, tandis que son second (?) Elon Musk multiplie les initiatives de tout genre en faveur de l’extrême droite dure, néofasciste ou pas, de par le monde, les médias et les gouvernants occidentaux se contentent de parler de son...populisme tout en se demandant « pour qui se prend Elon Musk » ...
L’aveuglement de nos gouvernements bien-pensants libéraux
Manifestement, rien de nouveau sous le ciel de nos bien-pensants libéraux et autres inconditionnels de l’économie de marché : toutes ces réactions rappellent fortement les réactions de la plupart des médias et gouvernants occidentaux face à Mussolini et à Hitler dans les années ’20 et ’30. Même aveuglement devant la catastrophe qui se prépare et pire, mêmes conversions miraculeuses aux solutions ultraradicales proposées par ces « populistes » et « souverainistes » charismatiques. Comme, par exemple, quand la fine fleur de la presse économique internationale qui se moquait de l’inénarrable nouveau président argentin il y a seulement un an, lui adresse actuellement des éloges délirants, le présentant même comme un modèle aux dirigeants occidentaux ! Et tout ça tandis que plusieurs de nos gouvernants bien néolibéraux, se découvrent actuellement...libertariens en un temps record !
Alors, loin de nous l’idée que Trump ou Musk ne veulent pas dire exactement ce qu’ils disent. Ou qu’ils vont « s’assagir » une fois aux commandes et face à la « complexité » des problèmes de notre temps. Tous ces vœux pieux, proposés actuellement en guise d’ « analyses » de la situation par nos experts et autres « politologues », sont les mêmes, parfois mot à mot (!), à ceux que prononçaient nos dirigeants et nos médias dans les années ’30. Et ils ne font que semer la confusion, laissant désarmés et impuissants ceux d’en bas face à la catastrophe qui se prépare contre eux...
Vers la dictature libertarienne
Oui, Musk et Trump sont pleinement conscients de ce qu’ils promettent de faire, parce que leurs projets et leurs actes correspondent à leurs désirs et surtout à des réalités bien matérielles. C’est ainsi que la prédilection de Musk - mais aussi de Trump dans une certaine mesure - pour l’extrême droite dure et les néofascistes s’explique par le fait que la précondition pour le triomphe de son libertarianisme (qui abhorre même les trop timides limites que met l’Union Européenne à l’avidité capitaliste) est d’écraser tout mouvement syndical et d’atomiser les travailleurs et les travailleuses. D’ailleurs, ni Trump ni Musk ne cachent leur désir de casser de l’ouvrier. Par exemple, en août dernier au cours de leur « débat » retransmis en direct sur X, ils se sont amusés à célébrer les cas des ouvriers qui avaient été licencies par Musk aussitôt qu’ils se mettaient en grève. Et c’est exactement contre leurs prises de position en faveur de la criminalisation du droit de grève, que le puissant syndicat des travailleurs de l’automobile (UAW) a porté plainte contre eux les accusant de "tentative d’intimidation et de menace" des travailleurs. Comme a déclaré le leader de ce syndicat Shawn Fain, « Trump et Musk veulent que les gens de la classe ouvrière restent tranquilles et se taisent, et ils en rient ouvertement. C’est dégoûtant, illégal et totalement prévisible de la part de ces deux clowns ».
Briser le mouvement ouvrier avec l’extrême droite.
Alors, pour briser le mouvement ouvrier, rien de plus expérimenté, de plus déterminé et de plus organisé que cette extrême droite qui d’ailleurs est en train de monter en flèche. Ici on ne peut pas parler seulement d’affinités électives. En réalité on assiste déjà à la convergence qui pourrait très bien conduire bientôt à la jonction de l’extrême droite dure de par le monde avec les libertariens newlook que représentent Musk, Milei et peut être Trump lui-même s’il parachève son abandon du néolibéralisme. Une telle évolution serait pourtant catastrophique pour l’humanité car elle aboutirait à donner des ailes à une extrême droite désormais décomplexée, encore plus agressive et ouvertement nostalgique de ses ancêtres fascistes, au moment même où elle est en train de devenir la première force politique presque partout en Europe et au monde.
D’ailleurs, force est de constater que cette jonction des libertariens avec l’extrême droite dure et autres nostalgiques du fascisme est grandement facilité par l’abandon par les libertariens nouvelle mouture Musk, Milei et leurs amis, tant de l’antiétatisme viscéral que de la défense des droits individuels qui caractérisaient le libertarianisme traditionnel. C’est ainsi qu’on voit Musk et ses acolytes libertariens de par monde, non seulement adopter sans états d’âme mais même devenir les champions des traditionnelles théories et préjugés racistes, réactionnaires et obscurantistes de l’extrême droite dure et néofasciste ! (1) Le résultat est qu’une partie toujours plus grande de l’extrême droite mondiale abandonne maintenant son étatisme traditionnel pour adhérer au libertarianisme à la Musk, tandis que le dernier abandonne sa traditionnelle défense des droits individuels pour adopter les théories et les comportements violemment antisocialistes, bellicistes, complotistes, racistes, misogynes, anti-LGBT, anti migrants, antijeunes, antiécologiques, et climato négationnistes de l’extrême droite dure et néofasciste. C’est donc sur cette base bien solide de leurs « valeurs » et intérêts convergents sinon communs que pourrait s’opérer la fusion de l’extrême droite mondiale avec le libertarianisme triomphant de Musk et Milei, (2) suivis désormais de près par Trump. Une fusion qui donnerait alors naissance à un monstre dont la puissance destructrice pourrait bien dépasser tout ce qu’on a connu au siècle passé...
Oui, Musk est bel et bien fasciste !
Voici donc la réponse à une question qui semble travailler énormément dernièrement les médias et les experts en fascisme : oui, Musk est bel et bien fasciste, même si son fascisme est d’un genre nouveau. Comme d’ailleurs était fasciste pur-sang son très illustre prédécesseur Henry Ford, lui aussi constructeur de voitures, grand novateur du capitalisme en son temps, milliardaire et figure emblématique du capitalisme triomphant américain. Ce Henry Ford qui partage avec Elon Musk la même admiration pour deux très sulfureux politiciens Allemands : le premier pour Adolphe Hitler et le deuxième pour la présidente de l’AFD néofasciste Alice Weidel. Ce Henry Ford dont le portrait trônait toujours au-dessus du fauteuil de Hitler dans son bureau, car Ford avait « découvert » et financé Hitler avant tous les autres, et son antisémitisme radical (quatre volumes d’écrits de sa propre main !) l’avait inspiré et guidé comme aucun autre. D’ailleurs, Musk ne fait actuellement que suivre l’exemple du nazi Henry Ford quand il brise des grèves et attaque les syndicats ouvriers. Seule différence entre les deux : Ford avait sa propre armée de 3 000 nervis briseurs de grève, tandis que Musk n’en a pas (encore ?) et a recours à des milices privées...
Notre conclusion ne peut être que provisoire car on n’est encore qu’au tout début de cette histoire cauchemardesque. Cependant, on peut déjà affirmer qu’il ne faut pas répéter l’erreur de nos ancêtres des années ’30 et qu’il faut prendre très au sérieux les dires et les menaces de Trump et de Musk, et se préparer de toute urgence pour leur faire barrage D’ailleurs, les besoins de défense nationale qu’invoque actuellement Trump quand il n’exclut pas l’usage de la force pour attaquer le Panama, le Groenland ou le Canada rappelle imperceptiblement les besoins du lebensraum (espace vital) qu’invoquait à son temps Hitler quand il mettait à feu et à sang l’Europe et le monde entier...
Yorgos MITRALIAS
Notes
- La prédilection de Trump et Musk pour l’extrême droite très très dure et carrément néofasciste est illustrée aussi par le choix des invités à la cérémonie d’investiture de Trump le 20 janvier à Washington. Par exemple, il n’y aura qu’un invité Français, qui ne sera évidemment pas le président Macron, ni même Marine Le Pen, considérée manifestement trop modérée. L’unique invité est ... Eric Zemmour ! Tout un programme...
2. Voir aussi La menace fasciste se précise d’autant que Milei appelle à la création de l’Internationale brune !.