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  • : Blog consacré à l'actualité dans les domaines de la politique et de l'astronomie, vus au sens large. Ce blog n'est pas neutre : il se positionne à gauche, de philosophie laïque et donnant la primauté à l'expérience sur la spéculation. Ce blog est ouvert au débat, à l'exception des invectives, des attaques personnelles et des insultes qui seront systématiquement rejetées afin de permettre à chacun(e) de débattre en toute liberté et dans la sérénité qui n'exclut en rien la passion.
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21 octobre 2022 5 21 /10 /octobre /2022 15:56

 

 

 

La livraison d’octobre 2022 du Monde diplomatique contient une analyse fine et très documentée des enjeux de la guerre en Ukraine. Selon l’auteur, Pierre Rimbert, la mondialisation néolibérale à l’anglo-saxonne a changé de nature. Jusqu’à 2012, elle était inclusive : la Chine et la Russie y étaient associées via l’OMC. Depuis que les tensions ont monté entre la Russie et « l’Occident », il a été question de ne plus étendre le concept de mondialisation qu’aux pays « amis ». « Les délocalisations, oui, mais entre amis. » Cela a évidemment modifié les relations dans le monde industriel. Les blocs qui n’avaient jamais totalement disparu, se sont reconstitués et consolidés.

 

 

 

Les bombardements terroristes de Kiev reprennent. Cette fois-ci avec des drones kamikaze iraniens. (AFP)

Les bombardements terroristes de Kiev reprennent. Cette fois-ci avec des drones kamikaze iraniens. (AFP)

 

 

 

La mondialisation « régionalisée »

 

 

La mondialisation ou la globalisation anglo-saxonne s’est donc « régionalisée ». Auparavant, elle ne tenait pas compte de la situation géopolitique. Deux pays qui « hébergent chacun un Mc Donald’s ne se font pas la guerre » disait un essayiste du nom de Thomas Friedman – rien à voir avec feu l’économiste monétariste et ultralibéral Milton Friedman – Eh bien, non ! Il s’est trompé : les Mc Donald’s ne sont pas garants de la paix ! Aussi, notamment sous l’influence de Christine Lagarde, alors Directrice générale du FMI, on ne globalisera plus qu’entre « amis » ou plutôt entre les USA et leurs dévoués vassaux. C’est une des premières causes du conflit en Ukraine qui dépasse de loin le théâtre des combats. L’Occident – c’est-à-dire les USA et les pays anglo-saxons, l’Union européenne, le Japon, la Corée du Sud et quelques pays africains, du Sud-Est asiatique et d’Amérique latine – s’isole de plus en plus. Pour preuve, le vote de l’Assemblée générale des Nations Unies sur les sanctions à l’égard de la Russie. À l’exception des quelques pays comme la Chine, la Russie, la Corée du Nord qui ont voté contre les sanctions, la plupart des autres pays non occidentaux se sont abstenus. Ils représentent tous l’immense majorité de la population mondiale.

 

 

 

 

Vote de l'Assemblée générale de l'ONU du 3 mars 2022 condamnant l'agression russe en Ukrain. Une majorité de pays condamnent la Russie, mais les grands pays du Tiers-monde comme l'Inde, l'Afrique du Sud entre autres s'abstiennent. Tous les pays s'étant abstenus représentent les 2/3 de la population mondiale.de pays

Vote de l'Assemblée générale de l'ONU du 3 mars 2022 condamnant l'agression russe en Ukrain. Une majorité de pays condamnent la Russie, mais les grands pays du Tiers-monde comme l'Inde, l'Afrique du Sud entre autres s'abstiennent. Tous les pays s'étant abstenus représentent les 2/3 de la population mondiale.de pays

Carte des pays ayant appliqué des sanctions contre la Russie. Seuls les pays membres de l'OTAN moins la Turquie, le Japon et les pays anglo-saxons du Pacifique les appliquent.

Carte des pays ayant appliqué des sanctions contre la Russie. Seuls les pays membres de l'OTAN moins la Turquie, le Japon et les pays anglo-saxons du Pacifique les appliquent.

 

 

 

Certes, le récent vote des Nations Unies sur l’annexion illégale par la Russie des provinces du Donbass a été plus en défaveur de Moscou, mais on constate que les principaux pays du Tiers-monde se sont aussi abstenus.

 

 

 

 

Vote de la résolution de  l'Assemblée générale des Nations Unies condamnant l'annexion des provinces du Donbass par la Russie. Une majorité de pays ont voté la résolution, mais les grands pays du Tiers-monde se sont abstenus.

Vote de la résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies condamnant l'annexion des provinces du Donbass par la Russie. Une majorité de pays ont voté la résolution, mais les grands pays du Tiers-monde se sont abstenus.

 

 

 

C’est le signe d’un changement fondamental : l’Occident n’est plus le maître du jeu. Les Etats-uniens veulent isoler la Russie, ils n’y arrivent pas. C’est le contraire qui se passe !

 

 

D’ailleurs, les exigences de la globalisation anglo-saxonne rendent impossibles des accords avec un pays comme la Russie qui ambitionne d’être une grande nation politiquement et économiquement indépendante. Il suffit de s’en convaincre quand on lit les règles imposées par l’Union européenne dans l’accord de libre-échange avec l’Ukraine. Cet accord a été pris sous l’impulsion de la Pologne. Et il faut dire qu’il représente un avantage certain pour l’Union européenne : il permet de délocaliser les industries dans un pays proche avec une main d’œuvre à bon marché. C’est depuis 2009, à l’époque de la guerre russo-géorgienne que la Pologne pousse à un accord avec l’Ukraine qui pourrait aboutir à son adhésion pure et simple à l’UE. En clair, la Pologne veut faire un barrage entre l’Europe et la Russie. Cela se comprend sur le plan historique, mais c’est une grave erreur sur le plan géopolitique. On ne bâtit pas l’avenir sur les seules bases du passé !

 

Ce projet d’accord est à l’origine du conflit que nous connaissons aujourd’hui. Le gouvernement ukrainien Ianoukovitch, plutôt proche de la Russie, négocia cet accord dès 2010. Moscou fit pression sur les Ukrainiens pour qu’ils rompent cet accord. En 2013, l’Ukraine est contrainte d’y renoncer. Cependant, Ianoukovitch que la presse mainstream a accusé de tous les péchés souhaitait que l’Ukraine soit un pont entre l’Union européenne et la Russie. C’est évidemment à la suite de cette rupture qu’eut lieu la « révolution » de Maidan en 2014 qui est en réalité un coup d’Etat fomenté par les Occidentaux.

 

 

Un traité d’annexion

 

 

Les dispositions de cet accord finalement adopté en 2017 sont révélatrices de la volonté géopolitique de l’UE. Il ne s’agit pas d’un classique accord de partenariat. L’UE y impose ses propres règles. C’est « un accord de libre-échange approfondi et complet ».

 

Pierre Rimbert analyse ainsi ce traité : « Combien d’Européens ont lu ses 2 135 pages ou — à l’impossible nul n’étant tenu — franchi les ponts aux ânes introductifs sur la paix, le développement durable, la transparence, la société civile et le « dialogue interculturel » ? Gratter cette gangue, c’est découvrir ce qu’il faut bien appeler un traité d’annexion volontaire. Il se compose en premier lieu d’un « accord de libre-échange approfondi et complet » calqué sur l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1994. »

 

On y lit des dispositions typiques de la politique ultralibérale de l’Union européenne comme la sacro-sainte « libre concurrence non faussée » et : « afin d’instaurer des « relations fondées sur les principes de l’économie de marché libre » (article 3), l’Ukraine « met tout en œuvre (…) pour rapprocher progressivement ses politiques de celles de l’Union européenne, conformément aux principes directeurs de stabilité macroéconomique, de situation saine des finances publiques et de viabilité de la balance des paiements » (art. 343). En somme, la seule option autorisée sera l’austérité. Kiev « procède aux réformes administratives et institutionnelles nécessaires à la mise en œuvre du présent accord » et « met en place l’appareil administratif efficace et transparent nécessaire » (art. 56). »

 

 

En somme, c’est un traité de Maastricht à la sauce ukrainienne !

 

 

Pierre Rimbert fait d’ailleurs remarquer qu’une adhésion éventuelle de l’Ukraine à l’Union européenne n’était pas à l’ordre du jour en 2017. Or, ce traité impose à l’Ukraine de modifier sa législation pour l’adapter aux règles communes de l’UE. D’autre part, il y a un aspect stratégique dans ce document : « Inutile d’être fin stratège pour discerner l’intention géopolitique du texte : évoquer la « convergence progressive dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité, y compris la politique de sécurité et de défense commune » (art. 7), encourager la « coopération dans le domaine de l’énergie, y compris le nucléaire », recommander de « diversifier les sources, les fournisseurs, les voies d’acheminement et les méthodes de transport de l’énergie » (art. 337) à un pays largement dépendant de la Russie sonne comme un défi lancé à Moscou. D’autres articles se montrent plus offensifs encore : « L’Ukraine transpose progressivement le corpus de normes européennes (EN) en tant que normes nationales. (…) Parallèlement à cette transposition, l’Ukraine révoque toute norme nationale contraire et cesse notamment d’appliquer sur son territoire les normes inter-États (GOST) élaborées avant 1992 » (art. 56-8), soit l’ensemble des normes héritées du bloc de l’Est. Dit autrement, Bruxelles met Kiev en demeure de « dérussiser » son économie. »

 

 

Cela était évidemment inacceptable pour Moscou. Ainsi, il est clair que ce traité entre l’Union européenne et l’Ukraine est à l’origine de la guerre actuelle. Depuis le 9 novembre 1989, les Occidentaux, ou les Atlantistes veulent redessiner la carte de l’Europe en repoussant la Russie vers l’Est. L’idée de « maison commune » du dernier président de l’URSS, Mikhaïl Gorbatchev ne convenait pas au camp occidental et il y eut un chantage contre le président soviétique, chantage qui contribua à l’éliminer politiquement. Dès lors, la Russie se trouva isolée et se sentit encerclée.

 

 

D’autre part – et c’est sans doute l’aspect le plus important – ce traité au lieu d’unir, génère une division : il sépare définitivement l’Europe de l’Asie. La « maison commune » eurasiatique est morte.

 

 

 

Un esprit colonial

 

 

 

Rappelez-vous ces débats sans issue qui se déroulèrent de temps à autre au sein des instances européennes consacrés à la fixation des frontières de l’Europe. Aujourd’hui, c’est tranché : l’Europe se limite à la frontière russe. Nous l’avons vu dans notre dernier billet (https://uranopole.over-blog.com/2022/09/connaissez-vous-ursula-von-der-leyen.html ) où le chancelier Scholtz promet d’élargir l’Union européenne aux micro-Etats du Balkan, à la Moldavie, à l’Ukraine et plus tard à la Géorgie. Cela ressemble au drang nach osten de sinistre mémoire !

 

 

En plus, l’Union européenne veut imposer ses règles ultralibérales à tous ces pays qui restent encore peu développés par rapport à ceux d’Europe occidentale. C’est évidemment une source de conflits comme on l’a vu en 2015 en Grèce. Comme le rappelle Pierre Imbert : « Ces accords d’association reflètent en quelque sorte un esprit colonial », avait reconnu en 2013 un diplomate occidental en poste à Kiev ».

 

 

Pour en revenir à la guerre, les Occidentaux en inondant l’Ukraine d’armes ne font que l’entretenir. Les déclarations bellicistes d’Ursula von der Leyen opposée à tout cessez-le-feu et celles de l’argentier de Macron, Bruno Lemaire, qui veut ruiner l’économie russe sont irresponsables et traduisent une volonté d’affrontement. Or, on sait très bien que personne ne gagnera cette guerre. Alors, pourquoi continuer ? La raison l’emportera-t-elle un jour ? On peut en douter en voyant l’attitude des dirigeants des deux côtés. On peut raisonnablement penser que l’impasse est volontairement entretenue à Moscou, Kiev, Bruxelles et Washington.

 

 

 

 

 

 

Rencontre avant la guerre entre Zelensky et Poutine adulés par Macron. Ni le "Bon", ni le "Diable"...

Rencontre avant la guerre entre Zelensky et Poutine adulés par Macron. Ni le "Bon", ni le "Diable"...

 

 

 

Non, cette guerre aussi absurde qu’atroce n’oppose pas le « Bien » contre le « Mal », David contre Goliath, comme tentent de la faire accroire les médias occidentaux. Cette guerre est l’affrontement par peuples russe, ukrainien et indirectement européen interposés, entre deux empires déclinants : l’Occident globalisé et l’autocratie russe comme ukrainienne toutes deux maîtres d’une oligarchie ayant pillé ces immenses pays à leurs seuls profits. Les vraies sanctions consisteraient à confisquer les biens de tous ces oligarques russes comme ukrainiens à la côte d’Azur française, en Toscane italienne, dans les paradis fiscaux et de les restituer aux Trésors russe et ukrainien afin qu’ils les redistribuent aux deux peuples ! Utopie, évidemment ! Rien n’est fait pour écarter une fois pour toutes Poutine et Zelensky qui ne sont ni le « diable » ni le « héros » que la propagande de l’Ouest nous présente, mais qui sont chacun à la tête d’un régime dangereux : celui des oligarques et de la corruption. Zelensky comme Poutine interdisent tout parti d’opposition. Il y a de part et d’autre des prisonniers politiques. Le prix Sakharov attribué à Zelensky aurait dû l’être à Julian Assange.  

 

 

Cependant, dans l’état actuel des choses, qui les remplacerait sinon des hommes encore plus dangereux ?

 

 

 

Pierre Verhas

 

 

 

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30 septembre 2022 5 30 /09 /septembre /2022 10:17

 

 

 

Notre ami Bernard Gensane nous a autorisé à partager son article retraçant le parcours d’Ursula von der Leyen paru sur son blog (http://bernard-gensane.over-blog.com/), femme issue de la haute société germanique plongée dès son enfance dans le microcosme bruxellois des Institutions européennes à Bruxelles, son père étant à l’époque haut fonctionnaire à la Commission. Cela explique pas mal de choses. Elle est incontestablement une femme brillante, bien que son cursus universitaire où elle obtint un diplôme en économie et par après un en médecine fut malheureusement entaché d’un soupçon de plagiat.  

 

 

 

Ursula von der Leyen, la première femme présidente de la Commission européenne, est incontestablement une personnalité hors du commun...

Ursula von der Leyen, la première femme présidente de la Commission européenne, est incontestablement une personnalité hors du commun...

 

 

 

Le mystère Ursula von der Leyen

 

 

Il y a un mystère Ursula von der Leyen, l’actuelle présidente de la Commission européenne. Cette femme à la beauté froide, à la coiffure vintage et à l’élégance stricte typique des hauts technocrates des Institutions européennes a dès le départ montré une détermination peu coutumière chez les dirigeants de l’Union européenne.

 

 

Dès le déclenchement de la guerre en Ukraine, elle s’est engagée à fond outrepassant à plusieurs reprises ses compétences en cette tragédie. Ainsi, elle a décrété l’interdiction des organes de presse russes comme Sputnik et Russia Today et plus récemment, s’est farouchement opposée à l’idée d’un cessez-le-feu entre les parties belligérantes. Elle démontre ainsi un alignement systématique sur la politique étatsunienne.

 

 

On se souvient de l’incident dit « Sofagate » à Ankara où Ursula von der Leyen a déclenché un mini-scandale parce qu’elle a considéré que le siège qui lui était attribué lors de l’entretien avec Erdogan était trop éloigné de celui du président du Conseil, Charles Michel. Réaction très astucieuse de sa part : elle s’attira les félicitations des féministes et mit en porte-à-faux Charles Michel qui lui faisait de l’ombre.

 

 

 

 

En provoquant le fameux Sofagate, Ursula von der Leyen a piégé Charles Michel, le Président du Conseil européen !

En provoquant le fameux Sofagate, Ursula von der Leyen a piégé Charles Michel, le Président du Conseil européen !

 

 

Une des grandes faiblesses des Institutions européennes est sa direction bicéphale et Ursula von der Leyen sait en user de main de maître en ramenant à elle tous les pouvoirs passant outre les traités européens qui sont selon son prédécesseur, le Luxembourgeois Claude Juncker, la quintessence de la démocratie.

 

 

Son autoritarisme a surpris tout le monde. Elle en use à l’envi. Cela dit, et Charles Michel l’avait rappelé (voir « règlement de comptes à OK Berlaymont » https://uranopole.over-blog.com/2022/09/morceaux-d-humeur-du-4-septembre-2022.html ), sa fuite en avant ne lui permet pas de prendre les décisions qui s’imposent en matière d’inflation et de crise énergétique. Les organisations syndicales l’ont rappelé récemment à Bruxelles et – ce qui aura sans doute plus d’effet – le patronat commence à s’énerver. Et on ne voit rien venir du côté de la Commission.

 

 

Deuxième pierre dans le jardin d’Ursula Albrecht – von der Leyen : la victoire de l’extrême-droite en Italie qui pourrait faire tache d’huile dans d’autres Etats-membres de l’UE. Un groupe de 89 députés Lepénistes en France, la majorité absolue promise aux nationalistes flamands en Belgique dont la plus importante formation est le néo-nazi Vlaams Belang (Bloc flamand).

 

La guerre en Ukraine où elle pousse à un élargissement rapide de l’UE, l’atlantisme forcené de la présidente de la Commission, son inaction face à la crise inflationniste et à la crise énergétique sont des signes très inquiétants. On peut se poser une question : que cherche Ursula ?

 

 

Un discours révélateur

 

La réponse se trouve peut-être dans le discours prononcé à Prague le 29 août dernier par le chancelier allemand social-démocrate Olaf Scholz. Il a appelé à bâtir une Union européenne élargie et militarisée sous l’impulsion de l’Allemagne. Il a affirmé que l’opération russe en Ukraine soulevait la question de savoir "où sera la ligne de démarcation à l’avenir entre cette Europe libre et une autocratie néo-impériale". Nous ne pouvons pas nous contenter de regarder, a-t-il dit, « des pays libres être rayés de la carte et disparaître derrière des murs ou des rideaux de fer. » (voir Diana Johnstone – Le spectre de l’Allemagne se lève (Consortium News) – Le Grand Soir - https://www.legrandsoir.info/le-spectre-de-l-allemagne-se-leve-consortium-news.html )

 

 

Le chancelier Sholz veut remilitariser l'Allemagne et l'Union européenne tout en l'élargissant de 27 à 36 membres !

Le chancelier Sholz veut remilitariser l'Allemagne et l'Union européenne tout en l'élargissant de 27 à 36 membres !

 

 

 

Scholz a déclaré à son auditoire européen dans la capitale tchèque : "Je m’engage à élargir l’Union européenne aux États des Balkans occidentaux, à l’Ukraine, à la Moldavie et, à long terme, à la Géorgie". Il est un peu étrange de s’inquiéter du déplacement de la ligne de démarcation vers l’ouest par la Russie alors que l’on prévoit d’intégrer trois anciens États soviétiques, dont l’un (la Géorgie) est géographiquement et culturellement très éloigné de l’Europe mais aux portes de la Russie.

 

Dans les "Balkans occidentaux", l’Albanie et quatre petits États extrêmement faibles issus de l’ex-Yougoslavie (Macédoine du Nord, Monténégro, Bosnie-Herzégovine et Kosovo largement non reconnu) produisent principalement des émigrants et sont loin des normes économiques et sociales de l’UE. Le Kosovo et la Bosnie sont des protectorats de facto de l’OTAN, occupés militairement. La Serbie, plus solide que les autres, ne montre aucun signe de renoncement à ses relations spécifiques avec la Russie et la Chine, et l’enthousiasme populaire pour « l’Europe » parmi les Serbes s’est estompé. Cependant, la Serbie se trouvera isolée.

 

L’ajout de ces États membres permettra de réaliser « une Union européenne plus forte, plus souveraine et plus géopolitique », a déclaré M. Scholz. Une « Allemagne plus géopolitique », plutôt. Alors que l’UE s’élargit vers l’est, l’Allemagne se trouve « au centre » et fera tout pour les rassembler. Ainsi, outre l’élargissement, M. Scholz appelle à « un passage progressif aux décisions à la majorité en matière de politique étrangère commune » pour remplacer l’unanimité requise aujourd’hui. Cela signifie que plus personnes ne pourra s’opposer à cette politique étrangère dictée par l’Allemagne avec la bénédiction de Washington !

 

Scholz ajoute qu’il ne veut pas d’une « UE d’États ou de directorats exclusifs ». Avec une UE de 30 ou 36 États, note-t-il, « une action rapide et pragmatique est nécessaire. » Et il peut être sûr que l’influence allemande sur la plupart de ces nouveaux États membres pauvres, endettés et souvent corrompus produira la majorité nécessaire.

 

« Chaque amélioration, chaque unification des structures de défense européennes dans le cadre de l’UE renforce l’OTAN », a déclaré Scholz. « Avec d’autres partenaires de l’UE, l’Allemagne veillera donc à ce que la force de réaction rapide prévue par l’UE soit opérationnelle en 2025 et fournira alors également son noyau.

 

Cela nécessite une structure de commandement claire. L’Allemagne assumera cette responsabilité lorsque nous dirigerons la force de réaction rapide en 2025 », a conclu le chancelier. Il a déjà été décidé que l’Allemagne soutiendrait la Lituanie avec une brigade rapidement déployable et l’OTAN avec d’autres forces en état de préparation élevé.

 

La fin de l’idée européenne

 

Une chose est claire en tout cas, l’actuelle fuite en avant d’Ursula von der Leyen dans le dossier de la guerre en Ukraine s’inscrit clairement dans ce projet dessiné par le chancelier fédéral allemand !

 

 

 

Altiero Spinelli ancien résistant antifasciste, fondateur de l'Union européenne est bien oublié aujourd'hui (photo CVCE.eu)

Altiero Spinelli ancien résistant antifasciste, fondateur de l'Union européenne est bien oublié aujourd'hui (photo CVCE.eu)

 

 

 

 Cela correspond-il au vieux rêve d’union européenne des pères fondateurs comme Altiero Spinelli ? (voir Uranopole : https://uranopole.over-blog.com/article-l-union-europeenne-un-danger-pour-la-democratie-118844356.html ). Non, elle est morte l’idée d’une Europe fédérale et démocratique telle que l’avaient voulu ces hommes issus de la Résistance contre le fascisme comme Spinelli en Italie, Camus en France, Orwell en Grande Bretagne.

 

Il est loin le manifeste de Ventotene !

 

Pierre Verhas

 

 

 

Connaissez-vous Ursula von der Leyen ?

 

 

 

Il faut reconnaître à la présidente de la Commission européenne deux qualités : en politique, elle n’a pas besoin de boussole. Á droite toute – mais attachée à un certain progrès social – le regard vers les États-Unis. Et puis cette atlantiste forcenée est aimée de notre banquier jet-skieur. C’est lui qui l’a imposée – on ne sait pourquoi officiellement – à Angela Merkel, contre la volonté de la classe politique allemande. Un tour de force d’autant plus exceptionnel qu’Ursula n’avait jamais été élue nulle part. Le SPD a évoqué un « exemple sans précédent de tricherie politique qui rend absurde le processus de démocratisation de l’Union européenne ».

 

 

Ursula est la fille d’Ernst Albrecht qui fut vice-président fédéral de la CDU et ministre-président (de droite) de Basse Saxe de 1976 à 1990. Elle naquit à Bruxelles car son père y était alors fonctionnaire européen (avant de devenir PDG de Bahlsen). C’est là qu’elle passa son enfance où elle fréquenta l’École européenne et devint une cavalière de compétition. Avec les Albrecht, nous sommes dans une famille de négociants patriciens de la grande bourgeoisie allemande, avec des connexions aristocratiques depuis le XVIIe siècle. On connaît le café Albrecht et les magasins Aldi. Ursula a également une arrière-grand-mère étasunienne et des ancêtres français et italiens. On trouve dans son ascendance paternelle des juristes, des médecins, des universitaires, de très riches négociants.

 

 

 Au moment où l’esclavage fut aboli aux États-Unis, son ancêtre James H. Ladson possédait 200 esclaves. La mère d’Ursula était également bien née. Elle mourut malheureusement d’un cancer et de la maladie d’Alzheimer en 2002, mais celle-ci ne fut révélée par sa fille qu’en 2008.

 

 

Ursula passa un baccalauréat en mathématiques et en sciences, puis étudia les sciences économiques aux universités de Göttingen et Münster avant de fréquenter la London School of Economics sous un nom d’emprunt, protégée par Scotland Yard, son père étant menacé par la Fraction armée rouge. Elle entreprit par la suite des études de médecine et obtint le titre de docteur en 1991, avant de rejoindre pour quatre ans l’université Stanford où elle suivit des cours d’économie, mais sans suivre un cursus formel. Sa thèse de médecine fera l’objet d’une longue controverse en 2015 : un site anti-plagiat déclarera avoir trouvé 27 pages suspectes. L’université ouvrira une procédure formelle à la fin de laquelle il sera décidé de ne pas lui retirer son titre. Plusieurs experts afficheront leur désaccord.

 

 

En 1986, Ursula épouse le médecin Heiko von der Leyen, issu d’une famille qui a fait fortune dans la soie.

 

 

Ursula est nommée par Angela Merkel en 2005 ministre de la Famille. Elle met en œuvre une politique sociale : elle institue un salaire parental de deux mois pour les pères et augmente le nombre de crèches. Elle se prononce contre les sites pédopornographiques, écopant du sobriquet Zensursula (censursula). Elle soutient l’instauration d’un salaire minimum, ainsi que des quotas pour les femmes au sein des conseils d’administration. Elle est nommée ministre du Travail en 2009, puis ministre de la Défense en 2013, première femme à occuper cette fonction régalienne. Elle est reconduite en 2018 mais est nommée présidente de la Commission européenne en 2019. Avant cela, en 2014, elle milite pour une politique étrangère plus ferme de l’Allemagne. Elle valide l’envoi d’armes aux forces armées kurdes et irakiennes, ce qui rompt la tradition allemande de ne jamais exporter d’armes vers une zone de conflit.

 

 

En tant que responsable européenne, Ursula von der Leyen ne risque pas de faire contre-poids à la puissance des États-Unis. Elle s’aligne complètement sur les positions étasuniennes en matière de géopolitique et militaire. Déjà lorsqu’elle était ministre allemande de la Défense, elle avait obtenu une hausse de 35% des dotations de l’Allemagne à l’OTAN (l’Allemagne est aujourd’hui le second contributeur après les EU) et avait obtenu que le général allemand Jürgen Weigt soit nommé commandant en chef de l’Eurocorps. La servilité d’Ursula vis-à-vis des États-Unis n’est sûrement pas sans rapport avec sa promotion inattendue et ultra-rapide à la présidence de la Commission européenne.

 

 

Lorsqu’elle est nommée le 16 juillet 2019 présidente de la Commission, sans l’appui d’Angela Merkel (elle obtient 51% des voix, élue grâce aux suffrages d’extrême droite des Polonais de Droit justice et de ceux ambigus du Mouvement 5 étoiles), elle est auditionnée par les groupes du Parlement européen. Á noter qu’elle prononce son premier grand discours en anglais, qui n’est que la seconde langue de la République d’Irlande. Selon Le Point, elle en reste à des généralités qui ne mangent pas de pain. Elle permet aux Britanniques de négocier leur Brexit pendant le temps qu’ils voudront, ce qui a le don d’irriter notre banquier jet-skieur. Elle se dit favorable à un salaire minimum, mais également à l’entrée de la Moldavie où le smic est à 42 euros par mois… Ursula est bien au-dessus de ses considérations, elle qui emprunte à tour de bras des avions privés sur des petites distances.

 

 

 

Ursula est favorable à des « États-Unis d’Europe », sur le modèle de l’État suisse, de l’Allemagne ou des États-Unis. Elle vise en fait une harmonisation des questions financières, de la fiscalité et de la politique économique.

 

 

 

En janvier 2022, une enquête menée par un organisme de surveillance de l’UE sur les SMS envoyés par Ursula von der Leyen au PDG de Pfizer a conclu que l’UE était coupable de « mauvaise administration ». L’eurodéputée néerlandaise Sophie in’ t Veld déclara que la Commission était devenue moins transparente avec von der Leyen. Selon The Guardian, Pfizer a signé plusieurs contrats avec la Commission pour son vaccin qui a été critiqué pour les prix élevés négociés pour les vaccins à ARNm Covid .

 

 

Bernard Gensane

 

 

 

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3 septembre 2022 6 03 /09 /septembre /2022 20:07

 

 

 

Règlements de comptes à OK Berlaymont (1)

 

Le Président du Conseil européen, l’ancien Premier ministre belge Charles Michel, voudrait-il la peau de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen ? On pourrait le penser à la lecture de l’interview qu’il a donné au quotidien bruxellois « Le Soir » de ce week-end.

 

Il faut bien dire qu’il y a de quoi. Depuis le début de la guerre en Ukraine, Ursula s’est déchaînée. Elle a même outrepassé ses compétences en décrétant l’interdiction des organes de presse russes, la radio Russia Today et l’agence Sputnik, en faisant pression pour un embargo total sur le gaz russe, en prenant une série de décisions sans consulter le Conseil et les Etats-membres. Depuis qu’ils sont aux affaires européennes, Charles Michel et Ursula von der Leyen s’étripent à qui mieux mieux. Il n’y a pas eu que le fameux « Sofagate » où Erdogan a humilié la présidente de la Commission en présence de Charles Michel qui s’est laissé berner comme un bleu (qu’il est politiquement…) ! Pour reprendre une vieille expression : tous deux sont d’accord pour dire qu’ils ne sont d’accord sur rien !

 

 

 

Le Belge Charles Michel, le Président du Conseil européen et l'Allemande Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne : "Je t'aime moi non plus !"

Le Belge Charles Michel, le Président du Conseil européen et l'Allemande Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne : "Je t'aime moi non plus !"

 

 

 

Aujourd’hui, concernant l’énergie, le quotidien bruxellois relate :

 

« Concrètement, Charles Michel n’apprécie guère l’intention, que l’on prête à la présidente de la Commission européenne, de réserver les scénarios pour contrer la flambée des prix pour le 14 septembre, lorsqu’elle prononcera son discours sur l’état de l’Union devant le Parlement européen, à Strasbourg : « On ne peut pas attendre jusque-là. » Pas plus qu’il ne goûte les fuites de documents de travail circulant au sein de l’exécutif communautaire, qu’il refuse d’ailleurs de commenter. « Pour l’instant, la Commission ne propose rien sur le sujet. Ce que je souhaiterais, c’est qu’il y ait, le plus vite possible, des propositions transparentes exprimées par la Commission. C’est le principe de la transparence démocratique que l’Union européenne doit incarner. Et, pour rappel, il y a une réunion des ministres de l’Energie le 9 septembre. »

 

Assez piquant qu’un libéral pur jus critique une politique libérale… Mais ce n’est pas tout :

 

« C’est une situation qu’on ne découvre pas aujourd’hui, elle date même d’avant la guerre en Ukraine », insiste le président du Conseil européen. Egrenant les conclusions des Sommets de mars, mai et juin, au cours desquels l’énergie était au cœur des débats entre chefs d’Etat et de gouvernement. La preuve par les conclusions. « De manière unanime, nous avons invité la Commission à faire des propositions sur les trois sujets clés en matière énergétique. Pour la consommation, il était très judicieux que la Commission émette, en juillet, des recommandations pour réduire de 15 % la consommation de gaz. Mais je pense qu’on doit aller plus loin et qu’il serait utile que la Commission fasse aussi rapidement des recommandations pour réduire la consommation d’électricité. »

 

Enfin :

 

« Reste le troisième élément du débat, le plus criant en cette rentrée : la flambée des prix. « Là je suis très ferme. Depuis de très nombreux mois, les chefs d’Etat et de gouvernement ont invité la Commission à travailler sur cette question. Pour être clair, sur le plafonnement des prix et sur le probable nécessité de réformer le marché de l’électricité. Il est certain qu’il n’y avait pas de consensus sur le type de décision qu’on devait prendre, mais il y avait un consensus pour inviter la Commission à venir avec des propositions précises. » Une critique en règle ? « Ce n’est pas une critique, c’est un appel ! Pas de Charles Michel mais des chefs d’Etat et de gouvernement. Il y a une impression que la Commission a perdu du temps, et c’est regrettable. (…) Un retard imputable, peut-être, à la technicité et la difficulté (au risque, disent certains) d’une réforme du marché de l’électricité ? « Les difficultés techniques c’est le quotidien de l’Union européenne, balaie le président du Conseil européen. Je ne peux pas accepter que ce soit un frein. Aujourd’hui, avec des prix du gaz multipliés par dix ou douze, le système déraille. Les prix de l’électricité augmentent. Et des entreprises ont des profits démesurés. Avant l’été, dans une certaine bureaucratie bruxelloise, vivait l’idée que, finalement ce n’était pas si mal que cela. Parce que ces entreprises allaient probablement réinvestir massivement dans la transition énergétique. Un état d’esprit déconnecté des réalités politiques, démocratiques. Je pense qu’en septembre, les ministres doivent ramener la dynamique démocratique politique dans tous les esprits. »

 

Et Charles Michel tire le signal d’alarme.

 

« Les Etats sont en train de s’appauvrir : 280 milliards d’euros ont été mobilisés, selon le think thank Bruegel, par les Etats, pour atténuer les effets de la crise énergétique sur les entreprises et sur les citoyens. Les citoyens souffrent, les entreprises souffrent, les Etats souffrent et quelques entreprises qui produisent de l’énergie font des superprofits. Je ne nie pas que le sujet est complexe. Mais il est inacceptable de rester les bras ballants. Et c’est difficile à expliquer que, depuis mars, il n’y a pas eu de propositions opérationnelles un peu sérieuses sur la table. »

Un plaidoyer dicté, aussi, par la crainte de tensions sociales ? « Oui, c’est pour ça que je plaide pour que l’on prenne rapidement des décisions. On doit tout faire pour garantir la cohésion de nos sociétés. Nous sommes dans un cercle vicieux qu’il faut briser. Les prix de l’énergie, bien plus élevés en Europe que partout ailleurs dans le monde, alimentent l’inflation, qui alimente la pauvreté, réduit la croissance et menace l’emploi. » Sans compter les menaces pour la démocratie. « Les autocraties, la Russie en premier lieu, mais pas seulement, sont obsédées par cette idée de faire la démonstration que le modèle démocratique ne peut pas produire du succès, du bien-être. L’un de leurs objectifs stratégiques, c’est d’essayer de créer des tensions sociales majeure. »

 

Autrement dit c’est la panique ! On dit que la peur est mauvaise conseillère. Ici, c’est plutôt l’inverse. Les craintes exprimées par le Président Michel sont tout à fait justifiées. Et il pointe du doigt les énormes défauts des institutions européennes.

 

 

 

Jean-Pierre Hansen ancien patron d'Electrabel absorbé par Engies

Jean-Pierre Hansen ancien patron d'Electrabel absorbé par Engies

 

 

 

La technocratie européenne vit depuis des années dans sa tour d’ivoire et se refuse à voir la réalité. Tout est dicté par l’idéologie du « tout au marché ». Comme l’a dit au « Soir » de ce jour Jean-Pierre Hansen, ancien patron d’Electrabel absorbé depuis par Engies : « L’Europe regarde l’électricité comme elle regarde un tube de dentifrice ». Donc quel que soit le produit ou le service, il doit répondre à la même loi absolue qui s’applique à tout ! Dès lors, il n’y a plus d’esprit démocratique au sein des institutions de Bruxelles. Elles sont au service des lobbies – dont les lobbies énergétiques – qui gangrènent les institutions dont la caractéristique est l’opacité la plus complète. Les décisions prises par la Commission consistent en des diktats assortis de sanctions à l’égard des Etats-membres. Par exemple, il est assez piquant de voir les pressions exercées sur la Pologne et la Hongrie pour « illibéralisme », alors que la Commission elle-même n’a aucun respect pour les règles démocratiques les plus élémentaires.

 

Cette intransigeance de Bruxelles cache mal une inquiétante faiblesse. Charles Michel le dénonce en reprochant à la Commission sa passivité dans cette grave crise énergétique qui aura sous peu des conséquences dramatiques si on ne prend pas des décisions fermes de réforme du marché de l’énergie – gaz comme électricité – de plafonnement des prix.

 

Il est aussi indispensable de négocier sérieusement une stabilisation des prix avec les fournisseurs d’énergie ainsi qu’une sécurité d’approvisionnement, y compris avec la Russie de Poutine, d’autant plus que Gazprom vient de couper toutes ses fournitures de gaz à l’Europe ! On négocie bien avec Mohammed Ben Salman mis jusqu’il y a peu au ban de la « communauté » internationale pour l’assassinat d’un journaliste ! Cela implique une autre attitude géopolitique que l’alignement systématique sur celle des Etats-Unis. Si, déjà, l’Europe donne des signes d’indépendance à l’égard de la puissance étatsunienne, elle sera plus forte. Mais, cela tient du wishfull thinking.

 

En plus de l’énergie, ne perdons pas de vue le danger d’une crise alimentaire mondiale due à la guerre en Ukraine qui bloque l’exportation de céréales et d’autres produits agricoles comme l’huile de tournesol vers des pays, comme ceux du Maghreb, qui en ont un besoin vital et qui a déjà des conséquences en Europe par l’inflation galopante résultant de cette guerre et de la passivité des autorités européennes nationales comme européennes.

 

À propos de passivité, l’économiste belge Bruno Colmant, lui aussi, lance un signal d’alarme pas plus tard qu’aujourd’hui via Twitter :

 

 

 

Bruno Colmant se montre très inquiet, à juste titre, pour l'avenir proche. (cliché l'Echo)

Bruno Colmant se montre très inquiet, à juste titre, pour l'avenir proche. (cliché l'Echo)

 

 

 

« Si 20 % des Belges rencontrent un des trois critères de pauvreté, ce pourcentage passera à 35-40 %. Les banques alimentaires voient une augmentation de 15 % des demandes, les CPAS vont imploser. Mais il y a autre chose de plus profond, et dont le sentiment et l’intuition m’avaient traversé en 2020 lors des premiers lock-downs liés au Covid. C’est la perte de lien d’obéissance (je sais le terme mal choisi et je devrais plutôt parler de coopération). Il y a, de plus en plus, une rupture du respect à l’État, à l‘employeur, à la citoyenneté, etc. Si cette intuition se confirme, alors un mouvement de rébellion silencieuse pourrait apparaître qui conduit les ménages à ne plus payer, par impossibilité financière, mais aussi par affront, leurs impôts et leurs factures énergétiques. Si cette réalité, que j’espère voir éviter, se concrétise, alors ce seront les distributeurs d’énergies, et ensuite les banques et l’État qui en seront les victimes. Je crois que la paix et l’ordre sociaux sont infiniment plus fragiles qu’on ne le postule.   

L’humaniste français de la Renaissance François Rabelais (1494-1553) écrivait que : « La moitié du monde ne sait comment l’autre vit ». En 2023, il ajouterait aujourd’hui qu’un tiers de la population est devenue invisible. Mais cela ne va pas durer.
 »

 

Charles Michel comme Bruno Colmant ont raison de tirer le signal d’alarme, mais les dirigeants européens sont-ils capables de définir une politique cohérente et forte pour sortir de cette crise majeure pour l’ensemble du continent européen, avant que la poudrière n’éclate ?  Wait and see.

 

 

PV

  1. Le Berlaymont est le siège bruxellois de la Commission européenne.

 

 

 

Exit Mikhail Gorbatchev

 

 

Le dernier Grand du XXe siècle vient de disparaître à Moscou à l’âge de 91 ans. Il n’est pas reconnu par ses successeurs, il n’a même pas eu droit à des funérailles nationales. Il est vrai que l’actuel président russe n’a guère l’envergure de celui qui réforma fondamentalement l’Europe et la Russie qui était encore l’URSS, qui arrêta la folle course aux armements, qui libéra tous les prisonniers politiques, qui chercha à installer une social-démocratie à la scandinave dans son immense pays.

 

Dès son accession au pouvoir en 1985, Gorbatchev savait que la situation de son pays continent était catastrophique. C’est la raison pour laquelle il lança la fameuse perestroïka – restructuration – qui consista à libéraliser l’économie soviétique paralysée par la nomenklatura. Il est vrai que cela n’alla pas tout seul et que cette réforme était mal préparée, ce qui ouvrit le chemin aux oligarques – beaucoup d’entre eux faisant partie de la nomenklatura – et provoqua de sérieux trouble sociaux. Il lança également la glasnost ; réforme politique destinée à favoriser le passage vers un régime démocratique. Il fit également libérer les prisonniers politiques qui croupissaient dans le Goulag.

 

 

 

Mikhail Gorbatchev, le dernier Grand du XXe siècle

Mikhail Gorbatchev, le dernier Grand du XXe siècle

 

 

 

Sur le plan international, il négocia pour arrêter la folle course aux armements dont les conséquences étaient dramatiques pour l’économie soviétique et consistaient en un danger majeur pour le monde. Ce changement fondamental de politique eut un grand retentissement dans le glacis de l’Europe centrale. C’est la Tchécoslovaquie qui lança le mouvement en ouvrant sa frontière avec l’Autriche. Ainsi, les Trabans – ces petites voitures à moteur deux temps fabriquées en Allemagne de l’Est – déferlèrent sur l’Europe occidentale. Le mouvement était dès lors irréversible. La ville de Leipzig connut un soulèvement populaire qui s’étendit à toute la RDA et particulièrement à Berlin Est. Le 9 novembre 1989, le Mur tomba. La réunification allemande était désormais irréversible. Suivit la Roumanie de Ceausescu et tous les autres pays d’Europe centrale. Et Gorbatchev ne fit rien pour entraver ce mouvement. Ce fut un bouleversement considérable : à l’époque, il était inimaginable que le bloc de l’Est comme on l’appelait, puisse s’effondrer aussi rapidement et quasi pacifiquement.

 

Mikhail Gorbatchev souhaitait un rapprochement entre l’URSS et l’Europe. Il parlait de « maison commune ». Mais il se heurta à un silence poli de la part des Occidentaux. Les USA étaient farouchement opposés à un rapprochement entre l’Europe et la Russie. Ils le sont d’ailleurs toujours. C’est une des causes de l’actuelle guerre en Ukraine.

 

Le secrétaire général soviétique fut invité au G7 à Londres. Il espérait une aide des Occidentaux pour mener à bien son projet de démocratisation. Au contraire, il reçut une volée de bois vert. Il était exigé qu’il mène une politique ultralibérale de privatisation, d’ouverture des frontières au libre-échange, de démantèlement des mesures sociales. Gorbatchev fut contraint de s’incliner. C’est sans doute à partir de ce moment là que les relations entre la Russie et l’Occident se détériorèrent définitivement.

 

On connaît la suite. Un putsch militaire tenta de renverser le secrétaire général. Le maire de Moscou de l’époque, Boris Eltsine, s’imposa. Gorbatchev était définitivement affaibli. Il démissionna en 1991. Eltsine dissout l’Union Soviétique, accorda l’indépendance à l’Ukraine, à la Géorgie et à la Biélorussie. La guerre se déclencha en Tchétchénie. Bref, l’empire était disloqué. Ses restes revinrent aux mains des oligarques. Eltsine miné par l’alcool et sans aucun appui dut s’en aller. Ce fut le tour de Poutine, ancien agent du KGB et représentant une partie de l’oligarchie.

 

Aujourd’hui, trop tard comme toujours, on se rend à l’évidence : on aurait dû écouter Mikhail Gorbatchev.

 

 

Pierre Verhas

 

 

 

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30 août 2022 2 30 /08 /août /2022 09:44

 

 

À la veille de la rentrée, on ne parle plus beaucoup de Julian Assange. Pourtant, c’est dans le courant du mois de septembre que la Haute Cour va statuer sur son appel. On parle aussi beaucoup de Salman Rushdie victime d’un attentat que la plupart considérait comme impossible.

 

Qu’y a-t-il de commun entre ces deux hommes ? Ils sont tous les deux traqués. Le premier par les néoconservateurs étatsuniens, le second par les sbires de l’islamisme radical. Ils sont tous les deux traqués pour avoir usé de la liberté d’expression. L’un en révélant des crimes de guerre commis en Afghanistan et en Irak par la plus grande puissance mondiale en usant avec l’aide d’un jeune lanceur d’alerte devenu une, Chelsea Manning, d’une nouvelle forme d’investigation par l’informatique qu’il maîtrise avec brio. L’autre parce que dans un roman, il a réveillé une ancienne polémique religieuse de l’Islam qui au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe fit l’objet de nombreuses exégèses de savants européens comme musulmans sans aucune menace de censure ou d’attentats. Pour les fanatiques de l’Islam aujourd’hui, il en est tout autre : il est interdit de réveiller cette controverse qui souille la pureté de leur religion, autrement dit le dogme religieux ne souffre aucune critique.

 

 

 

 

Salman Rushdie et Julian Assange, même combat

Salman Rushdie et Julian Assange, même combat

 

 

La différence entre Assange et Rushdie

 

 

La différence entre Assange et Rushdie se trouve parmi ceux qui les soutiennent. L’écrivain anglo-indien est assuré de l’appui de l’establishment occidental. Ainsi, comme le rappelle le journaliste Jonathan Cook, à la suite de l’attentat du 12 août à l’ouest de New York : « Le Premier ministre britannique Boris Johnson s'est dit "consterné que Sir Salman Rushdie ait été poignardé alors qu'il exerçait un droit que nous ne devrions jamais cesser de défendre". Son chancelier, Rishi Sunak, l'un des deux derniers prétendants à la couronne de Johnson, était d'accord, estimant que le romancier est "un champion de la liberté d'expression et de la liberté artistique".

 

 

Outre-Atlantique, le président Joe Biden a souligné les qualités de Rushdie : « La vérité. Courage. Résilience. La capacité de partager des idées sans peur… Nous réaffirmons notre attachement à ces valeurs profondément américaines en solidarité avec Rushdie et tous ceux qui défendent la liberté d'expression. »

 

 

La vérité est que la grande majorité de ceux qui prétendent qu'il s'agit d'une attaque non seulement contre un écrivain de premier plan, mais aussi contre la société occidentale et ses libertés, ont disparu au cours des dernières années alors que la plus grande menace à ces libertés se déployait. Ou, dans le cas des chefs de gouvernement occidentaux, ils ont activement conspiré pour saper ces libertés. »

 

 

Ce sont d’ailleurs ces mêmes personnages qui, s’apitoyant sur le sort de Salman Rushdie, traquent Julian Assange en violation des principes fondamentaux des Droits humains et de la Justice. En définitive, les deux affaires s’inscrivent dans un contexte géopolitique.

 

Tout d’abord, elles montrent la puissance colossale des néoconservateurs étatsuniens qui arrivent à imposer leur loi dans des pays étrangers. Ainsi, la Justice britannique a cédé à la pression US dans l’affaire Assange.

 

 

On peut aussi se poser une question – qui est une pure hypothèse – au sujet du sort de Salman Rushdie. Si la fatwa condamnant l’écrivain anglo-indien émanait d’une des monarchies pétrolières de la Péninsule arabique et non d’Iran, les USA et la Grande Bretagne auraient-ils réagi avec la même fermeté pour le défendre et le protéger ?

 

 

Ainsi, l’hypothèse a été émise que la tentative d’assassinat contre Rushdie aurait été téléguidée par le Mossad dans le but de torpiller l’éventualité d’un accord sur le nucléaire entre les USA et l’Iran. On sait que les Israéliens sont violemment opposés à tout accord en la matière. Cette possibilité n’a pas été émise dans site « complotiste » mais par le très sérieux quotidien israélien le « Jerusalem Post ». L’Iran est l’ennemi juré des néoconservateurs étant proche de la Russie, tandis que les monarchies pétrolières sont cajolées dont particulièrement celle d’Arabie Saoudite alors qu’il est démontré que le prince héritier d’Arabie Saoudite, le fameux MBS, est un assassin.

 

 

Julian Assange a commis un sacrilège...

 

 

Julian Assange, lui, a commis un sacrilège en révélant les documents secrets sur les guerres d’Afghanistan et d’Irak. Pour l’establishment néoconservateur, cet acte en définitive journalistique est impardonnable.

 

 

La procédure judiciaire britannique en est actuellement à sa quatrième année, quatre années au cours desquelles Assange a été incarcéré dans la prison à sécurité maximale de Belmarsh à Londres. Pendant la grande majorité de cette période, il a été détenu en détention provisoire, sans avoir été reconnu coupable d'un crime en Grande-Bretagne.

 

 

Les audiences depuis janvier de l'année dernière se sont essentiellement concentrées sur la santé d'Assange. Les tribunaux anglais refusant un débat sur le fond ! La réalité de sa détérioration physique et psychologique, résultant de plus d'une décennie de persécution, a été balayée par les procureurs de la Justice britannique, malgré les avertissements de nombre de médecins craignant qu’Assange ne meure derrière les barreaux en plus de l’avis de la juge du tribunal de première instance qui a estimé que l'extradition constiterait un risque mortel pour l’accusé.

 

 

En définitive, Rushdie et Assange font l’objet chacun d’une fatwa qui ne sera jamais abrogée ou prescrite : le premier pour avoir rappelé avec humour des divergences qui apparaissaient dans le texte sacré du Coran, le second pour avoir, par la diffusion de documents irréfutables, percé les secrets de l’armée étatsunienne et avoir montré ses crimes de guerre. Comme l’écrit Jonathan Cook : « Le droit à la vie de Rushdie a été menacé par des religieux et des gouvernements éloignés pour avoir remis en question la base morale de leur pouvoir. Le droit à la vie d'Assange est menacé par les gouvernements occidentaux parce qu'il a remis en question le fondement moral de leur pouvoir. »

 

 

Or, l’enjeu dans l’affaire Assange est la liberté de la presse, donc, la liberté d’expression, donc la démocratie, tout simplement. L’enjeu dans l’affaire Rushdie est la liberté de critique de la religion ou de tout autre conviction philosophique, donc la liberté d’expression, donc la démocratie, tout simplement.

 

 

On le voit. La démocratie, du moins ce qu’il en reste, est aux soins palliatifs.

 

 

Alors, quoi ? La lutte continue, tout simplement…

 

 

Pierre Verhas

 

 

 

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20 août 2022 6 20 /08 /août /2022 09:28

 

 

 

L’offensive contre les Lumières est lancée depuis quelques décennies et vient de prendre une nouvelle et dangereuse tournure.

 

À commencer par l’attentat ce 12 août 2022 dans l’Etat de New York blessant grièvement l’écrivain anglo-indien Salman Rushdie condamné par une « fatwa » de feu l’ayatollah Khomeiny, alors dictateur religieux de l’Iran, en 1989.

 

 

 

Salman Rushdie est devenu le symbole universel du combat pour les Lumières

Salman Rushdie est devenu le symbole universel du combat pour les Lumières

 

 

 

Condamné pour un roman ! Condamné pour avoir critiqué et raillé la religion musulmane ! Condamné pour sa libre expression ! L’exécuteur des basses œuvres est un jeune fanatique (on dit en novlange « radicalisé ») qui a exécuté la sentence. Heureusement, il n’a pas réussi son coup. Néanmoins, gravement blessé, on ignore encore si l’écrivain âgé de 75 ans pourra reprendre ses activités.

 

Le professeur Jean-Philippe Schreiber dans un texte admirable paru ce 16 août dans sa chronique sur Facebook écrit : « … la question qui me préoccupe est plus essentielle encore que sa personne : elle réside dans le fait que pour certains, imbus de leur pauvre et lamentable idée de la pureté, c’est la littérature tout court qui devrait ainsi mourir assassinée sur une scène de l’État de New York. Leur obsession : tuer le verbe qui n’est pas Le Verbe, pire, tuer le verbe qui ose défier Le Verbe, l’unique à leurs yeux. »

 

Oui ! Cette abominable quête de la pureté moteur des pires exactions est un fléau très ancien qui renaît de ses cendres en notre époque troublée.

 

La seconde victime du moment est… Voltaire !

 

 

 

La statue de Voltaire qui se trouvait dans les jardins de l'Académie a été retirée pour être restaurée. Elle n'est toujours pas revenue.

La statue de Voltaire qui se trouvait dans les jardins de l'Académie a été retirée pour être restaurée. Elle n'est toujours pas revenue.

 

 

La statue d’un des pères des Lumières trônait depuis 1962 square Honoré Champion dans le 6e arrondissement de Paris tout près de l’Académie française dont il fut membre. Dans le cadre de la campagne « wokiste » pour effacer toute trace de l’ère coloniale, elle fut taguée en même temps que celle de Colbert au Palais Bourbon. La sculpture de Voltaire a été déplacée en août 2020 pour être restaurée. Depuis, elle n’a pas été réinstallée à son endroit initial. Reste le socle gravé au nom de Voltaire. La secrétaire perpétuelle de l’Académie français, Madame Hélène Carrère d’Encausse s’en est inquiétée. La maire de Paris, Anne Hidalgo, tergiverse. Manifestement, elle n’a pas l’intention de replacer cette œuvre à sa place initiale. Elle envisage de la placer près de la Faculté de médecine où cette statue serait protégée par une grille.

 

 

 

Hélène Carrère d'Encausse, la secrétaire perpétuelle de l'Académie française est en colère contre la maire de Paris, Anne Hidalgo.

Hélène Carrère d'Encausse, la secrétaire perpétuelle de l'Académie française est en colère contre la maire de Paris, Anne Hidalgo.

 

 

 

Pour la secrétaire perpétuelle, cela n’a aucun sens. Voltaire était membre de l’Académie et le sculpteur était membre de l’Académie des Beaux-Arts. Les prétextes techniques avancés par la mairie de Paris cachent mal la véritable motivation de cacher Voltaire : la peur des wokistes qui pourraient détruire cette statue. Dans la foulée, une autre grande personnalité historique est aussi menacée, Montesquieu dont on veut aussi déplacer la statue qui, elle, a été décapitée.

 

 

 

Les hésitations de Anna Hidalgo, la maire de Paris, cachent mal sa peur des milieux "wokistes".

Les hésitations de Anna Hidalgo, la maire de Paris, cachent mal sa peur des milieux "wokistes".

 

 

 

Deux des principaux pères fondateurs des Lumières sont donc menacés par effigies interposées. Derrière le « décolonialisme », ce sont justement les Lumières qui sont visées ! Cette volonté de déboulonner des statues de personnages historiques traduit une fois de plus une offensive contre la pensée libre et pour la pureté qui est le contraire de l’esprit des Lumières qui est universel : il faut effacer toute trace des crimes abominables de la colonisation. Fort souvent, je cite cette sentence de George Orwell : « Celui qui contrôle le présent, contrôle le passé, celui qui contrôle le passé, contrôle l’avenir. »

 

Qu’est-ce à dire ? Certes, sur le plan moral, la colonisation fut une abomination. Cependant, dans l’histoire de l’humanité, elle a toujours existé. Que ce soit en Afrique, entre Africains, en Asie entre différents peuples, que ce soit dans les Amériques et aussi en Europe. L’actuelle guerre d’Ukraine a pour origine la colonisation de l’Ukraine au XVIIIe siècle par la Russie de Catherine II. Faut-il alors pour éradiquer le passé, effacer la mémoire de la colonisation ?

 

Effacer la mémoire est une caractéristique des totalitarismes modernes. L’islamisme, lui, a une démarche différente mais tout aussi dangereuse : il fige le passé. Les deux démarches génèrent des crimes et la régression. Le pire est : nos démocraties « libérales » se montrent incapables à combattre ces phénomènes qui se répandent comme une traînée de poudre parce qu’elles ont peur.

 

Dans le refus évident de remettre la statue de Voltaire sur son socle dans les jardins de l’Académie, on sent bien la peur chez Anne Hidalgo, la peur de se mettre à dos les partisans prétendument « de gauche » du dogmatisme wokiste. D’autre part, les réactions des autorités nationales et internationales occidentales à la tentative d’assassinat de Salman Rushdie sont d’une mollesse inacceptable parce qu’elles se transforment en véritable incitation au meurtre.

 

Réagir durement n’est pas nécessairement user des armes ou jeter des bombes, c’est avant tout être ferme sur les fondamentaux. Nous ne sommes pas sans moyens puisque nous en avons pour livrer des armes modernes et sophistiquées à un des belligérants de la guerre d’Ukraine. Aussi, nous avons les moyens de rappeler nos fondamentaux aussi bien sur le plan intérieur qu’extérieur.

 

Dès lors, qu’attend-on ? Où est le blocage ? Il est dans la peur, cette peur paralysante tout simplement.

 

 

Pierre Verhas

 

 

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9 juillet 2022 6 09 /07 /juillet /2022 09:45

 

 

 

Joe Biden est un homme dangereux. Il est faible à l’intérieur et fort à l’extérieur de la faiblesse des autres. À l’intérieur des Etats-Unis, ce président démocrate octogénaire réagit mollement aux coups de boutoir de l’aile la plus conservatrice des Républicains. L’arrêt de la Cour Suprême autorisant les Etats à interdire l’IVG n’a suscité en Biden qu’une réponse indignée, certes, mais sans envisager la moindre riposte. Ce président commence à inquiéter même dans son propre camp. Cette faiblesse ne fait que renforcer le camp adverse et risque de lui faire perdre sa faible majorité aux élections à mi-mandat et dans trois ans ramener les conservateurs républicains au pouvoir à Washington.

 

 

 

Joe Biden par son image consensuelle cache une grande faiblesse qui le rend dangereux.

Joe Biden par son image consensuelle cache une grande faiblesse qui le rend dangereux.

 

 

 

Sur le plan extérieur, après l’humiliante débandade de Kaboul, Biden tente de renforcer l’influence étatsunienne particulièrement en Europe et aussi dans le Pacifique en se basant sur l’OTAN. L’OTAN – Organisation du Traité de l’Atlantique Nord – fut l’instrument américain de domination militaire de l’Europe occidentale pendant la guerre froide. Elle eut ensuite tendance à s’étendre à tous les théâtres d’intervention militaire US au Moyen-Orient. Aujourd’hui, on l’a vu au tout récent Sommet de l’OTAN à Madrid, deux pays d’Asie ont été invités. Biden cherche aussi à neutraliser la Chine et donc y associer l’OTAN. Dans le cadre de la guerre en Ukraine, la Suède et la Finlande ont adhéré à cette organisation dans des conditions pas très honorables qu’on évoquera plus loin. Joe Biden s’est réjoui en disant qu’on a « otanisé la Suède et la Finlande ». Des pressions sont exercées sur la Suisse et l’Autriche qui sont les deux derniers pays d’Europe à ne pas être « otanisés » …

 

 

Pour bien comprendre, il nous faut remonter le temps. Le Traité de l’Atlantique Nord a été signé à Washington le 4 avril 1949 par douze pays. Le but officiel est de défendre le « monde libre » face au glacis communiste. Notons qu’un pays, le Portugal alors sous la dictature de Salazar en fait partie. Et tout récemment, la Suède et la Finlande ont dû accepter d'extrader des réfugiés politiques kurdes pour que la Turquie leur accorde son vote pour l'adhésion. Ainsi, la notion de « monde libre » est assez fluctuante !

 

 

 

La Finlande et la Suède sont les deux derniers Etats européens à être "otanisés".

La Finlande et la Suède sont les deux derniers Etats européens à être "otanisés".

 

 

 

La réalité est que l’OTAN est une organisation politique et militaire placée sous le commandement américain. « Toute la politique des Etats-Unis au sein de l’OTAN repose sur la conviction que la défense du « monde libre » est un tout indivisible et que la défense de l’Europe occidentale ne peut être dissociée de celle de Washington. » écrit Harry B. Ellis en 1950, texte réédité par Manière de Voir, juillet 2022, le bimestriel du Monde diplomatique. C’était l’époque où il y avait deux blocs de forces équivalente, le soviétique et l’occidental. La situation était donc figée en Europe. Il y eut aussi un autre épisode. Sans l’affirmer ouvertement, l’OTAN a aidé les colonels grecs en 1967 à fomenter un coup d’Etat contre le régime démocratique d’Athènes jugé trop faible face à la « menace communiste ». Les colonels restèrent au pouvoir jusqu’en 1974.

 

 

Ce n’est qu’en 1955 que l’autre « côté » réagit en fondant le Pacte de Varsovie. Ainsi, deux blocs étaient constitués et seront consolidés par la construction du Mur de Berlin en août 1961. L’année suivante, la crise des missiles de Cuba renforça la séparation des blocs. La même année 1962, commença la guerre du Vietnam provoquée par un incident monté de toutes pièces par la CIA, l’affrontement maritime du Golfe du Tonkin. Elle se solda par un échec colossal des Américains après la chute de Saïgon en 1975.

 

 

En Europe, tout en maintenant son adhésion au Traité de l’Atlantique Nord, le général de Gaulle décide en 1965 la sortie du commandement militaire allié de l’OTAN et fonde le principe de la défense « tous azimuts » après que la France se fut dotée de l’arme nucléaire. D’autre part, en réponse à la constitution des deux blocs, s’est formée à Cuba en 1966 la Tricontinentale qui regroupe 82 pays non alignés d’Asie, d’Amérique latine et d’Afrique. Auparavant, en 1955, eut lieu la conférence de Bandung qui regroupa 29 pays d’Afrique et d’Asie qui décidèrent du non-alignement. Cependant, ces initiatives ont échoué. Les « non-alignés » n’ont jamais réussi à constituer un bloc face aux deux autres. Par après, il s’est constitué une association informelle qu’on appelle le BRICS (Brésil Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) qui organise régulièrement des Sommets pour répondre au fameux G7. L’Iran vient d’y demander son adhésion. C’est une riposte évidente au bloc occidental.

 

 

 

Le général de Gaulle avait bien compris, il y a plus d'un demi-siècle, que l'ordre du monde ne pouvait être dominé par les "blocs".

Le général de Gaulle avait bien compris, il y a plus d'un demi-siècle, que l'ordre du monde ne pouvait être dominé par les "blocs".

 

 

 

Après la chute de l’URSS en 1991, c’est surtout le bloc occidental qui s’est renforcé. Gorbatchev, le dernier président soviétique, était partisan de la « maison commune », c’est -à-dire d’un rapprochement entre l’Europe et la Russie. Son successeur Eltsine a supplié Clinton à plusieurs reprises pour que les blocs ne se reconstituent pas. En vain. On sait la promesse qui a été faite à Gorbatchev après la chute du Mur de Berlin en 1989 de ne pas étendre l’OTAN vers l’Est. Paroles, paroles ! Et l’actuelle guerre en Ukraine renforce encore l’OTAN après l’adhésion de la Suède et de la Finlande.

 

 

 

Mikhail Gorbatchev a été trompé par les occidentaux avec leur fausse promesse de ne pas étendre l'OTAN vers l'Est.

Mikhail Gorbatchev a été trompé par les occidentaux avec leur fausse promesse de ne pas étendre l'OTAN vers l'Est.

 

 

 

Donc, à part la Chine et la Russie, il n’y a aucune puissance qui est à même de rivaliser avec les pays membres de l’OTAN. Cette organisation est devenue incontournable. Elle peut déclencher des guerres sans l’aval du Conseil de Sécurité de l’ONU, ce qui a été le cas en Afghanistan et en Irak au mépris total du droit international. Pourtant, l’occident s’affaiblit. Le reste du monde ne le suit plus ou ne se plie plus à ses diktats.

 

 

L’ordre occidental qui se renforce ne correspond plus à la réalité du monde. L’émergence de la Chine, bien sûr, mais aussi de puissances régionales comme l’Iran, la Turquie, le Mexique et même des puissances africaines qui se révèlent. Regardons aussi l’Arabie Saoudite qui s’éloigne de la sphère occidentale et qui va même jusqu’à renoncer en partie au « roi » dollar. L’occident n’est plus le maître du monde. En attendant, en « s’otanisant », l’Europe se tire une nouvelle balle dans le pied. Elle se vassalise en étant à la merci des diktats des néo-conservateurs américains et du complexe militaro-industriel.

 

 

L’Europe ne pourra se sauver que si elle comprend qu’elle n’est pas occidentale mais européenne.

 

 

 

Pierre Verhas

 

 

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27 juin 2022 1 27 /06 /juin /2022 19:22

 

 

 

Cela n’est pas courant qu’un économiste de renom, éduqué et formé aux Etats-Unis pour lesquels il proclame son amour, ainsi que celui de ses grands-parents flamands affamés par la bourgeoisie de Léopold II et qui y ont émigré et fait souche à Chicago. Il l’écrit :

 

« Mon Amérique, c’est celle des années 1970, du concert de George Harrison pour le Bangladesh au Madison, de Crosby, Stills & Nash et d’Hotel California. C’est surtout celle du film The Paper Chase, un film sur des étudiants en droit d'Harvard qui, dans la trame de Love Story, me convainquit, au terme des deux chocs pétroliers d’aller, moi aussi, un jour, étudier aux États-Unis. »

 

C’est aussi celle de ses études dans différentes universités et à la prestigieuse Harvard.

 

« Ce fut délibérément, le Midwest et un Master of Science. L’Indiana, en dessous de Chicago. Le Middle of Nowhere : la vraie Amérique, celle des bus scolaires jaunes, des aciéries en ruine, mais aussi des champs de maïs à l’infini. Celle des longues routes, et celle, plus bas, de Cap Canaveral qui m’avait fait rêver le 16 juillet 1969. »

 

Et il conclut avec tristesse : « Tout cela, c’était avant. »

 

« Avant une tentative de coup d’Etat, le 6 janvier de l’an passé, des dizaines de milliers de morts par armes à feux, autant, si pas plus, par l’overdose d’opioïdes, des courants fanatiques évangélistes, des ports d'armes - signe d'une décadence sociétale - et aujourd’hui, le retrait du droit élémentaire à l’avortement.



Moi qui ai tant aimé ce pays, je dis qu’il devient idéologiquement dangereux.



Ce pays a lancé trop de guerres jamais terminées, répand trop de violences qui sont gommées par l’image du pauvre G.I. tombé pour nous à Omaha Beach. Pauvres d’eux en 1944. Pauvres d’eux aujourd’hui. »

 

 

 

Le juge Clarence Thomas nommé en 1991 par George Bush père est un des six juges qui ont voté la permission d'interdire l'IVG aux Etats des USA. Il veut aussi abroger la loi sur le mariage pour tous et interdire la contraception.

Le juge Clarence Thomas nommé en 1991 par George Bush père est un des six juges qui ont voté la permission d'interdire l'IVG aux Etats des USA. Il veut aussi abroger la loi sur le mariage pour tous et interdire la contraception.

 

 

 

Oui, un économiste libéral pur jus qui proclame que ce pays « devient idéologiquement dangereux. », cela n’est pas courant ! Mais ce « tweet » d’humeur dénote une profonde honnêteté intellectuelle. Cet économiste, le Belge Bruno Colmant, a ce 25 juin exprimé non seulement sa tristesse, mais surtout sa révolte envers l’évolution de la société étatsunienne depuis deux ou trois décennies et qui s’est accélérée avec les quatre années de « trumpisme » qui se sont clôturées par une tentative de coup d’Etat visant à détruire les vénérables institutions de la première démocratie du monde contemporain.

 

 

 

Bruno Colmant, le plus connu des économistes belges francophones, professeur à l'ULB et à l'UCLouvain est un esprit libre et exprime toujours ses opinions.

Bruno Colmant, le plus connu des économistes belges francophones, professeur à l'ULB et à l'UCLouvain est un esprit libre et exprime toujours ses opinions.

 

 

 

L’arrêt massue

 

Et aujourd’hui, c’est la Cour Suprême, la plus haute juridiction des Etats-Unis qui par six voix contre trois autorise les 50 Etats US à interdire l’IVG ! C’est une régression sans précédent. Et ce n’est pas fini : un des juges veut s’attaquer à la contraception et au mariage pour tous. Trump avait dit : « Au-dessus de la loi, il y a Dieu ! ». Il est manifestement suivi !

 

Et ce conservatisme a des partisans en Europe. Ainsi, Dieu Godefridi l’intellectuel libéral belge a écrit au sujet de l’arrêt de la Cour suprême : « Cet arrêt est magistral ; il est tel une symphonie ». Un autre politicien libéral, bourgmestre (maire) d’une commune de la périphérie bruxelloise l’a bruyamment approuvé. Le très droitier président du MR (le parti libéral belge francophone, l’ineffable GLouB, a refusé de sanctionner ce personnage.

 

Que signifie donc cet assaut de conservatisme dans une Amérique en proie aux plus graves troubles ? Car, tout est lié. Il y a ce néo-puritanisme qui impose des restrictions à des libertés fondamentales, à l’autonomie individuelle et particulièrement à celle des femmes et des « minorités » sexuelles. Il y a cet aveuglement sur la violence meurtrière qui sévit dans l’ensemble du territoire étatsunien où le commerce des armes est libre pour tout un chacun et provoque quasi quotidiennement des dizaines de morts. Il y a ce racisme qui génère la violence meurtrière dont les principales victimes sont les Noirs américains ou les Afro-américains comme on dit aujourd’hui. Il y a cet impérialisme belliciste qui continue d’embraser de nombreuses régions dans tous les continents et qui est la cause des guerres meurtrières et interminables qui embrasent le Moyen-Orient et aujourd’hui l’Europe orientale.

 

Cet arrêt de la Cour suprême a eu des effets quasi immédiats dans plusieurs Etats nord-américains. Ainsi, le Missouri fut le premier à décréter l’interdiction totale de l’IVG et prépare une loi qui sanctionne sévèrement toute femme habitant cet Etat qui irait avorter dans un Etat où l’IVG est autorisée, ainsi que toute personne qui l’aiderait ! Une des principales libertés pour la femme, celle de disposer de son corps, est donc totalement aliénée !

 

Le professeur Jean-Philippe Schreiber de l’ULB vient d’écrire ce 27 juin dans sa chronique sur Facebook :

 

« Une faiblesse intrinsèque constituée par la prérogative qu’a le président des États-Unis de nommer les juges de la Cour suprême, au gré des décès ou des départs de ses membres. Le hasard a ainsi voulu que le président Donald Trump puisse nommer trois des neuf juges à la Cour suprême durant son mandat, en même temps qu’il désignait des dizaines de juges très conservateurs dans les différentes juridictions fédérales. Il a ce faisant précipité l’apothéose d’un mouvement réactionnaire qui s’est dessiné au lendemain de la fameuse décision Roe vs. Wade de 1973, autorisant la pratique de l’interruption volontaire de grossesse. Cette contre-révolution ultra-conservatrice guidée par la droite chrétienne trouve aujourd’hui son épiphanie dans l’arrêt qui renverse la décision de 1973. Ce n’est pas seulement qu’en cinquante ans la Cour suprême ait balancé d’une majorité libérale à une majorité conservatrice. C’est qu’elle est aujourd’hui, comme l’est le parti républicain, devenue l’otage d’une majorité décidée à opérer une révolution morale, à rendre à l’Amérique une espérance prophétique souvent fondée sur les prescrits bibliques… non seulement en matière d’avortement et de contraception, mais aussi d’homosexualité et de mariage entre personnes de même sexe, de port d’armes, de ségrégation, de libertés publiques et en particulier de liberté religieuse, de politique fiscale à l’égard des Églises et de leurs réseaux scolaires… Une partie significative de l’appareil judiciaire américain, et la composition actuelle de la Cour suprême l’illustre, est désormais sous la coupe de nationalistes chrétiens fermement décidés non seulement à miner les droits des femmes, mais à contrer ce qu’ils considèrent être la corruption morale de la Nation choisie par Dieu. Là réside le terrible constat : la décision de ce vendredi 24 juin n’est qu’une étape de cette effrayante révolution. »

 

 

 

Jean-Philippe Schreiber est très inquiet des conséquences de l'arrêt de la Cour suprême US dans le monde.

Jean-Philippe Schreiber est très inquiet des conséquences de l'arrêt de la Cour suprême US dans le monde.

 

 

 

Et ajoutons la réflexion du collègue de Jean-Philippe Schreiber, le professeur Vincent de Coorebyter :

 

« L’universalisme qui impose une vision de l’émancipation féminine est perçu comme un impérialisme. C’est un argument très présent dans le débat. » On est mal parti !

 

Cette effrayante révolution conservatrice est avant tout le fait des sectes évangéliques qui ont de plus en plus de poids aux Etats-Unis comme en Amérique du Sud et en Afrique centrale, tout comme depuis la révolution iranienne de 1979, elle est aussi le fait de l’islamisme radical – qu’il soit chiite ou sunnite – qui s’est répandu dans tout le monde musulman, mais aussi dans les communautés musulmanes en Europe qui ont de plus en plus de poids.

 

En Europe, notamment en France et en Belgique, plusieurs voix se sont élevées pour inscrire dans la Constitution des Etats, la liberté de pratiquer l’IVG, car il est bien entendu plus difficile de modifier une constitution qu’une loi. Cependant, une députée du parti « Défi » (francophones bruxellois) a fort opportunément rappelé que l’avortement n’était pas totalement sorti du Code Pénal ! En effet, une femme qui pratiquerait une IVG après 12 semaines est passible de poursuites judiciaires ! Ainsi, « bétonner » dans la Constitution une liberté qui n’est pas complète est juridiquement bizarre ! Encore une histoire belge !

 

La loi religieuse prime la loi civile !

 

On vient de s’en apercevoir à Bruxelles : le Parlement bruxellois vient de voter une ordonnance autorisant l’abattage sans étourdissement des animaux dans les abattoirs. Auparavant, l’abattage se faisait avec étourdissement préalable pour ne pas trop faire souffrir la bête et pour qu’elle conserve son sang. Les exigences halal ou casher veulent l’égorgement de l’animal sans étourdissement. Une majorité de parlementaires bruxellois a donc cédé à la pression des « religieux ». Ainsi, des partis qui ont la laïcité dans leur ADN ont toléré qu’en l’occurrence, la loi religieuse prime la loi civile ! C’est un précédent particulièrement dangereux !

 

Le professeur Vincent de Coorebyter, aussi président du CRISP (Centre de Recherche Social et Politique) donne une intéressante réflexion publiée dans l’enquête publiée par le journal « l’Echo » du samedi 25 juin 2022 sur le poids des religions à Bruxelles.

 

 

 

Le professeur Vincent de Coorebyter s'intéresse au poids de plus en plus grand des religions à Bruxelles.

Le professeur Vincent de Coorebyter s'intéresse au poids de plus en plus grand des religions à Bruxelles.

 

 

 

« … la défense de certains dogmes par nos mandataires politiques s’inscrit aussi dans le phénomène sociologique incarné par mai 68, qui défend le droit des minorités et des individus à l’affirmation et à l’identité. Ce qui peut valoir aussi bien pour l’identité sexuelle que religieuse. (…) C’est une lame de fond qui a touché tous les partis et qui en faveur de l’expression de la religiosité, considérée comme l’une des facettes de cette liberté de choix que toute personne possède dans la vie. »

 

À moins qu’on la lui ôte ! Les religions monothéistes sont par définition exclusives ! Il est assez symptomatique que l’on parle toujours de « liberté religieuse » et qu’il n’est pratiquement plus question de « liberté de conscience » qui, elle, est générale.

 

L’aliénation

 

Nous vivons dans ces affaires une terrible aliénation. Elle finit par toucher tous les domaines de la vie sociale jusqu’à la géopolitique, car les graves tensions internationales que nous vivons sont aussi le résultat de l’aliénation.

 


« L’aliénation religieuse de quelque secte que ce soit, est une malédiction humaine. Penser l’émancipation c’est combattre l’aliénation. La religion étant mère de toutes les aliénations, plus son emprise est forte, plus la perspective d’émancipation s’éloigne. Et plus la perspective d’émancipation sociale s’éloigne, plus celle d’une renaissance spirituelle est inévitable. Le combat pour la libre expression et contre les dogmes de tout ordre est, plus que jamais, indispensable pour réaliser l’émancipation intégrale des citoyens, ce qui est le but ultime du socialisme. » déclarait Jef Baeck, trop tôt disparu, à l’occasion d’une Assemblée générale des Mutualités socialistes du Brabant où son discours de clôture était attendu impatiemment par tous les militants.

 

 

 

Jef Baeck prononçant son discours très politique de clôture de l'AG annuelle des Mutualités socialistes du Brabant

Jef Baeck prononçant son discours très politique de clôture de l'AG annuelle des Mutualités socialistes du Brabant

 

 

L’objectif ultime du socialisme compris par certains, car d’autres socialiste ont voté l’ordonnance bruxelloise : tous les députés PS à l’exception notable de deux d’entre eux.

 

Mais il ne s’agit pas que de socialisme, loin de là. Il s’agit de l’émancipation de l’ensemble des hommes et des femmes dans le monde. Ce qu’on appelle l’occident, c’est-à-dire en gros les USA et l’Europe sont directement menacés tout comme le reste du monde. Cela est donc un combat universel et nous devons nous y préparer, car il est loin d’être gagné. C’est notre civilisation qui est en jeu.

 

 

Pierre Verhas

 

 

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20 juin 2022 1 20 /06 /juin /2022 16:27

 

 

 

Il fallait s’y attendre. Nous nous faisions encore des illusions. Mais non, la réalité vient une fois de plus nous frapper : Pritti Patel, la Home Office Secretary (ministre de l’Intérieur britannique), vient de trancher. Elle autorise l’extradition de Julian Assange vers les Etats-Unis. C’est le clap de fin d’une fuite de plus de onze années. Certes, les avocats du fondateur de Wikileaks ont quatorze jours pour faire appel, mais la Haute Cour peut refuser la procédure d’appel et il y a fort à parier que ce sera le cas. Un appel précédent avait déjà été refusé par cette juridiction.

 

 

 

Julian Assange est la victime de l'acharnement étatsunien.

Julian Assange est la victime de l'acharnement étatsunien.

 

 

 

Quiconque dans ce pays devrait avoir honte !

 

« Quiconque dans ce pays se soucie de la liberté d'expression devrait avoir profondément honte que la ministre de l'Intérieur ait approuvé l'extradition de Julian Assange vers les États-Unis, le pays qui a comploté son assassinat. Julian n'a rien fait de mal. Il n'a commis aucun crime et n'est pas un criminel. Il est journaliste et éditeur, et il est puni pour avoir fait son travail » a déclaré son épouse Stella Morris. Julian Assange et elle ont convolé en mars dernier en prison. Stella Morris est son avocate depuis qu’Assange s’est réfugié à l’ambassade d’Equateur. Ils ont deux enfants.

 

 

Stella Assange et WikiLeaks ont déclaré que « ce n'est pas la fin du combat. Ce n'est que le début d'une nouvelle bataille juridique ». Si l'autorisation de faire appel est accordée, l'audience pourrait ne pas avoir lieu avant début 2023, a expliqué à l'agence PA Kate Goold, associée du cabinet d'avocats Bindmans et spécialisée dans les affaires d'extradition.

 

 

 

Stelle Morris qui vient d'épouser Julian Assange et leurs deux enfants. Une femme admirable !

Stelle Morris qui vient d'épouser Julian Assange et leurs deux enfants. Une femme admirable !

 

 

 

Même si l'appel est refusé, l'extradition pourrait être retardée pour des raisons de santé si Julian Assange « est trop malade, par exemple, s'il n'est en état de prendre l'avion ». Julian Assange « a également la possibilité de faire appel de la décision d'extrader pour des motifs liés aux droits de l'homme si cela est nécessaire pour éviter une véritable injustice » a-t-elle avancé. Il pourrait saisir la Cour européenne des droits de l'homme, un processus susceptible de prendre plusieurs années. Cependant, la saisine de la CEDH n’est pas suspensive de la décision d’extradition. Elle ne peut avoir comme conséquence que la condamnation éventuelle de l’Etat britannique.

 

 

Un dernier espoir...

 

 

Une autre pièce s’ajoute à ce dossier. Le nouveau Premier ministre australien, Anthony Albanese a affirmé lundi 20 juin qu'il entend s'engager « diplomatiquement » au sujet des poursuites engagées par les États-Unis à l'encontre de Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, qui se bat pour éviter d'y être extradé. Cet engagement politique d’un Etat membre du Commonwealth pourrait avoir beaucoup de poids.

 

 

 

 

Anthony Albanese, le nouveau Premier ministre australien, s'oppose par la voie diplomatique à l'extradition de son concitoyen Julian Assange.

Anthony Albanese, le nouveau Premier ministre australien, s'oppose par la voie diplomatique à l'extradition de son concitoyen Julian Assange.

 

 

Espérons !

 

 

Nous reproduisons ci-dessous le « papier » de Viktor Dedaj, un des rédacteurs resposables du site le « Grand Soir » qui se bat pour la libération de Julian Assange depuis des années, qui a traduit un nombre considérable d’articles sur cette tragique affaire et qui lutte depuis le début pour sa libération et… la liberté de la Presse. Il est ainsi le meilleur porte-parole francophone en l’occurrence.

 

 

 

Viktor Dedaj se bat avec acharnement pour la libération de Julain Assange.

Viktor Dedaj se bat avec acharnement pour la libération de Julain Assange.

 

 

Pierre Verhas

 

 

Le jour où le journalisme est mort

 

Malgré les appels de virtuellement toutes les organisations de défense des droits de l’homme, de défense de la liberté de la presse et de la liberté d’expression, d’organisations et de syndicats de journalistes, Priti Patel vient de signer l’extradition de Julian Assange. La défense a 14 jours pour faire appel. L’appel peut être refusé.

 

 

Julian Assange : la fin d’une illusion

 

 

 

Il s’agit d’une grande victoire pour la presse institutionnelle qui a tout fait pour réduire "la plus importante affaire de presse de notre existence" (dixit John Pilger) en un vulgaire faits divers. Une presse qui a relayé pendant plus de dix ans tous les mensonges, calomnies et légendes urbaines qui ont servi d’écran de fumée pour occulter les vrais tenants et aboutissants. Le résultat fut celui qui avait été prévu et planifié dès 2010 : faire disparaître le cas Assange de la conscience collective et procéder à l’élimination - médiatique si possible, physique si nécessaire - du journaliste le plus innovant, primé, efficace et dangereux (pour les pouvoirs corrompus) du 21ème siècle.

 

Une presse si prompte à faire du "fact-checking" lorsqu’il s’agit de sauver un récit officiel mais si absente lorsqu’il s’agit de sauver le représentant le plus conséquent de notre droit de savoir. Des accusations de viol (qui n’ont jamais existé) jusqu’aux pseudos "mises en danger" de vies, en passant par la qualité de ses chaussettes, rien ne lui aura été épargné. Avec une mention spéciale pour tous ceux qui ont collaboré et profité et gagné de petites fortunes sur le dos de Wikileaks, et qui n’ont pas trouvé une once de courage - ou de volonté ? - pour exprimer leur solidarité avec lui.

 

Et comme à chaque fois que le nom de Julian Assange apparaît dans les fils de l’actualité, on assistera à un défilé de trolls en mission, dont certains sont munis d’une carte de presse, qui nous asséneront leurs conneries habituelles. Je serais tenté de dire que l’Histoire leur sera ingrate, mais encore faut-il que l’Histoire ne soit pas réécrite au passage, comme ils l’ont déjà fait et comme ils sont encore en train de le faire.

 

Bien-sûr, ils diront qu’en ce qui concerne Assange et Wikileaks, il ne s’agissait pas vraiment de journalisme et que la presse institutionnelle sera toujours là pour nous informer correctement. Mais que voulez-vous que la presse des milliardaires dise d’autre ?

 

Le journalisme est mort non pas au fond d’un cachot, non pas d’une balle dans la tête, non pas dans l’explosion d’une voiture, ni même découpé dans une ambassade saoudienne. Il est mort le jour où il a choisi la complicité en laissant filer en silence et vers l’oubli le meilleur d’entre eux.

 

Viktor Dedaj

           

 

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7 juin 2022 2 07 /06 /juin /2022 13:06

 

 

 

Dans le climat actuel, on a trop tendance à aborder la très complexe question de l’immigration sous l’angle du racisme ou de la religion. Tout d’abord, il y a différents types d’immigration dont les principaux sont l’immigration économique – ce dont il est question ici – l’afflux de réfugiés fuyant des guerres de plus en plus meurtrières et destructrices comme en Syrie et en Ukraine, guerres pour lesquelles nous portons de lourdes responsabilités, les réfugiés de la faim dont l’exemple dramatique donné régulièrement sont ces migrants provenant de l’Afrique subsaharienne et risquant le naufrage en Méditerranée sur de frêles embarcations fournies par des mafias de passeurs.

 

 

Le continent européen et particulièrement les pays d’Europe occidentale sont de véritables aimants pour ces populations fuyant la misère la plus atroce.

 

 

Le problème posé par l’immigration est le regroupement familial qui est une idée généreuse. Cependant une générosité mal organisée peut générer des catastrophes. C’est ainsi que les enfants ont été sous-scolarisés parce qu’on n’a pas donné les moyens suffisants pour qu’ils puissent se développer harmonieusement au sein de la société européenne. C’est bien pour cela que ces débats sur l’intégration ou l’assimilation n’ont absolument aucun sens. Cette génération abandonnée est à la merci des extrémistes religieux ou nationalistes qui trouvennt en elle une masse malléable pour leurs projets destructeurs.

 

 

Seul le développement par l’enseignement, une politique de logements décents permettra d’en sortir. Mais cela nécessite d’énormes moyens. Aura-t-on un jour la volonté de les concrétiser ? C’est cependant vital.

 

 

Dans l’article qui suit de la plume de notre ami Bernard Gensane (blog : http://bernard-gensane.over-blog.com/ ), il s’agit d’une analyse de la question de l’immigration en France, s’inspirant en partie de l’économiste Maurice Allais, prix Nobel d’économie, qui pose les bonnes questions et qui n’apporte guère de réponses tant le problème est complexe.  Enfin, on s’apercevra que la problématique en France est similaire à la nôtre dans notre petite Belgique à trois régions.

 

 

Cependant, on ne résoudra le problème que par le biais de l’économie. Le seuil des écoles doit impérativement être ouvert aux jeunes issus de l’immigration. Cela nécessite de considérables investissements. Les logements et les services collectifs doivent être décents et efficaces pour permettre aux immigrés de sortir des ghettos dans lesquels ils sont volontairement ou non enfermés. Cela nécessite aussi de gros investissements. Dois-je continuer ?

 

 

 

Pierre Verhas

 

 

 

Symbolique de l'immigration en Belgique selon la Libre Belgique

Symbolique de l'immigration en Belgique selon la Libre Belgique

 

 

 

Pour que l'immigration soit un facteur de prospérité.

 

Par Bernard Gensane

 

 

 

L'immigration coûte-t-elle ou est-elle bénéfique à la fois aux immigrés et aux populations d'accueil ? 

 

 

C'est une question à laquelle il est très difficile d'apporter une réponse objectivement satisfaisante, d'autant que les économistes qui étudient ces questions de près ne sont pas d'accord entre eux.

 

 

Tant qu'on utilisera les travailleurs immigrés pour tirer les salaires des travailleurs d'origine vers le bas, on contribuera à l'appauvrissement général des populations et de nos pays. Malheureusement, la spirale est toujours aussi infernale.  On va ainsi bientôt voir arriver des travailleurs asiatiques via la Roumanie... Pour qu'il y ait enrichissement, il faut, au contraire, que le niveau moyen de qualification des travailleurs immigrés soit supérieur au niveau moyen de qualification des travailleurs du pays d'accueil. Et ce, dans la durée, car, on le sait bien, une forte proportion d'immigrés ne retourne pas au pays. Il faut donc que ce qui est valable pour eux soit également valable pour leurs enfants et petits-enfants.

 

 

Si l'immigration de masse n'a pas posé de graves problèmes des années cinquante jusqu'au milieu des années soixante-dix, c'est parce qu'il n'y avait quasiment pas de chômage et donc parce que les immigrés venaient soulager des mains-d’œuvre autochtones pléthoriques. Voir l'exemple des usines Renault et, avant cela, des Polonais dans les mines de charbon.

 

 

Aujourd'hui, les travailleurs immigrés qui parviennent à trouver un vrai emploi sont bénéficiaires. Les employeurs de même. En revanche, les pays d'origine sont dans l'ambiguïté : ils perdent des forces vives, ce qui est très regrettable à terme mais, dans le même temps, ils se soulagent d'une démographie excédentaire et de jeunes, parfois turbulents et intenables dont ils ne savent plus quoi faire. Dans les deux cas : un gâchis.

 

 

Si le regroupement familial est, humainement, une très bonne chose, il a souvent pour conséquence un afflux de mères et d'adolescents sans vraie qualification, difficilement adaptables au monde de l'emploi des pays développés. Et on ne parle même pas des demandeurs de faux asiles ou des clandestins qui occupent désormais dans nos sociétés la majorité des postes ubérisés.

 

 

Quant à la question de savoir, si les immigrés payent ou vont payer les retraites des locaux, la réponse fait débat. Elle ne pourrait être positive que si les immigrés repartaient immédiatement à la fin de leur période d'activité professionnelle.

 

Aujourd'hui, des économistes et démographes de gauche pensent que le besoin d'immigration n'est pas vital pour faire tourner la machine économique car les sociétés du Nord disposent de réserves d'activité considérables : chômeurs, femmes, robots. Par ailleurs, la main d'œuvre issue de l'immigration est sous-employée. Les enfants sont majoritairement peu ou mal éduqués. Cette sous-éducation crée du chômage chez les jeunes issus de l'immigration, ce qui débouche, là encore, sur une baisse généralisée des salaires, facteur d'appauvrissement général et sur une stagnation de la productivité. Sans parler du développement d'une économie parallèle.

 

 

Comme tout individu, comme tout être social, l'immigré représente un coût pour la collectivité. Il doit être soigné, logé, ses enfants éduqués etc. Ce qui pose problème quand il paye très peu d'impôts ou qu'il transfère une partie de ses revenus vers son pays d'origine. L'immigré n'est pas responsable de la saturation des services publics car le système a été organisé avant lui et sans lui. S'il n'y avait pas d'immigrés dans les cellules de prison ou dans les rames de métro, c'est d'autres prolétaires – blancs pour parler vite – qui encombreraient ces lieux.

 

 

L'économiste Maurice Allais posait en son temps les problèmes dûs, en France, à une soudaine immigration de masse, à la suite de l'indépendance de l'Algérie, par exemple : « Sans entrer dans les différents types d’immigration (immigration de travail, de peuplement, regroupement familial…), les principaux effets de l’immigration apparaissent clairement : 

 

L’arrivée d’immigrants ne modifie pas immédiatement le niveau du PIB. Le PIB doit alors être partagé entre les citoyens et les nouveaux arrivants. 

 

L’arrivée des immigrants nécessite des investissements supplémentaires qui réduisent la part de la consommation de tous les ménages (construction de logement, infrastructures…). Elle conduit donc, au moins temporairement, à un appauvrissement de la population locale dont la valeur est supérieure à la contribution directe de l’immigration au taux d’accroissement de la population (à long terme 3 à 4 fois ce taux d’immigration). L’arrivée de nouveaux travailleurs ne peut être valorisée qu’à long terme.

 

Pour autant, il ne faudrait pas en conclure que l’immigration est nuisible en elle-même. L’arrivée d’immigrants en Amérique du Nord a indiscutablement contribué à l’essor de l’économie du nouveau monde, même si cela s’est fait au détriment des premiers habitants, les Indiens.

Une immigration temporaire peut permettre de faire face à un manque temporaire de main d’œuvre ou à un déséquilibre de la pyramide des âges. Toutefois, celle-ci est évidemment contre-indiquée dans un pays qui, comme la France, souffre d’un important chômage de masse. »

 

Allais observait que, dans le contexte de la mondialisation, les employeurs étaient contraints d'embaucher des travailleurs immigrés : « Pour l'employeur, il est transitoirement préférable d'embaucher un immigré, moins exigeant qu'un citoyen. Il est naturel qu'il fasse ce choix qui lui est quasiment imposé par une concurrence exacerbée par la mondialisation. Cet employeur peut même délocaliser sa production et ainsi éviter de payer les salaires nationaux et les charges sociales associées. Il contribuera ainsi au déséquilibre des comptes sociaux, au déficit de la balance commerciale et à la désindustrialisation de la nation. » Et Allais estimait à 32 milliards de biens publics à produire chaque année pour accueillir les immigrés et leurs familles dans des conditions normales.

 

 

 

L'immigration de la faim : des passeurs vendent à des prix d'or de frêles embarcations en Afrique du Nord pour "permettre" aux migrants de traverser la Méditerranée. Le moindre incident peut être mortel !

L'immigration de la faim : des passeurs vendent à des prix d'or de frêles embarcations en Afrique du Nord pour "permettre" aux migrants de traverser la Méditerranée. Le moindre incident peut être mortel !

 

 

La question est de savoir si l'accueil des immigrés sera toujours compatible avec l'esprit et la lettre de l'État social que la France a connu depuis l'après-Deuxième Guerre mondiale. 

 

 

 

Bernard Gensane

 

 

 

 

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31 mai 2022 2 31 /05 /mai /2022 08:45

 

 

Chomsky et l'opinion « mainstream »

 

 

Si l’éminent linguiste étatsunien Noam Chomsky toujours bon pied bon œil à 94 ans se retrouve marginalisé par les médias mainstream, c’est parce que ses analyses sont sans complaisance.

 

 

Noam Chomsky, 94 ans, toujous bon pied bon œil et surtout... lucide

Noam Chomsky, 94 ans, toujous bon pied bon œil et surtout... lucide

 

 

 

Le site « le Grand Soir » fait de son discours sur la guerre en Ukraine l’analyse suivante dont voici un extrait :

 

« En tant qu’un des plus fins analystes des médias en activité, Chomsky met en évidence plusieurs contradictions dans le discours dominant actuel et particulièrement aux États-Unis que l’on retrouvera dans les médias mainstream européens, notamment le Monde en France.

 

D’abord, il y a selon lui deux idées qui se contredisent mais qui prédominent dans le discours occidental : d’un côté, une jubilation sans retenue devant une prétendue démonstration que l’armée russe serait un « tigre de papier », incapable même de conquérir à quelques kilomètres de ses frontières des villes défendues seulement par leurs habitants en armes. De l’autre, que nous devons en conséquence nous incliner, tout pleins d’une terreur devant cette impressionnante machine militaire sur le point d’attaquer et de soumettre quiconque se trouve sur son chemin.

 

En bref, face à une armée russe « faible » il faut nous armer jusqu’aux dents, rejoindre la plus puissante des machines de guerre de l’histoire, une alliance militaire qui prétend toujours être défensive, alors que ses archives démontrent clairement le contraire, dirigée par les EU et le Royaume-Uni et qui a jusqu’à aujourd’hui un historique d’agressions, de violences et de subversions. Nous devons exacerber les tensions pour nous protéger d’un tigre de papier incompétent.

 

Ensuite, toujours selon Chomsky, le gouvernement des EU considère la propagande russe comme tellement ridicule que quiconque y est confronté éclatera de rire. Donc, en toute logique, il est nécessaire de protéger les citoyens étasuniens (et européens) en leur en empêchant l’accès par le blocage de tous les médias russes. Pas question d’entendre ce que les dirigeants russes disent. Et il est aussi impératif de censurer d’éminents reporters, tels que Chris Hedges, ancien grand reporter pour le New York Times, spécialiste du Moyen-Orient et des Balkans. Tout ce qui vient de lui doit être détruit. Nous ne sommes pas autorisés à écouter une seule chose que les Russes pourraient dire ou penser. Les Étasuniens (et les Européens) sont tellement faibles mentalement qu’ils pourraient être bouleversés par ce qu’ils entendent, aussi ridicule et risible que ce soit.

 

Les pays libres ont un long historique de protection de leurs populations contre tout ce qui pourrait dévier de la ligne officielle, contre toute pensée impropre. Cela remonte à la Première Guerre mondiale, reconnue aujourd’hui par les historiens comme une guerre « pour rien », dont les intelligentsias européennes soutenaient la nécessité pour protéger leurs nations respectives et où les voix dissidentes étaient simplement étouffées voire carrément éliminées : Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht en Allemagne, Eugene Debs aux États-Unis, Jean Jaurès en France. Dans les pays libres, on a le droit de s’exprimer mais à ses risques et périls.

 

 

 

L'ancien leader travailliste Jeremy Corbyn

L'ancien leader travailliste Jeremy Corbyn

 

 

 

Chomsky prend ainsi l’exemple de Jeremy Corbyn, député travailliste anglais et ancien candidat malheureux au poste de premier ministre britannique qui a récemment déclaré la nécessité pour le Royaume-Uni de se détacher de l’OTAN (et de l’influence des EU) afin de former une alliance européenne pour la paix, transposant de facto dans le présent une des deux positions européennes (hors cadre de l’UE) qui s’opposent après la fin de la Seconde Guerre mondiale : la vision atlantiste selon laquelle l’Europe doit rejoindre le système atlantique, sous domination des EU, vision que bien évidemment ce pays privilégie, et une vision alternative, dont le plus célèbre partisan fut Charles De Gaulle, celle d’une force indépendante dans les affaires du monde, allant de l’Atlantique jusqu’à l’Oural, idée soutenue également par Olof Palme, ancien premier ministre de la Suède et Willy Brandt, ancien chancelier allemand.

 

Pour ces positions, Corbyn vient d’être exclu définitivement du Parti travailliste (après en avoir été suspendu pour un soi-disant antisémitisme). »

 

En mettant en lumière cette contradiction sur l’armée russe, Noam Chomsky démonte la propagande occidentale dont sont noyés les médias et la presse mainstream. On n’informe plus, on se contente de diffuser cette propagande via les agences de presse. D’ailleurs, on distille des informations contradictoires. De vieux chars russes T62 sont acheminés vers le front de l’Ukraine. L’armée russe manquerait-elle de chars ? Les drones kamikazes turcs (voir « Uranopole » https://uranopole.over-blog.com/2022/01/l-apprenti-sorcier-erdogan-et-les-armes-de-destructions-letales.html ) feraient des ravages. De l’artillerie lourde est fournie à l’Ukraine, etc.

 

 

 

Le journaliste reporter de BFM TV abattu par les Russes en Ukraine. Encore un !

Le journaliste reporter de BFM TV abattu par les Russes en Ukraine. Encore un !

 

 

 

Et comme toujours, les grands reporters et correspondants de guerre risquent leur peau et se font abattre en Palestine comme en Ukraine pour informer le public, permettant ainsi aux citoyens de se faire leur opinion, car sans leurs images et leurs commentaires, une guerre n’existe pas ! C’est pour cela qu’on les tue !

 

 

La Belgique retrouve petit à petit ses vieux démons.

 

 

À peine la crise de la Covid calmée, des bruits persistants courent au sujet d’une éventuelle chute de la « Vivaldi », ce gouvernement dirigé par l’ultralibéral flamand Alexander De Croo composé de sept partis antagonistes : les libéraux flamands de l’Open Vld, les libéraux francophones du MR, le PS francophone et « Vooruit » (« en avant », les socialistes flamands), les Ecolos francophones et Groen (écologistes flamands) et enfin le Cd&V (chrétiens flamands) , est menacé d’éclater. Il est vrai qu’il est attaqué à l’intérieur comme à l’extérieur.

 

 

 

Le Premier ministre belge Alexander De Croo a fort à faire pour maintenir la cohérence de son gouvernement fait de bric et de broc...

Le Premier ministre belge Alexander De Croo a fort à faire pour maintenir la cohérence de son gouvernement fait de bric et de broc...

 

 

 

En outre, un petit roquet ne cesse d’aboyer et trouble systématiquement la « sérénité » de ce gouvernement, l’ineffable Georges Louis Bouchez dit GlouB, président du MR qui imite bien Trump en tweetant à tout va où il se fait un plaisir d’attaquer systématiquement ses deux adversaires francophones : Ecolo et le PS. Trois partis du même gouvernement qui se disputent, cela fait désordre.

 

 

 

Gerorges-Louis Bouchez dit GlouB, le petit Trump...

Gerorges-Louis Bouchez dit GlouB, le petit Trump...

 

 

 

Les sondages en outre sont catastrophiques pour ce gouvernement, ce qui n’arrange guère les choses. On constate en Flandre une progression spectaculaire des deux mouvements nationalistes flamands, la très droitière NV-A (Nouvelle Alliance Flamande) et le néo-nazi Vlaams Belang (Grand groupe Flamand) qui, à deux, ont quasi la majorité absolue au Parlement flamand. En Wallonie, le Parti de la gauche radicale PTB (Parti du Travail de Belgique) dépasse le PS. À Bruxelles, le PS s’effondre au profit des Ecolos et des libéraux du MR. Tout cela ne contribue en rien à la stabilité gouvernementale.

 

La montée du nationalisme flamand réveille en plus les vieux démons communautaires. On parle de plus en plus d’une 7e réforme de l’Etat (revendication fondamentale de la NV-A). Le 25 mai, un débat télévisé à la RTBF réunissait de jeunes politiciens francophones de tous bords. On peut dire qu’ils n’ont rien à envier à leurs aînés. Même langue de bois, mêmes revendications dépassées, mêmes slogans obsolètes. On évite les questions qui fâchent ! Et on ne pose pas la question fondamentale : voulons-nous encore vivre et œuvrer ensemble dans ce pays ?

 

Non, on est reparti pour un bricolage institutionnel qui ne fera que grossir le monstre « fédéral » à la Belge ! Tout cela ne peut que mal finir.

 

En attendant, quelle que soit la suite de cette affaire, une chute de gouvernement et des élections anticipées ne pourraient qu’ajouter du désordre en ces temps troublés par des menaces de guerre et de crise économique majeure. Et sur le plan social, on pourrait en revenir à l’austérité et au démantèlement des acquis sociaux.

 

 

 

Assange attend la décision du Home Office.

 

 

 

Voici un extrait d’un article du journaliste britannique Jonathan Cook sur l’évolution de l’affaire Assange paru sur le site « Le Grand Soir ».

 

 

 

 

Julian Assange sera-t-il ou non extradé ?

Julian Assange sera-t-il ou non extradé ?

 

 

 

La ministre britannique de l’Intérieur, Priti Patel, décidera ce mois-ci si Julian Assange doit être extradé vers les États-Unis, où il risque une peine pouvant aller jusqu’à 175 ans, probablement effectuée en isolement strict, 24 heures sur 24, dans une prison américaine de très haute sécurité.

 

Il a déjà passé trois ans dans des conditions tout aussi difficiles dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, à Londres.

 

Les 18 chefs d’accusation retenus contre Assange aux États-Unis sont liés à la publication par WikiLeaks, en 2010, de documents officiels ayant fait l’objet de fuites, dont beaucoup montrent que les États-Unis et le Royaume-Uni sont responsables de crimes de guerre en Irak et en Afghanistan. Personne n’a été traduit en justice pour ces crimes.

 

Au lieu de cela, les États-Unis ont défini le journalisme d’Assange comme de l’espionnage - et, par voie de conséquence, ont affirmé leur droit de saisir tout journaliste dans le monde qui s’attaque à l’État de sécurité nationale américain - et les tribunaux britanniques ont donné leur bénédiction dans une série d’audiences d’extradition.

 

Les longues procédures contre Assange se sont déroulées dans des salles d’audience à l’accès très restreint et dans des circonstances qui ont empêché à plusieurs reprises les journalistes de couvrir correctement l’affaire.

 

Cependant, malgré les graves implications pour la liberté de la presse et la responsabilité démocratique, le sort d’Assange n’a suscité guère plus qu’un soupçon d’inquiétude dans la plupart des médias occidentaux.

Peu d’observateurs semblent douter que Mme. Patel signera l’ordre d’extradition américain, surtout pas Nils Melzer, professeur de droit et rapporteur spécial des Nations unies.

 

En tant qu’expert de l’ONU sur la torture, Melzer s’est donné pour mission depuis 2019 d’examiner minutieusement non seulement le traitement d’Assange pendant ses 12 années de confinement croissant - supervisé par les tribunaux britanniques - mais aussi la mesure dans laquelle la procédure régulière et l’État de droit ont été respectés dans la poursuite du fondateur de WikiLeaks.

 

M. Melzer a rassemblé ses recherches détaillées dans un nouveau livre, The Trial of Julian Assange, qui fournit un compte rendu choquant de la non-droit rampant des principaux États impliqués - la Grande-Bretagne, la Suède, les États-Unis et l’Équateur. Il documente également une campagne sophistiquée de désinformation et de diffamation visant à dissimuler ces méfaits.

 

Le résultat, conclut Melzer, a été une attaque incessante non seulement contre les droits fondamentaux d’Assange, mais aussi contre son bien-être physique, mental et émotionnel, que Melzer qualifie de torture psychologique.

 

Le rapporteur des Nations unies affirme que le Royaume-Uni a investi beaucoup trop d’argent et d’énergie pour obtenir la persécution d’Assange au nom des États-Unis, et qu’ils ont eux-mêmes un besoin trop pressant de dissuader d’autres personnes de suivre la voie tracée par Assange pour dénoncer les crimes occidentaux, pour risquer de laisser Assange en liberté.

 

Au lieu de cela, ils ont participé à une vaste mascarade juridique visant à masquer la nature politique de l’incarcération d’Assange. Et ce faisant, ils ont systématiquement fait fi de l’État de droit. »

 

Rappelons que Nils Melzer a publié un ouvrage « The Trial of Julian Assange » qui paraîtra en français en septembre prochain.

 

Un élément nouveau pourrait cependant jouer en faveur de Julian Assange. Les élections en Australie, son pays natal, ont amené une majorité progressiste au pouvoir chassant les conservateurs. Sans doute, le nouveau Premier ministre à Canberra fera-t-il pression sur le gouvernement de Londres. Wait and see !

 

 

Pierre Verhas

 

 

 

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